France — Comment se sentent les jeunes adultes atteints de maladies cardiaques ? Comment leurs proches font-ils face ? Ces questions ont fait l’objet de la thèse que Jonathan Journiac, psychologue de la santé, a soutenu fin 2021 lorsqu’il travaillait à l’hôpital de la Pitié Salpêtrière [1].
Lors de La grande journée du cœur qui s’est déroulée le 13 juin 2023 à Paris [2], il est revenu sur les principaux résultats de ses recherches et a souligné l’importance de ne pas négliger cette population entre deux-âges (18-45 ans) et leurs aidants.
Pourquoi s’intéresser à ces deux populations en particulier?
« Dans la littérature scientifique en cardiologie, on parle souvent des personnes plus âgées, à la retraite ou proche de la retraite ou des personnes plus jeunes, les mineurs, les enfants, les adolescents qui ont une pathologie congénitale. Entre les deux, il y avait un vide avec très peu d’études sur les jeunes adultes alors qu’ils peuvent représenter jusqu’à 20 % des hospitalisations », a souligné Jonathan Journiac avant d’ajouter : « Aussi, on sait que la maladie ne touche pas que le patient mais qu’elle a un impact sur son entourage. Donc, à chaque fois que j’ai rencontré un patient pour lui présenter l’étude, je lui ai demandé de désigner un proche comme étant particulièrement soutenant. C’est ainsi que j’ai recruté 136 patients qui ont désigné 48 proches. Ces proches étaient la plupart du temps leur partenaire amoureux mais parfois aussi un membre de la famille ou un ami ».
Une étude transversale sur 123 patients et aidants répondeurs
Dans l’étude, le premier objectif était « d'investiguer les facteurs associés à la santé mentale, l'observance thérapeutique, la consommation de sel des jeunes vivant avec une pathologie cardiaque en s'intéressant plus particulièrement à leurs caractéristiques sociodémographiques et médicales, leurs représentations de la maladie et leurs stratégies de coping.
Le second objectif consistait à explorer cette question avec une approche dyadique, en s'intéressant aux patient-e-s et à leurs proches.
Pour cela, tous les participants ont pris part à un entretien de recherche explorant les données sociodémographiques, comportements de santé, stress post-traumatique.
Aussi, 123 patients et proches ont répondu à des questionnaires auto-administrés concernant leurs représentations de la maladie, stratégies de coping, santé mentale (anxiété, dépression, stress post-traumatique) et observance thérapeutique (médicaments, consommation de sel).
Il en ressort qu’il existe peu de différences psychosociales chez les jeunes et que les femmes sont plus anxieuses que les hommes.
Aussi, la consommation de sel était trop élevée pour un tiers des patients et ils avaient des difficultés à prendre leurs médicaments pour la moitié d’entre eux.
En ce qui concernait la santé mentale, elle était similaire pour les patients et les proches. Ils faisaient face aux même difficultés de santé mentale : la moitié des patients exprimaient des symptômes anxieux, 20% exprimaient des symptômes dépressifs et un quart des patients qui manifestaient un potentiel traumatisme psychologique du à la maladie cardiaque.
A noter que plus les participants faisaient appel à des stratégies de coping centrées sur l'évitement, moins bonne était leur santé mentale et moins bonne était leur observance.
« Ces résultats soulignent les problématiques d’observance et de santé mentale des jeunes avec une maladie cardiaque chronique et celles de leurs proches. Si on compare avec des populations plus âgées, le suivi des recommandations médicales est relativement similaire chez ces jeunes. En revanche, la santé mentale est a priori moins bonne pour ces jeunes adultes que pour les autres », a conclu Jonathan Journiac qui a insisté sur l’importance de repérer les signes qui doivent alerter les cardiologues : « tout ce qui est manifestation anxieuse, dépressive, un changement de comportement décrit par la personne, des pensées négatives, une forme de pessimisme ».
Pour les aidants, il a insisté sur la nécessité de prendre du temps pour soi. « Le problème est que l’on peut s’oublier soi-même : pour que la personne aille bien, il faut que vous alliez bien ».
Au niveau clinique, « si les prises en charge de la santé mentale des patient-e-s et des proches peuvent avoir lieu à travers des entretiens individuels, des interventions systémiques* permettraient probablement de prendre en compte la détresse des proches et d'améliorer les comportements de santé des patient-e-s », lit-on dans la conclusion de la thèse.
*Thérapies qui considèrent que « l'individu fait partie d'un système, voire de plusieurs systèmes. Et qu'il est influencé dans sa façon d'être, aussi bien par lui-même que par les autres et son environnement ».
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Crédit image de Une : Dreamstime
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Citer cet article: Qu’en est-il de la santé mentale des jeunes adultes atteints de maladies cardiaques et de celle de leurs proches ? - Medscape - 12 juil 2023.
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