
Pr Eric Renard
Montpellier, France – 7 000 à 10 000 personnes atteintes d'un diabète de type 1 sont équipées d'un système de boucle fermée aujourd'hui en France. On estime qu'elles pourraient être jusqu'à 50 000 à en bénéficier, notamment grâce à la formation des professionnels via le diplôme interuniversitaire créé il y a deux ans.
Technologie toujours en essor donc, le pancréas artificiel, ou insulinothérapie automatisée, a encore une fois été l'objet de plusieurs présentations lors du congrès de la Société Française de Diabétologie (SFD) qui s'est déroulé du 23 au 25 mars dernier. À l'occasion d'une conférence de presse, le Pr Eric Renard (endocrinologue-diabétologue, Hôpital Lapeyronie, Montpellier) qui a présidé cette édition 2023, a présenté les dernières actualités sur la boucle fermée.
Bientôt l' OmniPod5 ?
En plus des trois dispositifs existants (Medtronic 780G, Tandem Control-IQ et Diabeloop DBLG1), deux dispositifs sont en cours de validation par le CEPS : le CamDia APS et l'OmniPod5 qui sera le premier système d'insulinothérapie avec une patch-pompe. « En France, l'Omnipod, qui représente environ 70 % des mises sous pompe actuellement, est très attendu sous sa forme automatisée », fait remarquer le Pr Renard.
L’Omnipod 5 est relié, sans fil, à l’outil de surveillance continue du glucose
Dexcom G6 pour ajuster automatiquement l’insuline délivrée par le Pod. L’algorithme est contenu dans le Pod lui-même et communique directement avec le Dexcom G6. Un terminal (PDM*) permet de suivre en temps réel la glycémie et l’administration d’insuline, et de programmer les doses d’insuline aux repas selon les glucides consommés.
Deux essais cliniques vont prochainement débuter en France pour cette première boucle fermée sans tubulure, qui se pose directement sur la peau. Menée également aux États-Unis, une première étude randomisée contrôlée permettra d'évaluer l'OmniPod5 en comparaison avec le traitement par pompe à insuline avec capteur mais sans l'algorithme.
Les participants seront des adultes avec un DT1 diagnostiqué depuis plus d'un an, une hémoglobine glyquée entre 7 et 11 % et sous pompe depuis au moins trois mois.
« On espère que de cette étude randomisée sur trois mois, suivie d'une extension, on pourra démontrer par des critères scientifiques solides le bénéfice de l'OmniPod5 », indique le diabétologue montpelliérain.
Financée par le ministère de la santé au titre du PHRC national et coordonnée par le Pr Renard, la deuxième étude sur l'OmniPod5 va, elle, inclure des enfants de 2 à 18 ans participants. Elle évaluera l'OmniPod5 versus le traitement conventionnel par pompe ou multiinjections chez 112 enfants avec un diagnostic récent, datant de 3 à 6 mois, de DT1.
« On va essayer de documenter l'intérêt de mettre en place l'insulinothérapie automatisée dès le diagnostic », explique le Pr Renard. Et de donner des détails sur ce qu'il se passera ensuite : « À l'issue de cette phase comparative d'un an, tous les enfants et adolescents pourront bénéficier pendant un an du dispositif. Le but étant de montrer le bénéfice du maintien de l'OmniPod5 mais aussi d'observer ce qu'il se passe quand on switche sous OmniPod5 ».
Bénéfice conservé à un an
Si la plupart des études publiées rapportent des durées d'utilisation relativement courtes, l'orateur a cité une étude américaine en vie réelle[1] ayant suivi environ 10 000 patients équipés du dispositif Tandem Control-IQ.
Ce travail montre que le bénéfice, de l'ordre de gain de 10 % dans la cible sans augmenter les hypoglycémies, se maintient sur une durée d'un an. « Ce qui est intéressant, c'est que c'est valable quel que soit l'âge, c'est-à-dire que ce bénéfice est maintenu pendant un an chez les enfants d'âge scolaire, les adolescents, les adultes ou encore les sujets plus âgés », commente Eric Renard. Pour lui, ceci s'explique par la fiabilité des systèmes les plus récents alors que les premiers systèmes de boucle fermée, trop fréquemment défaillants, entraînaient souvent des abandons.
Quid de l'intérêt de la boucle fermée dès le diagnostic ? Une étude anglaise publiée dans le NEJM [2] montre que si on compare de façon randomisée la mise en boucle fermée au traitement standard, il n'y a pas de différence pour le C peptide au bout d'un an. Autrement dit, un équilibre glycémique optimisé par la boucle fermée ne préserve pas l'insulinosécrétion. En revanche, il y a un bénéfice métabolique tant sur le temps passé dans la cible que sur la valeur de hémoglobine glyquée lorsqu'on met le pancréas artificiel dès le diagnostic.
Une bonne surprise : l'amélioration des capacités cognitives des ados
Autre actualité, une étude randomisée contrôlée publiée dans Nature communications [3] montre un effet positif de la boucle fermée sur les capacités cognitives des adolescents qui ont des difficultés à bien suivre leur traitement. En détails, la boucle fermée apporte un bénéfice métabolique à ces adolescents mal contrôlés dans la mesure où ils gagnent treize points de temps passé dans la cible avec une réduction très importante du temps passé en hyperglycémie.
Si ce résultat était attendu, « ce qui est époustouflant, c'est l'impact au niveau cérébral et cognitif ». Ces adolescents mis sous boucle fermée gagnent en QI et en capacité de raisonnement. Mieux, « la cerise sur le gâteau », l'étude morphologique et fonctionnelle cérébrale met en évidence une diminution de la composante œdémateuse du cortex, corrélée à l'amélioration des performances cognitives.
« Cela veut dire que pour les cas très difficiles d'adolescents qui ne prennent pas en charge leur diabète, on peut les mettre en boucle fermée et non seulement il y a un bénéfice métabolique mais aussi un bénéfice cognitif », considère le Pr Renard qui se réjouit de « pouvoir en déduire que c'est positif pour leur avenir, qu'ils vont mieux réussir dans leur intégration professionnelle. »
Un travail français chez l'enfant présenté le 23 mars a montré, lui, un bénéfice significatif de la boucle fermée sur la charge mentale et le ressenti émotionnel du diabète.
Un surcoût qui vaut le coût
Pour terminer le Pr Renard a présenté les résultats d'une étude australienne [4] qui montre que si la boucle fermée coûte plus cher que la prise en charge conventionnelle, elle permet un gain en termes d'espérance, de qualité de vie et de réduction des complications. Ce premier travail sur les aspects économiques « devrait interpeler les commissions de remboursement », considère le Pr Renard.
« On peut espérer que les gens vivront plus longtemps et en bonne santé. Je rappelle que le coût du diabète, c'est surtout celui des complications du diabète, c'est-à-dire celui des dialyses, de la prise en charge des complications CV, rétiniennes... »
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Citer cet article: Boucle fermée et DT1 : les actualités du congrès de la SFD - Medscape - 28 mars 2023.
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