Des nouveautés dans la stéatose hépatique : changement de nomenclature avec le nouvel acronyme MASH, et nouvelles recommandations de l’American Diabetes Association sur le suivi des patients diabétiques de type 2 chez qui on souhaite dépister cette maladie du foie.
TRANSCRIPTION
Changement de nomenclature
Connaissez-vous la MASH ? Je ne parle pas de salade, mais bien du nouvel acronyme qui a été choisi pour désigner la maladie stéatosique du foie. Les experts des pathologies, qui se sont récemment réunis, ont revu la nomenclature de ce qu’on appelle les stéatoses hépatiques, c’est-à-dire l’accumulation de graisse dans le foie et des formes évolutives de cette stéatose. À l’avenir, on ne devra plus parler de NAFLD et de NASH, c’est-à-dire ce qu’on désignait pour stéatose hépatique non alcoolique et stéatohépatite non alcoolique. Désormais, on va parler de manière plus "positive" de maladie hépatique stéatosique associée à un dysfonctionnement métabolique [ou MASH pour metabolic-associated steatohepatitis] et de stéatohépatite associée à un dysfonctionnement métabolique. Bref, on ne va plus dire « maladie non liée à l’alcool », mais plutôt « maladie liée à un problème métabolique ». L’idée est d’être moins stigmatisant et d’aller davantage vers l’origine de la maladie hépatique du foie. Et au passage, on va éviter de continuer à utiliser ce terme « maladie du foie gras », qui est vécu comme assez stigmatisant par certains patients.
Si je parle de ce sujet, au-delà du changement de nomenclature, c’est pour vous présenter les récentes recommandations qui ont été proposées par l’American Diabetes Association (ADA) pour le dépistage de ces MASH et de leur gravité chez les patients qui ont un diabète de type 2. Je vais revenir, justement, sur ces recommandations de l’ADA qui sont bien utiles pour nous, médecins diabétologues, face à des patients susceptibles d’avoir une maladie métabolique du foie. Parce qu’il y a ce chiffre incroyable : plus de 70 % des patients diabétiques de type 2 sont concernées par la MASH. Pour rappel, ce qu’on craint avec ces maladies stéatosiques du foie, c’est qu’elles évoluent vers la stéatohépatite, qui représente un véritable risque de fibrose et donc de cirrhose, et d’autre part le risque de carcinome hépatocellulaire (CHC). L’enjeu de la médecine est donc de détecter les patients qui risquent d’évoluer vers la cirrhose et le CHC. C’est un vrai sujet concret, parce que tous les patients ne peuvent pas voir un hépatologue – il faut donc une démarche diagnostique pour savoir qui adresser.
On dispose aujourd’hui d’outils qui permettent d’évaluer, indirectement, la sévérité de la maladie métabolique du foie. Je dis bien indirectement parce que le diagnostic de certitude nécessite une ponction-biopsie hépatique (PBH). Et bien sûr, on ne va pas faire une PBH à tout le monde, c’est compliqué et ce n’est pas dénué de risques.
Les recommandations de l’ADA 2023
Que peut-on faire, en pratique, dans le suivi d’un patient diabétique de type 2, chez qui on veut dépister cette maladie du foie ? On pourrait penser qu’on va se baser sur le bilan hépatique, les transaminases – c’est pas mal, mais aujourd’hui on dit clairement que cela ne suffit pas parce qu’on sait qu’on peut avoir une MASH avancée avec des transaminases normales. Pour savoir quoi faire, l’ADA nous a donné des recommandations claires :
Premièrement, on va utiliser le FIB-4 . Il y a aujourd’hui un consensus pour dire que ce FIB-4 est le score de prédiction qui est le plus coût-efficace, en particulier chez les patients diabétiques, prédiabétiques ou en situation d’obésité. C’est un score qui est calculé à partir des transaminases, mais aussi des plaquettes et de l’âge. Et on va retenir un chiffre : 1,3. En dessous de 1,3, on peut exclure la fibrose avancée avec plus de 90 % d’exactitude. Un deuxième chiffre : au-delà de 2,67, il y a une forte probabilité qu’il y ait une fibrose avancée. Et entre les deux, c’est la zone grise, c’est totalement indéterminé. Petite précision, au-delà de 65 ans, certains ont proposé un cut-off supérieur à 1,3 et proposent 1,9. L’ADA n’en parle pas dans ses recommandations.
Quand on est en dessous de 1,3 au FIB-4, on préconise un simple contrôle tous les deux à trois ans. Quand on est au-dessus de 1,3, on va proposer une élastométrie. Et, idéalement, c’est la technique du Fibroscan qui doit être proposée. On voit de plus en plus cet appareil s’installer dans les services de diabétologie et de nutrition, c’est un examen qui est relativement simple à faire, à condition d’avoir été formé – cela peut être un médecin ou un personnel non médical. Si on est en dessous de 8 kPa, cela exclut, à nouveau avec une bonne valeur prédictive, les fibroses avancées et cela permet de dire qu’on a un faible risque d’avoir une fibrose. Et dans ce cas-là, l’ADA nous dit : « on se contente d’une surveillance tous les deux à trois ans. » À l’inverse, si c’est élevé, au-dessus de 12 kPa, il faut référer absolument à un hépatologue et il y a une démarche diagnostique qui va être mise en place.
Tout cela paraît assez simple, mais en pratique – et je vous parle de mon expérience – il y a beaucoup de situations ambiguës. En particulier chez les personnes en situation d’obésité, le Fibroscan est assez peu interprétable et, dans ce cas-là, on est amené à avoir un FIB-4 strictement normal et un Fibroscan douteux ou, parfois, qui suggère qu’il y a une fibrose avancée, mais dans ces cas-là, franchement, il vaut mieux avoir accès à un hépatologue pour avis. Donc cette technique avec le FIB-4 et le Fibroscan, dans un certain nombre de cas, cela simplifie la donne, mais cela ne résout clairement pas tous les cas.
Un mot sur le traitement : aujourd’hui, il n’y a pas de traitement médicamenteux qui soit recommandé dans le cadre de la maladie métabolique du foie. L’American Diabetes Association recommande d’avoir facilement recours aux analogues du GLP-1 chez les patients diabétiques qui ont une MASH, mais cela pose un problème, en particulier en France, parce que chez le patient qui est bien équilibré sous metformine seule ― qui est le traitement de première intention du diabète, et parfois l’hémoglobine glyquée est parfaite sous metformine seule ― dans ces cas-là, si le diabète est contrôlé, il n’est pas prévu de rembourser l’ajout d’un analogue du GLP-1. Cela ouvre la voie à tout un débat...
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Citer cet article: NASH : nouvelles recommandations de l'ADA et changement de nomenclature - Medscape - 12 juil 2023.
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