Infertilité : que peut-on proposer en 2023 ?

Stéphanie Lavaud

Auteurs et déclarations

24 avril 2023

France – En 2020, l’assistance médicale à la procréation (AMP), également appelée « procréation médicalement assistée (PMA), a permis de donner naissance à 20 223 enfants en France et ce sont plus de 10 millions d’enfants qui ont bénéficié de cette technique à travers le monde depuis 1978. Mais quelles sont les différentes techniques qui se cachent derrière le terme générique d’AMP ? Dans quelles indications ? Que va changer la loi de bioéthique de 2021 qui élargi l’accès à l’AMP (voir encadré) ? Valérie Blanchet, sage-femme coordinatrice de l'équipe Médecine de la reproduction de l'hôpital Cochin (APHP, Paris) a fait le point lors d’un webinaire de Société française de médecine périnatale.

Que proposer en termes de prise en charge ?

Que faire face à une infertilité – définie par l’incapacité d’obtenir une grossesse après 12 mois ou plus de rapports sexuels réguliers non protégés ?

La première étape consiste à faire un bilan complet du couple. Chez la femme, les examens vont évaluer la réserve ovarienne, la perméabilité tubaire et explorer la cavité utérine. La recherche d’une éventuelle endométriose est, quant à elle, primordiale à l’interrogatoire, explique Valérie Blanchet. Chez les hommes, cela consistera en une analyse du sperme (spermogramme).

Le premier type de prise en charge possible est d’ordre chirurgical. Son objectif est alors de retirer un obstacle à l’implantation embryonnaire et de restaurer une fertilité spontanée.

« Face à une pathologie tubulaire, on pourra proposer un cathétérisme, une plastie, ou une adhésiolyse », indique la sage-femme. Une chirurgie est aussi possible en cas d’endométriose, en présence de douleurs et si la réserve ovarienne n’est pas altérée.

« 40 % des femmes sont alors susceptibles d’avoir une grossesse dans l’année qui suit ». Pour les cas de pathologies endo-utérines comme les synéchies, une hystéroscopie opératoire peut être indiquée.

Le deuxième type de prise en charge envisageable passe par l’aide médicale à la procréation qui comprend l’ensemble des pratiques cliniques et biologiques permettant la conception in vitro, le transfert embryonnaire et l’insémination artificielle. « L’AMP est régi par la loi de bioéthique, dont la dernière qui a introduit de grands changements date de 2021 (voir encadré), encadrée par l’Agence de Biomédecine et les agréments des centres d’AMP sont donnés par les Agences régionales de santé (ARS) », a précisé l’oratrice.

Insémination intra-utérine

L’insémination intra-utérine consiste à stimuler les ovaires de manière pauci folliculaire, afin d’obtenir un ou deux follicules matures, puis de déclencher l’ovulation en utilisant de l’hormone chorionique gonadotrope (hCG) et de faire une insémination d’une préparation de sperme 36 heures après ce déclenchement.

Un préalable à cette insémination est d’avoir un taux de migration/survie (TMS) supérieur à un million de spermatozoïdes mobiles progressifs et des trompes perméables, et de ne pas présenter de non-indications telles qu’une insuffisance ovarienne, des dysovulations de type 1 et 2, une oligo tératospermie sévère ou une endométriose.

« La sécurité sociale rembourse 6 cycles par grossesse clinique pour faire ces inséminations », ajoute la sage-femme. Du sperme frais du conjoint peut être utilisé dans les cas d’impuissance, hypospadias ou de vaginisme, d’infertilité cervicale (quand il y a une anomalie du mucus), ou face à une oligo tératospermie modérée.

« Le sperme pourra avoir été auto-conservé en cas de traitement gonadotoxique pour l’homme ou s’il y a de vraies difficultés de recueil. Quant à l’accès au sperme de donneurs, il est désormais nettement plus fréquent avec l’ouverture de l’AMP aux couples de femmes non mariées ».

Fécondations in vitro de type FIV/ICSI

Autre type de prise en charge : les fécondations in vitro de type FIV/ICSI, dont les principes généraux reposent, là aussi, sur une stimulation ovarienne, mais cette fois-ci, multi-folliculaire, obtenue en 10 à 21 jours. L’ovulation est déclenchée 36 heures après avec ponction ovocytaire par voie trans-vaginale échoguidée, tandis qu’a lieu un recueil de sperme. Le même jour, les ovocytes sont mis en fécondation avec les spermatozoïdes « capacités ».

