Déserts médicaux : un député propose de détacher des fonctionnaires pour décharger les médecins des tâches administratives

Jacques Cofard

Auteurs et déclarations

1er juin 2023

France – La question de la désertification médicale est la source d'une créativité législative sans fin. Ainsi, un député du Nord (59), Paul Christophe, auparavant maire de Zuydcoote, entend lutter contre les déserts médicaux de manière originale. Ce membre du groupe Horizon a, en effet, déposé une proposition de loi ce 10 mai qui vise à autoriser le détachement de fonctionnaires territoriaux auprès de maisons de santé ou de cabinets libéraux en zones sous denses afin de libérer le/les médecins des tâches administratives dont ils doivent s'acquitter. « Ce dispositif a pour objectif principal de libérer temporairement les médecins, souhaitant s’installer dans des déserts médicaux, de la charge du recrutement du personnel administratif. »

Mise à disposition

Grâce à cette proposition de loi, si elle est adoptée, les maires seraient donc protégés s'ils décident d'une mise à disposition de leur personnel administratif pour des médecins, ce qui n’est pas le cas actuellement. Un édile du Nord l’a d’ailleurs appris à ces dépens. « Sony Clinquart, maire d'une petite ville du Nord (59), Grand-Fort-Philippe, a été condamné lundi à six mois de prison avec sursis, 5 000 euros d'amende et trois ans d'inéligibilité par le tribunal de Dunkerque,  rapporte le Quotidien du médecin en novembre 2022. La raison ? Il avait mis à disposition des trois médecins de sa commune deux employées de mairie, ce qui relevait du détournement de fonds, relate France Bleu Nord. Les médecins de la maison médicale ont écopé de 5 000 euros d'amende. Légiférer était donc indispensable, dans le sens où la mise à disposition est actuellement réservée à des entités de droit public.

Toutefois, cette mise à disposition est assortie de conditions : le salaire du fonctionnaire ainsi que ses cotisations sociales seront pris en charge par le médecin ou la maison de santé, et la mise à disposition sera limitée à trois mois, « renouvelables deux fois et conditionnée à une arrivée récente sur le territoire ».

Dispositifs d’aide à l’installation de plus

Le député Paul Christophe précise bien que ce nouveau dispositif n’a pas vocation à supplanter les dispositifs existants mais à venir en complément de tout ce que les pouvoirs publics ont mis en place ces dernières années. Ce membre fondateur du parti politique Agir rappelle ainsi que les pouvoirs publics ont supprimé le numerus clausus, tout en créant de nombreux dispositifs d'aide à l'installation. L'assurance maladie propose, entre autres, une aide à l'installation des médecins en zones sous-denses, pouvant atteindre 60 000 euros, mais aussi un contrat de solidarité territoriale qui rémunère des médecins installés, volontaires pour exercer de manière ponctuelle dans les déserts médicaux, ainsi qu’une aide à l'embauche d'assistant médicaux.

 Les agences régionales de santé (ARS) ne sont pas en reste puisqu'elles offrent des contrats de début d'exercice dans les zones désertifiées, et un contrat d'engagement de service public (CESP) à destination des étudiants en médecine qui s'engagent pour débuter leur exercice dans un désert médical. Chose étonnante : le député cite aussi, parmi les aides à l’installation, la création d'une quatrième année de cursus dans le DES de médecine générale, « consacrée à des stages en cabinet médical, en priorité dans les zones médicalement tendues ». Voilà qui va ravir les syndicats d'internes et d'étudiants en médecine... Paul Christophe n'oublie pas non plus de citer les différents allègement fiscaux et sociaux, tendant à favoriser le retour à l'emploi de médecins retraités.

 

La proposition de loi Valletoux ne passe pas
Le 28 avril dernier, le député Frédéric Valletoux, par ailleurs ancien président de la FHF, a déposé une proposition de loi qui suscite la colère des médecins libéraux. Dénommée "proposition de loi n°1175 visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels", elle vise à lutter contre les déserts médicaux. Et ne fait pas l'impasse sur les mesures coercitives. Ainsi, son article 3 oblige l'ensemble des professionnels de santé à se rattacher à une communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS), tandis que l'article 4 vise à rendre obligatoire la participation de tous les médecins à la permanence des soins. Un autre article chagrine la profession médicale : l'article 7 prévoit d'interdire l'intérim médical aux médecins et paramédicaux en début de carrière. Les syndicats d'infirmiers sont pour leur part consternés de constater que la création de l’infirmier référent, faisant l'objet d'un article dans une précédente loi (retirée) de l'ancien député Thomas Mesnier n'a pas été reprise par Frédéric Valletoux. L'association Médecins pour demain a appelé ses adhérents à fermer leur cabinet le 9 juin prochain, la veille de l'examen de cette PPL à l'Assemblée nationale.

 

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