La fièvre hémorragique de Crimée-Congo pourrait arriver en France

Aude Lecrubier

9 juin 2023

Maisons-Alfort, France — La tique Hyalomma, qui peut transmettre la fièvre hémorragique de Crimée-Congo, est installée dans le Sud de la France depuis des années et pourrait se propager en raison du dérèglement climatique, indique l’ANSES qui note que des cas sont rapportés chaque année en Espagne.

Dans une nouvelle expertise scientifique, l’Anses appelle à instaurer une surveillance de ces tiques à l’échelle nationale et à sensibiliser la population aux mesures de prévention.

Les tiques du genre Hyalomma font partie de la famille des tiques dures (Ixodidae). Il en existe 27 espèces sur l’ensemble du globe, hormis le continent américain et d’Océanie. Originaire d’Afrique et d’Asie et introduite principalement par les oiseaux migrateurs en provenance d’Afrique, la tique Hyalomma est présente depuis plusieurs décennies en Corse et depuis 2015 sur le littoral méditerranéen. Trois espèces de tiques du genre Hyalomma sont présentes en France.

Cette tique joue le rôle de vecteur pour de nombreux agents pathogènes. Elle transmet notamment le parasite responsable de la piroplasmose équine et le virus de la fièvre hémorragique de Crimée-Congo (FHCC). Chez l’humain, la fièvre de Crimée-Congo se limite généralement à un syndrome grippal avec troubles digestifs. Dans certains cas, elle peut néanmoins s’aggraver et se traduire par un syndrome hémorragique, dont le taux de létalité atteint 30 % dans certains pays.

 

Un risque lié au dérèglement climatique

Si aucun cas humain de contamination par le virus de la FHCC n’a encore été observé en France, une dizaine de cas humains autochtones de FHCC ont été rapportés en Espagne depuis 2013, dont certains ont provoqué le décès du malade. D’autre part, la circulation du virus est en recrudescence dans la région des Balkans et en Turquie.

Par ailleurs, en France, des anticorps spécifiques au virus de la FHCC ont été retrouvés chez des animaux domestiques et sauvages, laissant penser que ces animaux ont été exposés sur notre territoire.

« Le risque d’apparition de cas de FHCC en France est possible. Ce risque est d’autant plus probable que l’extension géographique de la zone d’implantation des tiques devrait être favorisée par les changements climatiques en cours. Les tiques Hyalomma aiment en effet les climats secs et les périodes chaudes », insiste l’ANSES.

En métropole, la probabilité d’introduction d’une tique du genre Hyalomma par des oiseaux migrateurs a été estimée comme très élevée (9 sur 9, selon l’échelle ordinale AFSSA 2008 allant de 0 à 9, avec une incertitude faible).

La probabilité d’introduction d’une tique du genre Hyalomma par les importations de bovins et de chevaux a été estimée comme peu élevée (6 sur 9, avec une incertitude moyenne).

La probabilité d’introduction d’une tique du genre Hyalomma par les importations de lagomorphes (gibier sauvage) a été estimée comme faible (5 sur 9, avec une incertitude élevée).

Enfin, la probabilité d’introduction d’une tique du genre Hyalomma par les déplacements humains a été considérée comme minime (2 sur 9, avec une incertitude moyenne).

Dans les territoires ultramarins, la probabilité d’introduction d’une tique du genre Hyalomma dans les départements français d’Amérique ou de l’Océan Indien est estimée comme quasi-nulle à minime (1 à 2 sur 9, avec une incertitude moyenne).

Organiser la surveillance des tiques à l’échelle nationale

Afin pouvoir de pouvoir adopter des mesures de prévention et de gestion des risques en fonction de l’évolution de la situation, l’Anses appelle à la mise en place d’une surveillance des tiques du genre Hyalomma à l’échelle nationale, en priorisant :

  • les zones géographiques identifiées comme les plus à risque,

  • le développement d’outils permettant de détecter précocement la présence de tiques Hyalomma et la circulation des agents pathogènes qu’elles transmettent, notamment du virus de la FHCC et de parasites comme Theileria.

 « Contrairement à ce qui existe pour les moustiques, aucun dispositif de surveillance national n’est organisé pour les tiques alors qu’elles transmettent des maladies graves comme la FHCC mais aussi la maladie de Lyme ou l’encéphalite à tiques. Pour se préparer au mieux à l’émergence potentielle du virus de la FHCC sur notre territoire, il est essentiel de renforcer la surveillance des tiques en France mais également de celles qui arriveraient en provenance de pays où le virus circule actuellement », indique Elsa Quillery, coordinatrice de l’expertise scientifique, dans un communiqué de l’agence.

L’agence propose notamment que le dispositif Citique, mis en place dans le cadre du plan de lutte contre les maladies vectorielles à tiques soit étendu aux tiques Hyalomma

L’ANSES appelle aussi à lancer des programmes de recherches sur les tiques Hyalomma et le virus de la FHCC mais aussi à développer de nouvelles molécules antivirales contre ce virus ainsi qu’un vaccin.

Mais, à ce stade, « en l’absence de vaccin contre la quasi-totalité des virus transmis par les tiques à l’exception du virus de l’encéphalite à tiques (TBEV), la réduction du risque infectieux consiste à sensibiliser les populations aux facteurs de risque de piqûre et à promouvoir les mesures individuelles de prévention », conclut l’agence.

 

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