Étude de cas : insuffisance rénale aiguë chez une patiente de 40 ans

Dr Thomas Kron

Auteurs et déclarations

11 mai 2023

Présentation

La patiente, âgée de 40 ans et originaire d'Érythrée, s'est rendue à l'hôpital pour une évaluation de son insuffisance rénale progressive. Un an plus tôt, la fonction rénale était normale avec une créatinine sérique de 0,8 mg/dl. En raison de douleurs chroniques diffuses dans le bas-ventre, elle s'était présentée aux urgences de l'hôpital quelques semaines auparavant. Une colite avait été diagnostiquée comme étant la cause des symptômes. La patiente ne prenait aucun médicament. Les antécédents médicaux documentés indiquaient une tuberculose urogénitale avec annexectomie à gauche et adhérences des annexes laissées en place à droite.

Examens

La patiente est afébrile, en état général stable avec des paramètres vitaux normaux. L’examen physique est sans résultat probant.

Analyses de laboratoire :

  • créatinine sérique : 2,1 mg/dl

  • protéine C-réactive : 16 mg/l

  • valeur de l'hémoglobine : 11,4 g/dl

  • albuminurie dans l'urine spontanée : 2,4 g/g de créatinine.

  • sédiment urinaire : érythrocytes isolés sans acanthocytes ou cylindres

L’échographie de l'abdomen montre des reins de taille normale des deux côtés ; morphologiquement il n’y a aucun signe de trouble de l'écoulement de l'urine ; pas de corrélat pour les douleurs au bas-ventre.

Une biopsie rénale est réalisée et révèle une néphrite interstitielle non purulente modérée en forme de foyer, en partie chroniquement cicatrisante, en partie floride. 

Les résultats des examens de laboratoire et histologiques montrent une néphrite tubulo-interstitielle d'origine indéterminée. En raison des antécédents (tuberculose urogénitale), un diagnostic de mycobactéries dans les urines a été demandé ; après une période de latence de 6 semaines, la détection culturelle du complexe Mycobacterium tuberculosis dans l'urine a réussi.

Les résultats disponibles ont amené à postuler une néphrite interstitielle avec récidive de la tuberculose urogénitale connue. La biopsie rénale n'a pas révélé de modifications granulomateuses ni de bâtonnets acido-alcoolo-résistants.

Traitement et suivi

Le traitement antituberculeux a constisté en de la rifampicine, isoniazide + vitamine B6, éthambutol ainsi que pyrazinamide ; après deux mois, une bithérapie avec rifampicine et isoniazide/vitamine B6 (fin de la thérapie après sept mois).

La fonction rénale était inchangée après le traitement (créatinine sérique au dernier moment 2,7 mg/dl, taux de filtration glomérulaire 21 ml/min). Un nouveau diagnostic de mycobactéries dans les urines s'est révélé négatif.

Discussion 

La néphrite tubulo-interstitielle aiguë (NTAI) est, selon les auteurs rapportant ce cas,[1]  une entité fréquente et sous-diagnostiquée de l'insuffisance rénale aiguë. Le diagnostic ne peut être confirmé que par une biopsie rénale. En l'absence d'exposition médicamenteuse, comme dans le cas de cette patiente de 40 ans, il convient de rechercher des causes infectieuses et une implication rénale dans les maladies systémiques.

La mesure de base est l'arrêt de la médication à l'origine des symptômes ou le traitement de la cause infectieuse ou de la maladie systémique sous-jacente.

Dans la plupart des cas, la fonction rénale se rétablit après l'arrêt de la médication originelle. Cependant, dans 40% des cas, seule une rémission partielle est obtenue, le plus souvent en raison d'une transformation rapide des lésions inflammatoires en fibrose interstitielle et en atrophie des tubules.

Un diagnostic précoce est particulièrement important pour le pronostic rénal de la forme de NTAI associée à la tuberculose. En effet, si une insuffisance rénale avancée s'est déjà produite concomitamment avec une NTAI associée à la tuberculose (taux de filtration glomérulaire < 15 ml/min), 75 % des patients devront être dialysés dans l'année qui suit.

Malgré des données incertaines, la plupart des centres cliniques commencent actuellement un traitement par stéroïdes (1 mg/kg de poids corporel, à dose progressive sur 4 à 6 semaines) si la fonction rénale ne s'améliore pas dans les 3 à 5 jours suivant l'arrêt du médicament déclencheur. Il existe des preuves qu'une initiation rapide du traitement par stéroïdes est associée à un meilleur résultat rénal. Une thérapie stéroïdienne à court terme doit être envisagée précocement.[1]  

 

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