France – Jusqu'à la fin de l'année 2022, six maladies rares ainsi que la surdité permanente étaient diagnostiquées dans le cadre du programme national de dépistage néonatal. Proposé à tous les nouveau-nés systématiquement et gratuitement, ce dépistage a été étendu à sept nouvelles maladies du métabolisme intermédiaires le 1er janvier 2023 à la suite des recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS). Le processus qui conduit à cette extension a été détaillé lors d'une conférence de presse organisée à l'Institut Imagine au début du mois de février.
Remplir les critères de Wilson et Jungner
Les maladies dépistées remplissent les critères de Wilson et Jungner adoptés par l'OMS en 1968.
Le dépistage doit se faire dans le cadre d'un programme pérenne et accessible pour une maladie pour laquelle il existe un marqueur spécifique et un traitement disponible. En France, le dépistage, ou test de Guthrie, est réalisé dans les 48 à 72 heures suivant la naissance avec le consentement d'un des parents. Prélevée au niveau du talon du bébé et apposée sur un buvard, une goutte de sang est analysée dans un centre régional de dépistage néonatal, lui-même en lien avec les services de prise en charge clinique en cas de détection d'une maladie rare.
« C'est important que les parents comprennent que nous dépistons des maladies pour lesquelles on a une médecine de prévention que je qualifie de « lumineuse ». Les personnes ne verrons jamais leurs enfants malades », explique le Pr Michel Polak (pédiatre endocrinologue, hôpital Necker, Paris), responsable du centre régional de dépistage néonatal d’Ile-de-France, qui analyse 185 000 buvards par an.
50 ans de dépistage néonatal en France
1972 dépistage de la phénylcétonurie
1978 dépistage de de l'hypothyroïdie congénitale
1995 dépistage de la drépanocytose et de l'hyperplasie congénitale des surrénales
2002 dépistage de la mucoviscidose
2020 dépistage du déficit en MCAD
Depuis le 1er janvier 2023
Dépistage de 7 maladies rares du métabolisme intermédiaires :
- 3 aminoacidopathies : homocystinurie par déficit en CBS, leucinose, tyrosinémie de type 1
- 2 aciduries organiques : acidurie glutarique de type 1, acidurie isovalérique
- 2 déficits en bêta oxydation : déficit en 3-hydroxyacyl-coenzymeA déshydrogénase des acides gras à chaîne longue, déficit en captation de la carnitine
Autre critère d'éligibilité au dépistage, la maladie doit constituer un problème de santé publique. Les sept maladies du métabolisme intermédiaires qui sont aujourd'hui testées ont des prévalences si faibles prises individuellement que ce critère ne peut être atteint. « Ce n'est donc pas une seule maladie qui a été incluse mais plusieurs d'un coup », indique le Dr Jean-Baptiste Arnoux (pédiatre, hôpital Necker, Paris), coordonnateur du groupe de travail dépistage au sein de la filière maladies rares G2M. « Les maladies sont rares mais il y en a beaucoup. Si on les prend ensemble, cela commence à devenir un problème de santé publique ».
Des maladies du métabolisme intermédiaire
Pourquoi ces maladies entrent-elles maintenant dans le programme national de dépistage ? Si l'acquisition par les centres régionaux de dépistage d'appareils de spectrométrie de masse en tandem a permis de doser différentes maladies en même temps à partir d’une même goutte de sang, l'évolution technologique n'est pas suffisante. Il faut aussi des financements et une volonté politique. « Pendant longtemps, la volonté politique n'y était pas. Pour preuve, il a fallu neuf ans pour que le dépistage du déficit en MCAD, recommandé depuis 2011, se mette en place », analyse Jean-Baptiste Arnoux qui considère que le Plan National Maladies Rares (PNMR) de 2018 a joué un rôle de dynamiseur. « Grâce à ce PNMR, l'organisation du dépistage a été revue en France, l'acquisition de spectromètres de masse en tandem a permis, enfin, de dépister le déficit en MCAD ».
Quant à savoir pourquoi le choix s'est porté sur ces sept maladies en particulier, le Dr Arnoux rappelle que la majorité des pays européens dépiste un groupe bien plus important de maladies rares du métabolisme. La HAS s'est intéressée à 24 d'entre elles et a réuni un groupe de travail qui en a finalement conservé sept qui remplissaient les critères de Wilson et Jungner. « Ces maladies, que l'on diagnostiquait à l'occasion d'un accident aigu, concernent 50 à 100 enfants par an. Le risque est là mais maintenant on peut mettre les enfants sous traitement pour que la maladie n'apparaisse jamais ». L'intégration de cinq autres maladies métaboliques sera discutée au cours de l'année.
Quid de l'amyotrophie spinale ?
« On ne dépiste pas pour le plaisir de dépister mais pour aider, pour traiter, pour faire quelque chose d'utile aux enfants », indique le Pr Arnold Munnich, Président de la Fondation Imagine. « A quoi bon tout dépister si on ne peut ni prévenir ni traiter, par un régime ou un médicament ? Il faut rappeler ce bon sens car Outre-Atlantique et dans beaucoup de pays on dépiste tout et n'importe quoi », insiste le pédiatre et généticien.
Il en appelle aussi à la volonté politique d'inclure au plus vite dans le programme national le dépistage de l'amyotrophie spinale, une maladie mortelle, pour laquelle un dépistage avant l'âge de trois ans permet de mettre en place une thérapie génique efficace.
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Crédit de Une : BSIP
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Citer cet article: Dépistage néonatal des maladies rares : 7 de plus depuis le 1er janvier - Medscape - 28 févr 2023.
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