Atlante-1 : résultats prometteurs pour un vaccin thérapeutique dans le cancer du poumon

Aude Lecrubier

Auteurs et déclarations

13 septembre 2023

Singapour – Une nouvelle fois en quelques mois des résultats encourageants viennent d’être rapportés avec un vaccin thérapeutique contre le cancer. Après le mélanome, le pancréas, les cancers ORL ou ano-génital HPV induit, à des stades précoces, c’est dans le cancer du poumon non à petites cellules avancé en deuxième ou en troisième ligne de traitement que l’essai de phase 3 Atalante-1 montre l’intérêt du vaccin Tedopi® (OSE2101) de la société nantaise OSE Immunotherapeutics. Il devient ainsi le vaccin thérapeutique contre le cancer le plus avancé dans son développement.

Les données d’Atlante-1 ont été présentées lors du grand congrès mondial du cancer du poumon (WCLC) et publiées simultanément dans les Annals of Oncology .

 

Le vaccin Tedopi® est composé de néo-épitopes tumoraux de synthèse (fragments de peptides) ciblant 5 antigènes tumoraux permettant l'activation des lymphocytes T spécifiques de la tumeur chez des patients HLA-A2 positifs. Dans 95 % des cas, les tumeurs expriment au moins un de ces cinq antigènes. Intégrer ces cinq antigènes a donc pour objectif d’éviter les phénomènes d’échappement. La technologie utilise le système dit « HLA », une des clés de la présentation d’antigènes aux lymphocytes T. Le vaccin est efficace chez les patients exprimant le gène HLA-A2, présent dans environ la moitié de la population qui peut être sélectionnée grâce à ce biomarqueur HLA-A2 identifié à partir d’une prise de sang.

 

Le protocole de l’étude

Dans Atalante-1, les participants atteints de cancer bronchique non à petites cellules, localement avancé (non opérable et non éligible à la radiothérapie) ou métastatique sans altération des gènes EGFR et ALK étaient en échec d’une immunothérapie. Ils avaient un phénotype HLA-A2, déterminé par prise de sang, pour savoir si leur système immunitaire était capable de répondre au vaccin.

219 patients ont été randomisés (2:1) entre un bras vaccin et un bras standard qui consistait en une chimiothérapie (à 80 % du docétaxel).

Le vaccin était injecté en sous cutané toutes les 3 semaines 6 fois, puis toutes les 6 semaines jusqu’à un an puis à 12 semaines.

Le critère principal de l’étude était la survie globale.

Un bénéfice lié à la réponse positive à l’immunothérapie antérieure

Il était prévu d’inclure 363 patients dans le protocole mais l’étude n’est pas allée au terme de son recrutement en raison de l’épidémie de Covid-19. L’étude a donc été arrêté après l’inclusion de 219 patients.

« Elle n’a donc pas la puissance voulu mais elle a permis de comprendre que ceux qui tiraient le plus de bénéfice du vaccin étaient les patients qui avaient répondu à l’immunothérapie auparavant. Ces patients sont appelés des « progresseurs secondaires », a expliqué le Pr Benjamin Besse, directeur de la recherche clinique à l'Institut Gustave-Roussy et investigateur principal de l’étude, au cours d’une conférence de presse organisée par le laboratoire [1].

Globalement, les résultats n’étaient pas significatifs. Mais, les résultats portant uniquement sur les patients ayant bénéficié préalablement d’une immunothérapie pendant au moins 3 mois, soit 118 sur les 219 (54 %) patients se sont révélés positifs.

Chez ces progresseurs secondaires [à l’immunothérapie], la médiane de survie était de 11,1 mois avec Tedopi® contre 7,5 mois avec docetaxel.

Ainsi pour ces patients, le risque de décès a été diminué de 41% avec le vaccin par rapport à la chimiothérapie. Au total, 44 % des patients vivaient encore un an après le début de Tedopi® contre seulement 27,5 % avec le docetaxel.

