France — L'Insee vient de publier une étude explosive, à bien des égards : la surmortalité a été plus forte en 2022 (+8,7%), qu'en 2021 (6,9%) mais surtout qu'en 2020 (+7,8%), année où la pandémie de Covid a été la plus meurtrière. En 2022, il y a eu 675 000 décès, soit 53 800 décès de plus qu'attendus.
Ces données sont surprenantes, sachant que l'année 2022 a été marquée par un reflux de la pandémie de Covid-19 mais peuvent s’expliquer en partie par différents facteurs.
« L’écart entre les décès observés et ceux attendus mesure à la fois les effets directs et indirects de l’épidémie de Covid-19, mais aussi les effets d’autres phénomènes inhabituels propres à l’année 2022, comme des épisodes de grippe ou de fortes chaleurs plus ou moins meurtriers que par le passé », renseignent les auteurs de cette étude.
Aussi, ajoute Sylvie Le Minez responsable de l’unité des études démographiques et sociales de l'Insee, « dans l'étude que nous avons produite sur la surmortalité, nous prenons l'hypothèse que la mortalité en 2022 a continué à diminuer en suivant la tendance que nous avons constaté entre 2010 et 2019 ».
Quelles sont les causes probables de ces décès ?
Elles sont multiples. Première d'entre elles : il est fort possible que la tendance à la baisse de la mortalité sur toutes les classes d'âge, observée ces 10 dernières années, soit stoppée. Ce qui expliquerait ce surplus de mortalité, de manière mécanique.
Autre cause : si la pandémie de Covid n'a pas été de manière directe aussi meurtrière en 2022 qu'en 2020, il est fort possible que cette pandémie ait produit des effets indirects qui seraient à l'origine de cette surmortalité : « L’écart entre les décès observés et attendus peut être accru par des décès indirectement causés par la Covid-19 (à la suite de reports de soins, de la baisse des dépistages, etc.) ».
Surmortalité importante en juillet et décembre 2022
Autres causes possibles : les épidémies de grippe et les épisodes de canicule de l'année 2022. Car lorsque l'on se penche sur le détail des données, l'on s'aperçoit que la surmortalité a été, comparée à l'année 2021, plus importante sur les mois de juillet (13% en juillet 2022 vs 1% en juillet 2021) et décembre (25% en décembre 2022 contre 15% en décembre 2021).
« Le pic de décembre 2022 (25 %) est le troisième pic le plus élevé de surmortalité sur toute la période de 2020 à 2022, après ceux constatés lors des deux premières vagues de Covid-19 de 2020 (33 % en avril et 31 % en novembre) », ajoutent les auteurs de cette étude.
Pour le mois de décembre, la cause probable de cet excès de surmortalité est très probablement la grippe : « l’année 2022 a compté de manière inhabituelle deux épisodes de grippe : une première épidémie tardive en mars-avril, puis une seconde précoce en décembre, alors même que la grippe a été quasi absente en 2021 ».
Pour ce qui est de la surmortalité observée en juillet, les épisodes de canicule et de forte chaleur peuvent en être les causes : « Des épisodes de canicule ont occasionné davantage de décès en 2022 (2 800 toutes causes confondues) qu’en 2021 (200). Les températures élevées une grande partie de l’été ont pu aussi entraîner des décès en dehors des périodes de canicule. »
Surmortalité des moins de 15 ans
Reste que l'Insee n'éclaire pas, avec ces explications données quant à la surmortalité causée par la canicule ou la grippe, une donnée importante : la surmortalité en 2022 des moins de 15 ans.
« Les décès de personnes âgées de moins de 15 ans sont notamment plus nombreux qu’attendus en 2022 (+6 %), alors qu’ils étaient inférieurs en 2021 (-3 %) », analysent les statisticiens.
« Lorsque Santé Publique France prend en compte ces trois périodes de canicule de 2022, alors on constate qu'il n'y a pas de surmortalité pour les moins de 15 ans. Concernant l'épidémie de grippe, Santé publique France a sorti un bulletin préliminaire uniquement, où il est observé que la grippe a été meurtrière pour les 15 à 64 ans mais cela ne veut pas dire qu'elle n'est pas marquée pour les moins de 15 ans, mais nous n'avons pas les données sur cette tranche d'âge », explique Sylvie Le Minez, qui insiste aussi sur le faible nombre de personnes de moins de 15 ans décédées en 2022.
« Je tiens aussi à ajouter que nous avons constaté 4000 décès de personnes de moins de 15 ans, et nous estimons que la surmortalité concerne 240 enfants. Cette estimation est plus fragile que sur des classes d'âge plus âgées où nous avons des effectifs plus importants : par exemple pour les 75-84 ans le nombre de décès en 2022 est de 150 000. »
À noter que l'espérance de vie n'a pas été impactée par cette hausse de la mortalité en 2022 : « En 2020 l'espérance de vie a diminué à 85,1 ans. En 2021, l'espérance de vie est à 85,2 ans. En 2022 elle est à 85,2 ans et donc elle reste basse. En 2019 l'espérance de vie des femmes était à 85,6 ans », note Sylvie Le Minez.
Suivez Medscape en français sur Twitter.
Suivez theheart.org | Medscape Cardiologie sur Twitter.
Inscrivez-vous aux newsletters de Medscape : sélectionnez vos choix
Crédit de Une : Dreamstime
Actualités Medscape © 2023
Citer cet article: Pourquoi la surmortalité a-t-elle été aussi importante en 2022 ? - Medscape - 13 juin 2023.
Commenter