Lyon, France — Ces derniers mois ont été riches de nouveautés dans la prise en charge des événements aigus et post-aigus des accidents vasculaires cérébraux (AVC). Une session des Journées de neurologie de langue française (4-7 avril 2023, Lyon) a permis à la Pre Nathalie Nasr (neurologue vasculaire, CHU Poitiers) d’en présenter la synthèse [1].
La thrombectomie renforce sa position
Les patients présentant une ischémie étendue sont plutôt écartés de la thrombectomie mécanique étant donné les inquiétudes relatives au risque associé d'hémorragie et de complications associées. Ces derniers mois, plusieurs études ont conduit à réviser cette position, grâce à trois importantes études : RESCUE-JAPAN LIMIT [2], et très récemment ANGEL-ASPECT [3] et SELECT2 [4].
Les deux premières ont été menées auprès d’une population asiatique chez laquelle la prise en charge associée diffère, notamment concernant la posologie du traitement thrombolytique : elles ont néanmoins décrit une amélioration supérieure du critère principal (score de Rankin modifié [mRS] illustrant le handicap) grâce à une thrombectomie réalisée dans les 24 premières heures par rapport à une prise en charge conforme aux recommandations. Mais la dernière, SELECT2, a permis d’atteindre des résultats comparables au sein d’une population occidentale, avec un risque relatif d’atteindre l’indépendance fonctionnelle trois fois supérieur dans le groupe thrombectomie versus traitement standard (20 % contre 7 % à 90 jours) sans différence sur la mortalité ou sur les complications hémorragiques intracrâniennes.
Deux autres études chinoises se sont de leur côté penchées sur les AVC du tronc basilaire, contexte dans lequel l’intérêt de cette même thrombectomie reste débattu : les deux essais, ATTENTION [5] et BAOCHE [6], ont évalué l’amélioration du score mRS par rapport à une prise en charge de référence lorsque la thrombectomie était envisagée respectivement dans les 12 heures et les 24 heures suivant le début estimé de l’AVC. Toutes deux confirment le bénéfice pronostique supplémentaire obtenu dans le groupe interventionnel, sachant toutefois que la seconde était méthodologiquement moins satisfaisante : la thrombectomie permettait à 46 % des patients traités d’atteindre un score mRS 0-3 à 90 jours contre 23 % dans le groupe contrôle (rapport de taux ajusté 2,06, P < 0,001) dans la première et, dans la seconde, à respectivement 46 % et 24 % des patients (rapport des taux ajusté 1,81, P < 0,001), malgré une augmentation du risque d’hémorragie intracrânienne symptomatique (5 % vs 0 et 6 % vs 1 %).
En conséquence, « faut-il continuer à utiliser la thrombolyse avant la thrombectomie ? », a interrogé Nathalie Nars. Pour l’heure, la position européenne ESO/ESMINT [7] reste de ne pas modifier les pratiques avec un recours à la thrombolyse toujours préconisé, ne devant toutefois pas empêcher ou retarder la thrombectomie. Les pratiques en la matière ont cependant évolué puisque « les recommandations européennes préconisent d’utiliser la tenecteplase préférentiellement à l’altéplase, à une dose de 0,25 mg/kg », a-t-elle insisté. Pour mémoire, une posologie à 0,4 mg/kg est associée à davantage de transformation hémorragique.
AIT et prévention secondaire
Finalement, la prise en charge des accidents ischémiques transitoires (AIT) et AVC mineurs peut encore être optimisée a insisté la neurologue qui a rappelé qu’ils représentent aujourd’hui 65% de l’ensemble des évènements cérébrovasculaires grâce à la prévention primaire : suite à la publication de trois essais cliniques important sur le sujet (CHANCE, POINT et THALES) [8], la double anti-agrégation plaquettaire (aspirine + ticagrelor ou aspirine + clopidogrel) est recommandée durant les 3 semaines post-événement. Au début de l’année, l’analyse post hoc de l’essai CHANCE-2 a montré que les sujets non répondeurs au clopidogrel de par la présence d’une perte de fonction sur le gène CYP2C19 tirent un bénéfice supplémentaire de l’association utilisant le ticagrelor plutôt que de celle combinée au clopidogrel. Les personnes portant ce gène représentent 25 % de la population d’origine caucasienne, et jusqu’à 60 % de celle d’origine asiatique.
Enfin, la neurologue a insisté sur la marge de progression existant concernant l’optimisation de la prise en charge des patients sur le terrain de la prévention secondaire : d’une part, à la suite de l’étude TST [9], les recommandations américaines de 2022 ont établi la cible du LDL-cholestérol à un seuil maximal de 70 mg/dL et non plus 100 mg/dL. Celles de la société européenne de 2021 rappellent quant à elles l’utilité des agonistes GLP1 chez les patients diabétiques en prévention secondaire.
Cet article a initialement été publié sur Univadis.fr, membre du réseau Medscape
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Crédit de Une : BSIP
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Citer cet article: AVC : évolution majeure des pratiques de thrombectomie - Medscape - 21 avr 2023.
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