Une thérapie ciblée divise la mortalité par deux dans certains cancers du poumon précoces

Aude Lecrubier

Auteurs et déclarations

6 juin 2023

Chicago, Etats-Unis – Une des annonces phares du congrès de l’ASCO 2023 a été sans conteste celle des résultats de l'étude de phase 3 ADAURA, dans le cancer du poumon.

Présentée en séance plénière[1], elle a montré que la thérapie ciblée osimertinib (Tagrisso®, AstraZeneca) a apporté une importante amélioration de la survie globale par rapport au placebo, dans le traitement adjuvant des patients atteints d'un cancer du poumon non à petites cellules (CPNPC) avec mutation EGFR à un stade précoce, après résection complète de la tumeur et chimiothérapie adjuvante si indiquée.

« Les gains en matière de survie sont saisissants », a commenté le Pr Jean-Yves Blay, président d'Unicancer et directeur général du Centre Léon Bérard (Lyon), lors d’un point presse.

Il s’agit de la première thérapie ciblée permettant d’atteindre un tel taux de survie dans le cancer du poumon avec mutation EGFR au stade précoce, 88 % des patients étant en vie à cinq ans dans l'essai ADAURA versus 78 % avec le placebo. La prise de l'osimertinib a entraîné une réduction de 51 % du risque de décès pour les patients traités par rapport au placebo.

« Réduire de moitié le risque de décès à cinq ans, c'est un résultat spectaculaire. Cela devrait changer les pratiques, et entraîner un besoin de tests systématiques de la mutation (EGFR) si ces résultats sont consolidés », a ajouté la Dre Muriel Dahan, directrice Recherche et développement d'Unicancer.

Réduire de moitié le risque de décès à cinq ans, c'est un résultat spectaculaire. Dre Muriel Dahan

 

Les patients atteints de cancers du poumon dits non à petites cellules avec mutation EGRF représentent environ 10 à 15% des cas en France et au total, environ 1000 patients pourraient donc bénéficier du traitement chaque année dans l’hexagone.

Ces résultats, publiés simultanément dans le NEJM[2],  confortent la stratégie thérapeutique déjà adoptée en France. Pour ce profil de patients, l'osimertinib bénéficie depuis 3 ans d'une autorisation temporaire d'utilisation (ATU) et d’un remboursement depuis le début de l'année 2022.

« Donner la thérapie ciblée tout de suite après la chirurgie et la chimiothérapie améliore la survie par rapport à attendre la rechute pour traiter avec ce même médicament. En terme de séquençage des traitements c'est très important. Cela veut dire qu'il vaut mieux prévenir que guérir », a commenté le Pr Nicolas Girard (pneumologue à l'Institut Curie, coordinateur de l'Institut du thorax Curie-Montsouris) lors d’une conférence de presse organisée par l’Institut Curie.

Détails de l’étude

Dans cet essai international réalisé en double aveugle, entre novembre 2015 et février 2019, 682 patients ont été randomisés pour recevoir un comprimé d'osimertinib (80 mg une fois par jour) ou un placebo jusqu'à récidive, arrêt du traitement ou la fin de l'essai (3 ans).

Le critère d'évaluation principal était la survie sans maladie chez les patients atteints d'une maladie de stade II à IIIA. Les critères d'évaluation secondaires comprenaient la survie sans maladie chez les patients atteints d'une maladie de stade IB à IIIA, la survie globale, et la sécurité.

Parmi les patients atteints d'une maladie de stade II à IIIA, la survie globale à 5 ans était de 85 % dans le groupe osimertinib et de 73 % dans le groupe placebo (P<0,001).

 

 

Dans la population globale (patients atteints d'une maladie de stade IB à IIIA), la survie globale à 5 ans était de 88 % dans le groupe osimertinib et de 78 % dans le groupe placebo (P<0,001).

Le bénéfice en termes de survie globale a été observé dans les différents sous-groupes, quel que soit le stade de la maladie (IB, II, IIIA) et recevant ou non une chimiothérapie adjuvante.

Le profil de sécurité de l'osimertinib en adjuvant était conforme à celui de l'analyse primaire. Aucun nouveau problème de sécurité n'a été signalé (à l’exception d’une pneumopathie liée au Covid-19 après clôture de l’essai et qui n’a pas été considérée comme liée au traitement). Des événements indésirables de grade 3 ou plus, toutes causes confondues, sont survenus chez 23 % des patients dans le groupe osimertinib contre 14 % dans le groupe placebo.

Pour expliquer ces bons résultats, les auteurs apportent deux éléments d’explication dans la publication du NEJM : « Il a été démontré que l'osimertinib réduit la récidive au niveau du SNC par rapport aux EGFR-TKI de génération précédente. De plus, contrairement aux EGFR-TKI de génération antérieure, l'osimertinib inhibe la mutation de résistance courante T790M et cible mieux les mutations sensibilisantes à l'EGFR-TKI, ce qui permet une plus forte régression de la tumeur. Ensemble, ces éléments ont probablement influé sur la magnitude de l’effet observé concernant la survie sans maladie et la survie globale dans l'essai ADAURA ».

« De futures études pourraient évaluer si la poursuite du traitement au-delà de 3 ans est bénéfique pour les patients chez les patients présentant une maladie résiduelle minime », ajoutent les chercheurs.

D'autres études sont en cours pour évaluer l'osimertinib en adjuvant dans les stades IA2 à IA3 de la maladie.

 

L’étude a été financée par AstraZeneca.

 

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