Sydney, Australie — Selon une revue de la littérature australienne portant sur plus de 1 000 essais randomisés, l’activité physique serait plus efficace qu’une psychothérapie ou que les médicaments pour réduire les symptômes de la dépression ou de l’anxiété [1]. Si une pratique vigoureuse n’est pas nécessaire pour obtenir un effet significatif, les exercices d’intensité élevée sont associés à une amélioration plus nette des symptômes.
L’analyse montre que tous les types d’activité physique et d’exercices sont bénéfiques, y compris la marche, le yoga ou les exercices de pilates, mais l’effet varie selon les troubles. « Les levers de poids ont tendance à être plus efficaces sur la dépression, tandis que les activités comme le yoga et le Pilates ont plus d’effets sur l’anxiété », précise le Dr Ben Singh (University of South Australia, Adelaide, Australie), auteur principal de l’étude.
Une approche encore peu envisagée
« Les résultats de cette revue générale de la littérature soulignent la nécessité de considérer l'exercice physique (…) comme un élément clé dans la prise en charge de la dépression et de l’anxiété », ont commenté les auteurs de l’étude, qui estiment que la pratique d’une activité physique régulière est encore peu envisagée en santé mentale, alors que ses bienfaits sont reconnus.
Cette approche apparait d’autant plus intéressante qu’il n’apparait pas nécessaire de mettre en place un plan d’entrainement intensif de longue durée pour garantir des résultats. L’étude montre, au contraire, que les bénéfices sont plus importants avec un programme court de moins de 12 semaines. De même, des sessions de moins de 150 minutes au total par semaine ont plus d’effet.
« Il est possible que des interventions de courte durée soient plus faciles à respecter pour les participants, alors que les sessions hebdomadaires de longue durée sont plus contraignantes, ce qui peut impacter les bénéfices sur le plan psychologique », avancent les auteurs.
Les bienfaits du sport sur la santé mentale ont été rapportés dans de nombreuses études. Il y a une dizaine d’années, une revue Cochrane avait conclu à un bénéfice du sport équivalent à celui d’un traitement antidépresseur. Quelques années plus tard, une étude norvégienne a montré qu’une activité physique limitée à une heure par semaine a déjà un effet antidépresseur, quel que soit l’âge.
Endurance et renforcement musculaire
Dans ses dernières recommandations, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) préconise de consacrer au moins 150 à 300 minutes d’activité d’endurance d’intensité modérée par semaine ou au moins 75 à 150 minutes d’activité d’endurance d’intensité soutenue. Deux sessions hebdomadaires de renforcement musculaire sont également conseillées.
Pour mener leur étude, le Dr Singh et ses collègues ont repris les données d’études randomisées évaluant l’effet de l’activité physique et sportive sur la santé mentale, en comparaison avec une prise en charge standard. Ils ont ainsi regroupé près d’une centaine de revues de la littérature portant sur 1 039 essais randomisés pour un total de 128 119 adultes inclus.
Leur analyse montre que l’activité physique est 1,5 fois plus efficace qu’une psychothérapie ou qu’un traitement médicamenteux dans l’amélioration d’un état de dépression ou d’anxiété (médiane de taille d’effet respectivement de - 0,43 et -0,42). L’effet est plus marqué encore sur la réduction des symptômes de la détresse psychologique (SMD=-0,60).
Selon une analyse de sous-groupes, les bénéfices les plus importants s’observent chez les femmes enceintes, en post-partum, les patients VIH+ et ceux avec une insuffisance rénale pris en charge pour des symptômes dépressifs. L’effet est également plus marqué chez les individus en bonne santé présentant une dépression.
Idéalement 4 à 5 séances par semaine sur moins de 12 semaines
Les exercices d’entrainement contre résistance (lever de poids, pompes, squats…) ont un impact plus notable sur la dépression (SMD=-0,64), que la pratique du stretching ou du yoga (-0,46), alors que cette dernière est plus efficace pour lutter contre l’anxiété (-0,42), comparativement aux exercices d’aérobie, comme la marche, la course à pied ou la nage (-0,29).
Une activité avec intensité élevée est surtout efficace contre la dépression (SMD=-0,70), alors qu’une intensité plus modérée est suffisante pour avoir un effet majeur dans la baisse de l’anxiété (SMD=-0,47 contre -0,44 avec des exercices d’intensité plus élevée).
Concernant la durée du programme d’entrainement, l’impact est nettement plus marqué avec des sessions réparties sur moins de 12 semaines, autant sur la dépression (SMD= -0,84 contre -0,28 pour un entrainement de plus de 24 semaines) que sur l’anxiété (-0,55 contre -0,15).
Et, mieux vaut privilégier une activité cumulant moins de 150 minutes d’exercices par semaine, une durée largement suffisante pour avoir un effet très significatif, surtout dans le cas de l’anxiété (-1,23 contre -0,99 avec plus de 150 minutes par semaine ), mais idéalement en les répartissant sur 4 à 5 séances par semaine, l’effet étant maximum avec cette fréquence.
« L’activité physique améliore la dépression par le biais de divers mécanismes neuromoléculaires, notamment par une expression accrue de facteurs neurotrophiques, des niveaux plus élevés en sérotonine et noradrénaline, une régulation de l’activité de l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien et une réduction de l’inflammation systémique », commettent les auteurs.
faire du sport « un élément clé »
« Par conséquent, une activité physique de faible intensité peut être insuffisante pour stimuler les changements neurologiques et hormonaux associés à des améliorations plus importantes de la dépression et de l’anxiété ».
Tous les types d’exercices s’avèrent bénéfiques et sont au moins équivalents dans l’amélioration des symptômes dépressifs et anxieux à un traitement standard. Néanmoins, « une intensité plus élevée est associée à un plus grand bénéfice », précisent les chercheurs.
Quoi qu’il en soit, « il est important de noter que la recherche montre qu’il suffit de peu pour que l’exercice physique ait un effet positif sur la santé mentale », a souligné le Dr Singh. Se consacrer à une activité physique 30 minutes par jour serait ainsi suffisant pour réduire sa dépression et son anxiété.
Alors que l’activité physique adaptée est déjà recommandée par la HAS en première ligne dans la prise en charge de la dépression légère à modérée, en association à la psychothérapie, elle n’est pas encore pleinement intégrée dans la prise en charge des personnes avec une santé mentale altérée, en raison notamment de la présence de comorbidités.
Ces résultats confirment qu’elle doit devenir « un élément clé » de la prise en charge, ont conclu les chercheurs.
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Crédit de Une : Dreamstime
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Citer cet article: Dépression et anxiété: quand l’activité physique rivalise avec les traitements standards - Medscape - 20 avr 2023.
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