France – Le moteur de recherche français PulseLife, ex 360 medics, peut-il concurrencer Google en matière d’informations santé à destination des professionnels de santé ? Y-a-t-il, par ailleurs, d’autres applications santé utilisant l’intelligence artificielle ? Nous avons posé la question à des experts.
Du moteur de recherche au hub numérique

Dr Grégoire Pigné
Créé en 2014 par le Dr Grégoire Pigné, accompagné de Clotilde Petit et Romain Bruckert, le moteur de recherche médicamenteux 360 medics sort de sa chrysalide pour devenir PulseLife, « un assistant multifonctions dopé à l'IA », annonce le communiqué de presse de la société éponyme. De quoi s’agit-il ? D’un moteur de recherche médicamenteux reconnu dans le monde de la santé qui rêve de devenir un outil essentiel pour les soignants. Grâce à des innovations technologiques, l’ex 360 medics devenu PulseLife fin 2022 « répond désormais instantanément à toutes les questions médicales des soignants et leurs permettent de prendre des décisions cliniques éclairées », ajoute ledit communiqué.
En pratique, l'application PulseLife* comporte 5 onglets : actualité, médicaments, apps, fichiers, tâches. Les deux derniers onglets permettent de télécharger sur l'app ses propres fichiers et de mettre à jour son agenda et sa liste TODO. Grâce à un moteur de recherche, les trois premiers onglets permettent, pour une question portant sur un médicament ou sur une pathologie, de retrouver tous les documents de références et les applications en relation avec la question posée.
Fort d'une communauté revendiquée de quelque 600 000 professionnels de santé en Europe, principalement basés en France et en Espagne, PulseLife fonctionne aussi comme un hub qui accueille sur son espace numérique d'autres applications : « Nous avons par ailleurs plus de 200 applications et outils de santé qui sont disponibles sur PulseLife et il y en a de plus en plus. »
*Accessible gratuitement, PulseLife est disponible sur mobile, tablette et ordinateur, OS ou Android.
Moteur de recherche en santé
Concrètement, PulseLife est plus proche d'un moteur de recherche que d'un assistant du type ChatGPT. Ce que ne cache pas son fondateur, Grégoire Pigné, contacté par Medscape : eAujourd'hui nous sommes devenus un moteur de recherche médicale globale. Si par exemple vous voulez connaitre l'algorithme de prise en charte d'une angine, ou d'un cancer du sein, ou alors si vous voulez connaitre quand faire une scintigraphie osseuse pour un cancer de prostate généralisé, vous pouvez faire votre recherche sur Pulselife et trouver votre réponse dans des documents de référence. Actuellement notre grand concurrent, c'est Google. »
Dès lors que le modèle à concurrencer reste Google, comment l'intelligence artificielle intervient-elle dans PulseLife ? « L'IA est un outil très important car quand on a beaucoup de contenus, il faut comprendre comment les utiliser et c'est à cela que nous sert un premier outil d'intelligence artificielle. Nous avons un autre outil d'intelligence artificielle qui nous permet de contextualiser la question que pose le médecin et nous avons un troisième outil qui permet de relier la question à la réponse.
Exemple concret : vous êtes un chirurgien gynécologue qui opère un cancer du sein, vous allez chercher la classification du cancer du sein, et si vous êtes radiothérapeute vous allez aussi chercher la classification du cancer du sein, mais vous êtes à des moments différents de la prise en charge et du coup vous n'avez pas besoin de la même réponse. Ces IA nous permettent d'apporter une réponse fiable, adaptée aux médecins, pour que le médecin soit capable de comprendre pourquoi il a ce résultat afin de prendre une véritable décision éclairée », explique Grégoire Pigné.
ChatGPT, un concurrent ?