« Cette étude montre un signal positif sur la survie globale dans une population sélectionnée. Dans cette étude sur 219 patients, on s’est rendu compte que seule la moitié des patients tirait un réel bénéfice du vaccin, ceux qui avaient répondu à l’immunothérapie auparavant », a conclu le Pr Besse avant d’ajouter : « L’étude doit faire l’objet d’une confirmation par une nouvelle étude de phase 3, plus large, chez plus de 300 patients en progression secondaire de l’immunothérapie pour avoir la puissance statistique qui permettra de convaincre les agences de régulation. ».

Cette étude montre un signal positif sur la survie globale dans une population sélectionnée. Pr Besse

Tolérance : le vaccin fait mieux que la chimiothérapie

Trois fois moins d’effets secondaires significatifs ont été rapportés avec le vaccin qu’avec la chimiothérapie : 11,4 % avec Tedopi®, 35,1 % avec le docetaxel.

Aussi, le vaccin a permis de maintenir une meilleure qualité de vie des patients. Les scores au questionnaire QLQ-C30 qui explore plusieurs domaines de la vie quotidienne étaient meilleurs avec le vaccin. Enfin, l’altération de l’état général des patients a été retardé chez ceux qui recevaient le vaccin : 3,3 mois dans le bras chimiothérapie versus 9 mois dans le bras vaccin.

« Le vaccin a été bien toléré. Il apporte un bénéfice en termes de contrôle des symptômes de la maladie et il induit peu d’effets secondaires alors que la chimiothérapie par docétaxel est plus toxique et peu contribuer à altérer l’état général. Elle est alopéciante chez quasiment 100 % des patients, elle induit des neuropathies, fait gonfler les doigts et les mains, abîme les ongles, est associée à des nausées et des vomissements... », a précisé le Pr Besse qui ajoute qu’après l’essai, chez les patients qui ont arrêté le vaccin ou la chimiothérapie (soit pour toxicité soit pour progression de leur cancer), ceux qui avaient reçu le vaccin ont mieux répondu à la chimiothérapie suivante « parce qu’ils étaient en meilleur état général ».

Développement clinique : dans les cancers de l’ovaire et du pancréas aussi

Le développement clinique de Tedopi® se poursuit actuellement avec trois essais.

Dans le cancer bronchique prétraité, une étude est en cours qui compare le vaccin Tedopi® plus docétaxel versus Tedopi® plus nivolumab (immunothérapie qui n’est pas utilisée en première ligne) pour évaluer si ces associations thérapeutiques peuvent potentialiser leurs effets.

Une autre étude est en cours de recrutement dans le cancer de l’ovaire. Elle vise à évaluer le vaccin seul ou en combinaison avec le pembrolizumab chez des patientes atteintes d’un cancer de l’ovaire sensible aux platines.

Des résultats sont attendus pour ces deux essais pour 2025.

Le troisième essai consiste à évaluer dans le cancer du pancréas, le FOLFIRI en maintenance ou le FOLFIRI en maintenance plus Tedopi® pour tenter d’améliorer le contrôle de la maladie. Des données d’efficacité sont attendues pour l’année prochaine.

À noter que le laboratoire travaille en parallèle sur un biomarqueur compagnon, le test HLA-A2.

L’étude doit faire l’objet d’une confirmation par une nouvelle étude de phase 3, plus large, chez plus de 300 patients en progression secondaire de l’immunothérapie. Pr Besse

 

L’étude a été financée par OSE Immunotherapeutics.
Le Pr Benjamin Besse a des liens d’intérêt avec Abbvie, Amgen, AstraZeneca, Chugai pharmaceutical, Daiichi-Sankyo, Ellipse pharma, EISAI, Genmab, Genzyme Corporation, Hedera Dx, Inivata, IPSEN, Janssen, MSD, Pharmamar, Roche-Genentech, Sanofi, Socar research, Taiho Oncology, Turning Point Therapeutics.

 

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