Il peut s’agir soit de spermatozoïdes – plusieurs millions – dans une boîte de culture et ce sera une fécondation in vitro classique.  Soit le spermatozoïde est introduit dans l’ovule, et l’on parle de fécondation assistée par micro-injections. L’ovocyte fécondé est ensuite placé en culture 2, 3 ou 5 jours. « De plus en plus souvent, dans les centres d’AMP, l’ovocyte est maintenu en culture jusqu’au stade blastocyte – 5ème jour », précise Valérie Blanchet. A ce stade, on procède à un transfert embryonnaire – mono-embryonnaire dans 70% des cas désormais –, tandis que les embryons surnuméraires sont mis en vitrification pour un transfert ultérieur.

L’important est de synchroniser le stade embryonnaire avec la réceptivité endométriale pour avoir les meilleurs succès d’implantation.  « On s’appuie alors soit sur le cycle naturel (avec ou sans déclenchement) en suivant les dosages hormonaux, soit sur un cycle stimulé avec des petites doses de gonadotrophines, soit (dans de nombreux cas) sur un cycle artificiel avec des traitements hormonaux substitutifs » indique-t-elle. Un test de grossesse est réalisé deux semaines après la ponction. « Quatre cycles de fécondation in vitro suivi de transfert sont remboursés par la sécurité sociale par grossesse clinique avérée ».

Dans quelles indications ? L’infertilité tubaire est la première indication pour une FIV, suivie par l’infertilité idiopathique. Certains troubles majeurs après plusieurs échecs de traitement de l’ovulation (SOPK sévère), l’endométriose et les altérations modérées à sévères du sperme ou après échec de plusieurs inséminations figurent aussi parmi les indications possibles.

Complications et accouchements

Parmi les principales complications aux techniques de PMA, figurent :

  • les grossesses multiples, mais ce risque peut être contrôlé (surtout en fécondation in vitro) par un transfert embryonnaire unique ;

  • l’hyperstimulation ovarienne, qui peut être sévère dans moins de 5% des cas ;

  • le risque anesthésique (1%) en cas de ponction sous anesthésie générale.

Comment cela se traduit-il en termes d’accouchement ? Les rapports de l’Agence de Biomédecine rapportent les résultats de l’analyse statistique portant sur l’évaluation des résultats 2020.

Pour les inséminations artificielles, les taux sont autour de 10% en intraconjugal, et autour de 20% dans les cas de dons de spermatozoïdes – « des chiffres de taux de succès qui ont fortement augmenté », a commenté la sage-femme.

Par fécondation in vitro, les taux d’accouchement en intra-conjugal (FIV ou ICSI) sont aux alentours de 18%, et atteignent entre 18 et 22 % avec don de spermatozoïdes.

Le don d’ovocytes donne des résultats autour de 20%, et les taux de succès sont meilleurs en cas d’accueil d’embryon, avec des chiffres autour de 26%.

 

Qui dit la loi du 2 août 2021 en matière d’AMP ?
Cette loi a essentiellement élargi l’accès à l’AMP, qui est désormais destinée à répondre à un projet parental, émanant non plus seulement d’un couple hétérosexuel, mais aussi de deux femmes ou encore d’une femme seule non mariée. Le deuxième changement d’importance concerne les conditions d’âge de l’accès à l’AMP. Une femme peut bénéficier d’une ponction d’ovocytes jusqu’à l’anniversaire de ses 43 ans, tandis qu’un homme peut accéder à une AMP jusqu’à ses 60 ans. Une femme peut donner ses ovocytes entre 18 et 38 ans, alors qu’un homme peut donner ses spermatozoïdes entre 18 et 45 ans. La récupération par une femme de ses embryons peut se faire jusqu’à 45 ans, et pour un homme jusqu’à 60 ans.
La question de l’anonymat du don et de l’autoconservation des gamètes a aussi connu des évolutions. (voir Loi de bioéthique : la PMA pour toutes définitivement adoptée)

 

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