Une question se pose : si ChatGPT n'est pas un modèle, est-ce néanmoins un concurrent pour PulseLife ? « Par rapport à ChatGPT notre solution est plus fiable. ChatGPT génère des discussions, et le soignant n'a pas forcément besoin d'une discussion. Qui plus est, ChatGPT est entrainé sur des données qui s'arrêtent en septembre 2021, ce sont donc des données non fiables. Ce n'est pas exploitable dans la pratique quotidienne. Nous utilisons les mêmes algorithmes que ChatGPT mais nous les utilisons pour générer de l'explicabilité : quand un médecin prend une décision, il doit savoir pourquoi il la prend, c'est que ce nous offrons au soignant », analyse Grégoire Pigné.
Écosystème
Outre Google et ChatGPT, PulseLife n'est pas la seule application IA sur le marché. Mathieu Morey, chercheur en informatique, a participé à l'organisation d'une sorte de hackaton lancé par la Haute autorité de santé (HAS) en septembre 2021. 360 médics y était présent, aux côtés d'autres startups. Pour lui, PulseLife n'est pas la seule solution sur le marché des IA en santé, au sens large du terme : « Il existe d'autres entreprises de l'écosystème : Posos, Synapse, Health4people. » Point commun de ces solutions : elles ont toutes été rendues possibles grâce aux avancées technologiques qui ont précédé ChatGPT, « notamment les modèles pré-entrainés de type BERT », explique Mathieu Morey.
Balbutiements
Quoi qu'il en soit, les solutions proposées jusqu'à maintenant sont à l'état de balbutiements, en matière d'application de l’intelligence artificielle selon le Dr Pascal Charbonnel, membre du jury de cet hackaton santé organisé par la HAS, et par ailleurs ancien vice-président du collège chargé du numérique du collège de médecine générale. « Les solutions proposées actuellement sont des solutions de mise en forme de données sur le médicament, entre autres. La difficulté, actuellement, est d'avoir des données fiables, validées, actualisées, qui permettent de s'appuyer afin de créer des systèmes experts... Pour le moment, en médecine ambulatoire tout du moins, nous en sommes encore aux balbutiements. La question, c'est la validité internationale des sources. Il est assez facile de trouver le médicament à utiliser en première intention pour la tension artérielle, il est plus difficile d'imaginer une solution qui vous dise que le patient est allergique à ce médicament ou ne le supporte pas pour toute autre raison, et vous suggère un autre médicament pour le remplacer. C'est là que se situe la valeur ajoutée. Les solutions que je connais s'appuient sur des systèmes experts dépendants qui n'ont pas la validité internationale recherchée », considère le Dr Charbonnel.
Transparence et indépendance
Autre problème soulevé par le Dr Charbonnel : la transparence faite sur les algorithmes utilisés : « comment donne-t-on des informations suffisamment fiables sur les algorithmes utilisés ? Ça c'est un vrai souci, à la fois pour ce qui concerne l'indépendance des sources, que pour la fiabilité de la solution. À mon avis, c'est le point essentiel. Pour avoir une bonne aide à la décision, il faut que la solution soit transparente, claire, indépendante de l'industrie, etc. » Et c'est là que le bât blesse, selon le Dr Charbonnel. Comme l'affirme Grégoire Pigné, « notre modèle économique s'appuie sur la communication santé, nous intégrons dans le moteur de recherche des espaces de communication santé qui sont réservés à l'ensemble de l'écosystème santé, les laboratoires, les institutions, etc. Ces contenus sont transparents, l'utilisateur sait si les contenus sont sponsorisés ou non. » Pour le Dr Charbonnel, ce modèle économique fait peser une suspicion sur l'indépendance des sources utilisées par PulseLife : « Le modèle économique de PulseLife est un vrai souci en soi. Ils ont beau dire que leurs deux secteurs d'activité, la publicité et l'aide à la prescription, sont étanches, on sait bien que ce n'est pas vrai. La règle du jeu actuellement pour de l'information sur les médicaments, c'est l'indépendance totale vis-à-vis de l'industrie. »
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Crédit de Une : Pulselife
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Citer cet article: Le moteur de recherche français PulseLife peut-il concurrencer Google ? - Medscape - 9 juin 2023.
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