Voyages dans l’espace : quels risques psychologiques ?

Agnès Lara

Auteurs et déclarations

6 septembre 2023

France — Les vols spatiaux peuvent exposer les voyageurs à des expériences éprouvantes sur le plan émotionnel : isolement social, confinement, conflits interpersonnels, perturbation des rythmes de sommeil…

Le risque de troubles psychologiques est plus important et il est associé à la survenue de maladies neurologiques à plus long terme.

La mise en place de stratégies d’adaptation aidant à mieux réagir face au stress psychologique peut contribuer la salutogenèse (développement personnel, capacité de résilience), de même que la sélection des participants à ces vols [1].

Pourquoi est-ce important ?

L’isolement, le confinement, l’éloignement de la famille sur de longues périodes sont des facteurs de stress auxquels sont et seront soumis les voyageurs de l’espace (3 années seront nécessaires pour aller sur Mars). Dans cet environnement extrême, les marqueurs de temps habituels sont absents, ce qui peut perturber les cycles circadiens. Un véritable défi, tant sur le plan physique que psychologique. Une revue de la littérature s’est intéressée aux conséquences sur le psychisme.

Un environnement plus favorable à la survenue de tensions voire de troubles psychiatriques

Des études ont été menées à l’occasion de missions dans l’Antarctique, y compris l’hiver qui représente des conditions parmi les plus difficiles sur Terre. Une augmentation du niveau de stress associé à une activation de l’axe hypothalamo-hypophysaire a pu être observée. Cela s’est traduit par des céphalées, des troubles du sommeil, des baisses de l’humeur, de l’anxiété et des tensions interpersonnelles entre les membres de l’équipe. Des dépressions saisonnières sont même apparues chez un petit nombre de sujets.

Des difficultés d’adaptation à l’environnement peuvent favoriser la survenue de troubles psychiatriques. Si c’est rarement le cas chez les astronautes aujourd’hui en raison du tri drastique et de la préparation intense réservée aux candidats potentiels, il en sera autrement lorsque les vols spatiaux s’adresseront à une plus large population.

Des conditions qui peuvent aussi favoriser la résilience face au stress

L’entraînement et les apprentissages qui précèdent le vol, ainsi que les conditions médicales nécessaires pour y participer ont un effet neuroprotecteur et réduisent le risque de déclin cognitif. Par ailleurs, les mesures prises pour résister aux facteurs de stress durant le vol favorisent aussi un développement personnel. Le fait de traverser et de vaincre des difficultés renforce les ressources personnelles et favorise les capacités de résilience face au stress à plus long terme. Il a été notamment montré que l’exposition à des environnements isolés et dangereux (expéditions polaires, sous-marins, vols spatiaux, combats) améliorait la conscience et la compréhension de soi, la force intérieure, ainsi que le point de vue porté et l’appréciation générale de la vie. Cette salutogenèse s’appuie en particulier sur les liens créés au sein de l’équipe et l’importance accordée au travail réalisé ensemble, ainsi que sur des mesures préventives de gestion du stress facilitant l’adaptation et aidant aussi à mettre du sens une fois l’épreuve passée.

La mise en place de routines de prévention avant, pendant et après le vol

L’entraînement des astronautes avant le départ, l’exigence d’une bonne forme physique et mentale, d’un niveau d’éducation élevé, ainsi que les stimulations intellectuelles liées à la préparation augmentent la plasticité cérébrale, limitent le risque de maladie neurologique et ralentissent le déclin cognitif. Une bonne santé cardiorespiratoire a également un effet protecteur. Aussi, pour les voyages de longue durée ouverts à un plus large public, la mise en place de routines avant, pendant et après le vol pourront s’inspirer de ce qui est fait pour les astronautes. Elles auront pour vocation d’entretenir la santé, de faciliter les interactions entre personnes d’horizons culturels différents et d’aider à surmonter les difficultés psychologiques liées à l’isolement et au confinement, celles-ci pouvant être le prodrome d’une maladie neurologique sous-jacente en développement. La nécessité d’une sélection des participants à ces vols, à partir de facteurs de risque individuels identifiés, apparaît comme un préalable.

 

Cet article a initialement été publié sur Univadis.fr, membre du réseau Medscape.

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