France — Dans un rapport adopté le 18 avril 2023, l’Académie nationale de médecine souligne « l’extrême gravité de la pénurie en médecins », « tragédie » qui doit être une « priorité nationale incontournable ». L’état des lieux qu’elle en dresse reprend des données déjà avancées dans d’autres travaux et décrit les raisons généralement avancées pour l’expliquer : « explosion de la demande de soins » conjuguée à une « diminution de l’offre », multifactorielle (numerus clausus national, vieillissement de la profession médicale, aspiration des jeunes praticiens à un meilleur équilibre entre vies professionnelle et privée, augmentation du nombre de médecins non soignants, épuisement professionnel). Au total, « il faut en moyenne plus de deux médecins qui s’installent pour remplacer un médecin qui part à la retraite. » À ce bilan, s’ajoutent les importantes disparités territoriales en termes de démographie médicale, qui ne sont plus limitées aux zones rurales, mais touchent également l’urbain et le péri-urbain.

Des mesures pour faire face à l’urgence de la situation
Le rapport cite un travail du Sénat, qui estime que la densité médicale ne devrait pas retrouver un niveau acceptable d’ici 2033. Il y a donc urgence. Pour y faire face, l’Académie avance une solution déjà proposée en janvier 2023 : « l’instauration d’un service médical citoyen d’un an pour les médecins nouvellement diplômés dans le cadre d’un engagement contractuel s’appuyant sur leur conscience professionnelle », organisé selon les besoins locaux, dans le cadre d’un salariat et offrant une logistique professionnelle et privée aux praticiens concernés. L’Académie plaide aussi pour la mise en place de mesures favorisant le cumul emploi-retraite des médecins récemment retraités (« en permettant à leurs cotisations de générer des droits supplémentaires »), pour la facilitation de l’exercice multisites et pour « la sensibilisation de la population au bon usage de la médecine, respect des rendez-vous pris auprès des médecins et autres soignants ».
Remédier à une situation complexe
Le rapport propose plusieurs dispositifs pour corriger à plus long terme une situation qu’il qualifie de « complexe ». En premier lieu, il s’agit de « redonner au médecin du temps médical ». Il faut donc « optimiser les partages de compétences et les délégations de tâches » s’inscrivant dans des « parcours de soins précis et coordonnés par le médecin », l’organisation des soins « reposant sur les propositions des professionnels de santé et les élus locaux ». Sont concernés les infirmières de pratique avancée, les maïeuticiens, les pharmaciens, etc., et « de probables nouveaux métiers de la santé ». Il faut également « décharger les médecins du temps administratif », notamment en simplifiant les réglementations, en recrutant du personnel (assistants médicaux notamment) grâce à des aides financières pérennes, en facilitant les installations précoces grâce à un guichet unique et des cartographies fines, en renforçant la sécurité des médecins et en réévaluant les visites à domicile « à un juste prix ».
En second lieu, il faut promouvoir et faciliter l’exercice dans les zones sous-denses, grâce à plusieurs mesures :
Donner des moyens supplémentaires aux regroupements de médecins et à la constitution d’équipes de soins, en « valorisant les projets émanant des soignants eux-mêmes » ;
Faciliter la primo-installation en zones prioritaires par « des incitations financières appropriées » ;
Dans ces zones, soit majorer les honoraires de 20 %, soit défiscaliser 20 % des honoraires perçus ;
Renforcer les liens et la coordination avec l’hôpital.
En troisième lieu, le rapport préconise l’augmentation « très rapide et très significative » du numerus apertus « en l’adaptant aux besoins réels des territoires et des spécialités médicales sous-dotées, grâce à une cartographie précise et actualisée ». Des stages dans les territoires sous-denses devraient être proposés dès le deuxième cycle des études médicale. Il est souhaitable de « diversifier l’origine territoriale et sociale des étudiants ». L’Académie se prononce de nouveau contre une obligation territoriale des stages ambulatoires pour la quatrième année du DES (diplôme d’études spécialisées) de médecine générale.
En conclusion, l’Académie souhaite que son rapport « contribue à un dialogue constructif » pour « lutter contre le fléau des déserts médicaux ».
Cet article a initialement été publié sur Univadis.fr, membre du réseau Medscape
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Crédit de Une : BSIP
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Citer cet article: Pénurie de médecins : les propositions de l’Académie de médecine - Medscape - 9 juin 2023.
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