Paris – Le ministre de la Santé François Braun a précisé, lundi, les modalités de la réforme sur la quatrième année du diplôme d'études spécialisées (DES) de médecine générale – une mesure très contestée. L’une des annonces phare est que les internes pourraient toucher 20% des rémunérations des actes réalisés durant leur 4e année en autonomie supervisée.
Les principaux messages du ministre sont commentés par Raphaël Presneau, président de l'Isnar-IMG, joint par Medscape.
Un timing choquant
Sans que personne ne s'y attende, François Braun a officialisé le lancement de la quatrième année dans le DES de médecine générale, ce 13 juin. « Les épreuves classantes nationales débuteront le 19 juin prochain. Le ministre de la Santé et de la Prévention a souhaité pouvoir communiquer en amont les paramètres de mise en œuvre de cette réforme pour que les étudiants abordent ces examens en pleine connaissance et puissent choisir avec confiance et détermination la spécialité de médecine générale », s'est justifié le ministère de la santé, dans un communiqué.
Un timing jugé « choquant » par Raphaël Presneau, président de l'Isnar-IMG. « On nous avait promis de nous dévoiler le rapport sur la mise en place de la 4e année, au cours du premier semestre 2023, et nous n'en avons pris connaissance qu'à une semaine des ECN (épreuves classantes nationales). De nombreux étudiants ont été stressés par cette annonce, c'est réellement un manque de respect du ministère de la Santé pour ses étudiants ».
Sur la base d’un rapport
« Jusqu’à maintenant, la médecine générale était la seule spécialité médicale à n’avoir que trois années d’internat. Cette absence de phase de consolidation était considérée comme une faiblesse, qui ne favorise pas une installation immédiate en sortie de cursus », a justifié le ministère de la Santé qui, pour déterminer les conditions de mise en place de cette quatrième année, s'est appuyé sur le rapport de quatre experts – la Pre Nanou Bach-Nga Pham, doyenne de la Faculté de médecine de Reims et ancienne vice-présidente de la Conférence des doyens de médecine, le Pr Stéphane Oustric, président du Conseil de l’ordre des médecins de Haute-Garonne, le Pr Olivier Saint-Lary, président du Collège National des Généralistes Enseignants et Mathilde Renker, interne en médecine générale – également remis ce 13 juin. Ce rapport, intitulé « Ajout d’une quatrième année au Diplôme d’études spécialisées (DES) de Médecine Générale », avait été commandé par Sylvie Retailleau, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche et François Braun, le 22 septembre dernier.
25 recommandations et 5 objectifs
Dans leur rapport, les experts ont émis 25 recommandations, regroupés autour de cinq objectifs :
« 1. Améliorer la qualité de la formation des futurs médecins généralistes ;
2. Donner à la quatrième année un caractère professionnalisant à travers un statut adapté de docteur junior de médecine générale ;
3. Inciter les futurs praticiens, sans les contraindre, à découvrir le territoire ;
4. Renforcer l’encadrement de la formation en médecine générale selon un plan médecine générale pluri-annuel ;
5. Rendre le territoire attractif avec de vraies mesures d’accompagnement. »
Meilleure rémunération
De ces recommandations, François Braun en a retenu les principales, dont la réforme de la phase d'approfondissement : les stages de pédiatrie et de gynécologie seront couplés lors du premier semestre, permettant ainsi aux étudiants d'entamer un stage libre lors du second semestre, « correspondant au projet professionnel et fléché sur des thématiques prioritaires : santé de la personne âgée, santé mentale, santé de l’enfant et santé de la femme ».
Quant à la 4e année de médecine (phase de consolidation), qui permettra d'accorder le statut de docteur junior aux internes en médecine générale, elle sera mieux rémunérée dans l’idée de constituer « un choc d’attractivité mais également de correspondre à une année de formation pensée pour être une véritable année de pré-installation ». De fait, « en plus de la rémunération classique d’un docteur junior, les internes de médecine générale percevront 20% des rémunérations des actes réalisés durant leur 4e année en autonomie supervisée (avec un plancher de 10 consultations et un plafond de 30 consultations par jour). Cette rémunération basée sur un paiement à l’acte a aussi pour ambition de favoriser l’installation en libéral des étudiants après l’obtention de leur diplôme. »
Raphaël Presneau reconnait que cette rémunération est « historique » et ajoute que « le ministère acte le fait que des internes toucheront en partie les actes qu'ils réaliseront ». Il tempère néanmoins l’enthousiasme lié aux sommes annoncées : « on évoque un salaire mensuel de 4500 euros, mais c'est un plafond. La rémunération moyenne sera très certainement de 3000 euros. Cela reste malgré tout une revalorisation intéressante par comparaison à une dernière année d'internat, mais inférieure à une année de remplacement ».
Zone sous-dense
En plus de cette rémunération à l'acte, le gouvernement compte aussi attribuer une indemnité pour les internes qui exerceront en zone sous-dense. Par ailleurs, « sur le même principe que les docteurs juniors à l’hôpital, les internes de médecine générale en 4e année participeront tous à la permanence des soins ambulatoire, partie intégrante de leur futur exercice et élément essentiel pour répondre aux attentes des Français. Ils pourront à tout moment solliciter un médecin généraliste d’astreinte en cas de question durant leur garde », ajoute le ministère. Un point concernant l’encadrement qui interroge le président de l'Instar-IMG. « Aussi, ajoute-t-il, pourquoi 80% de la rémunération sera versée aux médecins superviseurs qui n'effectueront pas les actes ? »
Formation de MSU
Pour accompagner cette réforme d'ampleur, le ministre de la Santé a promis de former davantage de maitres de stage universitaires (MSU), à même d'encadrer ces docteurs juniors en médecine générale. Sur ce point, Raphaël Presneau reste dubitatif : « les mêmes promesses ont été faites par le ministre lors du congrès du congrès du Collège national des généralistes enseignants (CNGE) en décembre 2022. Résultat : des centaines de MSU en moins ont été comptés par rapport à l'an dernier. À Nanterre, ce semestre, ce sont 20 MSU qui n'ont pas pu être agréés car ils n'avaient pas suivi la formation de manière adéquate et à Amiens, il n'y a pas eu suffisamment de MSU pour faire le Saspas (Stage Ambulatoire en Soins Primaires en Autonomie Supervisée) de 6 mois, ils ne le font qu'en trois mois en ambulatoire et trois mois en hospitalier. »
Thèse
Autre récrimination de l'Isnar-IMG : le statut de docteur junior impose de finir sa thèse avant d'aborder cette dernière année. Néanmoins, pour les étudiants entrant en DES de médecine générale en 2023, 2024, et 2025, les experts ont suggéré d'accorder « une disposition transitoire permettant la soutenance de thèse jusqu'à la fin de la phase de consolidation ». « Ce n'est pas assez, peste Raphaël Presneau. Nous souhaitons conserver les dispositions actuelles, qui nous permettent de passer notre thèse jusqu'à six ans après la fin de l'internat. » Reste que les textes réglementaires n'ont pas encore été publiés, et que de derniers ajustements, après concertation avec les syndicats d'internes, sont toujours possibles.
Suivez Medscape en français sur Twitter.
Suivez theheart.org | Medscape Cardiologie sur Twitter.
Inscrivez-vous aux newsletters de Medscape : sélectionnez vos choix
Crédit de photo de Une : Dreamstime
Actualités Medscape © 2023
Citer cet article: François Braun précise les modalités de la 4ème année de médecine générale - Medscape - 16 juin 2023.
Commenter