POINT DE VUE

ARN interférents : vers une vraie révolution dans le traitement de l’HTA et du risque cardiovasculaire

Pr Ph Gabriel Steg

Auteurs et déclarations

8 août 2023

France __ Bonjour. Aujourd’hui, je voudrais vous parler du traitement moderne de l’hypertension artérielle et de l’émergence de nouveaux traitements [ici de l’ARN interférent zilébésiran].

Malgré le fait que nous disposions d’un arsenal très vaste de médicaments antihypertenseurs, le traitement de l’hypertension artérielle recule ou plus exactement, le nombre d’hypertendus dans le monde augmente régulièrement. Il y a plusieurs explications à cela.

Augmentation des hypertendus dans le monde

La première étant l’augmentation du nombre de patients hypertendus dans les pays émergents, la deuxième, est le fait qu’il y a toujours des déficiences importantes dans le diagnostic et la prise en charge de l’hypertension artérielle, avec une proportion importante de patients hypertendus qui ne sont pas diagnostiqués, parmi ceux qui sont diagnostiqués, une proportion importante de patients qui ne sont pas traités et parmi ceux qui sont traités, seule environ la moitié sont correctement traités avec une normalisation des chiffres, de telle sorte qu’on estime que même dans les pays industrialisés, 25 % des hypertendus sont véritablement contrôlés.

Bien qu’on ait, d’une certaine façon, beaucoup de médicaments à disposition, le traitement de l’hypertension n’est pas satisfaisant. Une des causes des difficultés de traitement de l’hypertension est que dans la mesure où l’hypertension est asymptomatique, les bénéfices du traitement ne sont pas immédiatement perceptibles pour les patients – il s’agit d’un traitement préventif – et, dans ces conditions, l’adhérence reste médiocre.

Un nouveau antihypertenseur : le siRNA

De façon concordante, beaucoup d’études sur l’adhérence au traitement antihypertenseur ont montré que celle-ci n’est pas satisfaisante. Une étude publiée le 19 juillet dans le New England Journal of Medicine , particulièrement intéressante à cet égard, teste un nouveau type de médicament antihypertenseur. Il s’agit d’un ARN interférent – un siRNA – qui est dirigé contre l’angiotensinogène, c’est-à-dire la molécule qui est le précurseur de l’angiotensine, elle-même précurseur de l’angiotensine 2 et, donc, qui débute la cascade de l’angiotensine vers l’angiotensine 2. Il s’agit ici d’un médicament qui est ciblé vers le foie, la production hépatique de l’angiotensinogène, qui est l’endroit électif de cette production.

Cette étude de phase 1 a testé plusieurs doses ascendantes de ce médicament qui porte le nom « barbare » de zilébésiran, puisque c’est un siRNA à dose ascendante.

Ce qui a alors été observé est que l’on obtient une baisse de la pression artérielle qui est dose-dépendante, mais, surtout, qui est particulièrement soutenue jusqu’à 24 semaines de baisse de pression artérielle, permettant d’imaginer un traitement semestriel de l’hypertension par une injection sous-cutanée.

Ce médicament devant s’administrer par voie injectable sous-cutanée.

On obtient une baisse de la pression artérielle qui est dose-dépendante, mais, surtout, qui est particulièrement soutenue jusqu’à 24 semaines de baisse de pression artérielle.

 

L’autre élément important, est que la tolérance semble avoir été très bonne, avec quelques réactions mineures au point de ponction, et que l’effet du traitement est, dans une certaine mesure, contrebalancé par un régime riche en sel.

Évidemment, cela est un élément important de sécurité pour pouvoir, en quelque sorte, antagoniser l’effet hypotenseur, si le besoin se présente, pour un traitement qui a une longue durée d’action par une charge sodée.

L’effet du traitement est, dans une certaine mesure, contrebalancé par un régime riche en sel.

 

De la même façon, a contrario, l’effet du traitement est potentialisé par la coadministration d’un antagoniste des récepteurs à l’angiotensine comme l’irbesartan.

Un duo siRNA contre l’hypertension et le cholestérol ?

Il s’agit évidemment de résultats très préliminaires, peu importe la molécule, mais ce qui est intéressant est le fait que ça ouvre la voie à un traitement injectable semestriel de l’hypertension artérielle.

L’on pourrait imaginer appliquer le même type de stratégie à d’autres facteurs de risques – il existe déjà des siRNA qui ciblent le LDL-cholestérol. Il se peut alors qu’on puisse voir un siRNA en duo qui inhibent à la fois le cholestérol plasmatique et l’hypertension artérielle.

On pourrait alors avoir des traitements préventifs administrés une fois tous les 6 mois, voire de façon encore plus espacée. Ce qui aurait l’énorme avantage de permettre une adhérence bien meilleure, évidemment, pour des traitements qui sont des traitements préventifs dont les bénéfices ne sont pas immédiatement perceptibles par les patients.

On pourrait alors avoir des traitements préventifs administrés une fois tous les 6 mois, voire de façon encore plus espacée.

 

En outre, les coûts de production des siRNA sont moindres que ceux des anticorps monoclonaux qui sont traditionnellement utilisés pour aller inhiber de façon spécifique des voies biologiques.

Nous avons alors aussi les perspectives d’avoir des traitements qui, à terme, puissent être à la fois prolongés, bien tolérés et ciblés vers la production hépatique des cibles pharmacologiques et relativement moins coûteux que des traitements existants.

Il se peut également qu’ils soient comparables au coût des traitements conventionnels administrés en comprimés de façon quotidienne.

À mon sens, cette étude est une des études qui ouvre la voie à une vraie révolution dans le traitement de l’hypertension artérielle et le traitement, d’une façon générale, du risque cardiovasculaire. Je vous engage vivement à aller lire l’essai en question et l’éditorial qui l’accompagne, qui détaille bien les différents types de stratégies d’interférence biologique avec la voie de l’angiotensinogène et pourquoi ceci pourrait être un progrès dans le traitement de l’hypertension artérielle.

Bonne lecture, bon été et à bientôt.

À mon sens, cette étude est une des études qui ouvre la voie à une vraie révolution dans le traitement de l’hypertension artérielle et le traitement, d’une façon générale, du risque cardiovasculaire.

 

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