L’autorisation du glyphosate renouvelée pour 10 ans par la Commission Européenne

Aude Lecrubier

Auteurs et déclarations

17 novembre 2023

Europe – Jeudi 16 novembre, un vote des membres de l’Union Européenne n’a pas permis de dégager de majorité sur le sort du glyphosate. La Commission Européenne a donc tranché et décidé de procéder au renouvellement de l'approbation du glyphosate pour une période de 10 ans, sous réserve de certaines nouvelles conditions et restrictions.

La Commission Européenne a appuyé sa décision sur la base d'évaluations réalisées par l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) et l'Agence européenne des produits chimiques (ECHA), en collaboration avec les États membres de l'UE. Le processus d'évaluation a débuté en décembre 2019 avec le travail d'un groupe d'États membres - la France, la Hongrie, les Pays-Bas et la Suède, désignés comme États membres rapporteurs (et qui ont formé le groupe d'évaluation sur le glyphosate (AGG)).

« L'évaluation réalisée par l'EFSA concernant l'impact du glyphosate sur la santé des êtres humains, des animaux et de l'environnement n'a pas identifié de domaines critiques de préoccupation susceptibles d'empêcher le renouvellement de l'approbation », a conclu la Commission Européenne.

Pour les associations foodwatch et Générations futures, le dossier d’évaluation de l’herbicide comportait toutefois « de très nombreux biais (non-prise en compte d’études universitaires, non-évaluation de certains effets sur la biodiversité, non-prise en comptes de certains effets sanitaires avérés, etc.) » et cette décision « va à nouveau à l'encontre du principe de précaution alors que les preuves de la dangerosité du glyphosate pour l’homme et pour l’environnement continuent de s’accumuler ».

Les États membres restent libres de choisir d’utiliser ou non le glyphosate

Quelle est la conséquence de cette décision européenne pour les Etats membres et notamment la France ? « Les États membres restent responsables de l'autorisation nationale des produits phytopharmaceutiques (PPP) contenant du glyphosate », explique la Commission Européenne.

« Après le renouvellement de l'approbation, toutes les autorisations nationales doivent être réexaminées et, à la lumière des conditions et des restrictions fixées dans le renouvellement de l'approbation, les États membres peuvent restreindre leur utilisation au niveau national ou régional s'ils le jugent nécessaire sur la base des résultats des évaluations des risques, en particulier en tenant compte de la nécessité de protéger la biodiversité », précise la CE.

Reste que mercredi, le ministre de l’agriculture, Marc Fesneau, a indiqué sur Franceinfo qu’une interdiction totale de l’herbicide n’était « pas possible » à l’heure actuelle faute de solution de rechange pour les agriculteurs. « On a constaté qu'il n'y avait pas d'alternative aujourd'hui », a-t-il expliqué. La France devrait donc continuer à utiliser l’herbicide.

Des conditions et des restrictions d'utilisation

Dans le cadre de sa proposition de renouvellement de l'approbation du glyphosate, la Commission a inclus plusieurs nouvelles conditions, parmi lesquelles :

  • l'interdiction de l'utilisation comme dessiccant (épandage pour sécher une culture avant la récolte).

  • la fixation de limites maximales à 5 impuretés dans le glyphosate (c'est-à-dire dans le matériel fabriqué). Ces limites sont fixées de manière à garantir une protection totale de l'homme et de l'environnement.

  • l'obligation pour les États membres d'accorder une attention particulière à des aspects spécifiques lors de l'évaluation des risques (par exemple, la protection des petits mammifères herbivores, tels que les campagnols, et des plantes non ciblées, telles que les fleurs sauvages) et de définir des mesures d'atténuation des risques afin de garantir la protection des organismes non ciblés et de l'environnement.

  • la fixation de doses d'application maximales à ne pas dépasser, à moins que les résultats de l'évaluation des risques entreprise pour les utilisations spécifiques pour lesquelles l'autorisation est demandée ne démontrent qu'une dose plus élevée n'entraîne pas d'effets inacceptables sur les petits mammifères herbivores.

  • l'obligation pour le demandeur de soumettre des informations sur les éventuelles incidences indirectes sur la biodiversité dans un délai de trois ans à compter de la mise à disposition d'un document d'orientation approprié. La Commission demandera à l'EFSA d'élaborer les orientations nécessaires.

Cette décision pourrait-elle être réexaminée si de nouvelles preuves scientifiques remettaient en cause la sécurité du glyphosate ? 

A cette question, la Commission Européenne a répondu « qu’une évaluation massive a été réalisée dans le cadre de la décision de renouvellement, ce qui fait du glyphosate probablement la substance active la plus étudiée au monde ».

Elle a toutefois ajouté que « si de nouvelles preuves apparaissent et montrent que les critères d'approbation ne sont pas respectés, la Commission prendra immédiatement des mesures pour modifier ou retirer l'approbation si cela est justifié d'un point de vue scientifique ».

 

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