Insuffisance cardiaque associée à une FA: l’ablation bénéfique en première intention

Vincent Richeux

Auteurs et déclarations

13 février 2023

Paris, France  Chez les patients présentant une fibrillation atriale et une insuffisance cardiaque avec fraction d’éjection altérée (FEVG< 35%), une procédure d’ablation par déconnexion des veines pulmonaires apparait davantage bénéfique qu’un contrôle du rythme sinusal par traitement médicamenteux, confirme une méta-analyse, dont les résultats ont été présentés lors des Journées européennes de la Société française de cardiologie (JESFC2023)[1].

Il existe une forte corrélation entre la fibrillation atriale (FA) et l’insuffisance cardiaque (IC). On estime que la moitié des patients avec une IC ont également une FA et inversement, ceux avec une FA ont dans plus d’un tiers des cas une IC, a rappelé lors de sa présentation le Dr Philippe Mabo (Service de cardiologie, CHU de Rennes, France), évoquant « un cercle vicieux entre ceux deux pathologies, qui s’aggravent mutuellement ». De fait, le pronostic de ces patients est très mauvais, d’où la nécessité d’une prise en charge « assez agressive » de la FA.

Pour maintenir le rythme sinusal chez ces patients, le praticien dispose d’un arsenal thérapeutique assez limité. Selon les dernières recommandations européennes de 2020, l’antiarythmique amiodarone (Cordarone) est indiqué en première intention dans le traitement d’une FA avec IC.

Néanmoins, l’ablation doit aussi être considérée en cas de dysfonction ventriculaire pour améliorer la survie et réduire les hospitalisations (classe IIa). Les recommandations américaines ACC/AHA de 2022 suggèrent également la méthode ablative lorsque la FA est un facteur aggravant de l’IC (classe IIa). 

Ces recommandations font suite à plusieurs études, dont des essais randomisés, avec globalement des petites cohortes de patients avec une IC et une FA majoritairement persistante. CASTLE-AF et CABANA sont les deux principaux essais ayant évalué l’ablation dans cette indication.

Dans CASTLE-AF, 179 patients avec une fraction déjection du ventricule gauche (FEVG) < 35% et une FA persistante dans 70% des cas ont été randomisés pour recevoir une ablation de la FA ou un traitement médicamenteux pour restaurer le rythme sinusal (cardioversion pharmacologique).

Après un suivi moyen de 38 mois, le critère primaire d’évaluation composite associant les décès toute cause et les hospitalisations pour IC a été validé dans 28,5% des cas dans le groupe ablation contre 44,6 % dans le groupe traitement médicamenteux. La différence reste significative en analysant séparément la mortalité globale et l’hospitalisation pour IC. La FEVG s’est également nettement améliorée avec l’ablation (+8%, contre +0,02% avec la cardioversion).

Une analyse de sous-groupe de l’essai randomisé CABANA a porté sur les 1 197 patients avec FA souffrant d’IC majoritairement à fraction d’éjection préservée. Dans le bras ablation, le critère primaire associant décès, accident vasculaire cérébral (AVC) ischémique, hémorragie grave et arrêt cardiaque est retrouvé chez 39% à quatre ans, avec une différence proche de la significativité en comparaison avec traitement pharmacologique. La qualité de vie apparait améliorée de manière significative après ablation.

Une récente méta-analyse portant sur les études évaluant l’ablation chez les patients avec une FA et une IC avec FEVG < 35% (n=1 112), dont CABANA et CASTLE-AF, a confirmé le bénéfice de cette approche[2]. Après un suivi de trois ans en moyenne, l’ablation de la FA permet une amélioration des symptômes et de la FEVG (hausse moyenne de 6,8%), tandis que la mortalité, les hospitalisations et les AVC sont réduits de près de 50% chez ces patients avec FEVG altérée, en comparaison avec la cardioversion pharmacologique.

« L’amiodarone n’est probablement pas la meilleure stratégie pour maintenir le rythme sinusal chez les patients avec insuffisance cardiaque », surtout chez ceux ayant une fraction d’éjection altérée et symptomatique. Selon le Dr Mabo, le bénéfice de l’ablation de la FA par déconnexion des veines pulmonaires apparait désormais indiscutable dans un contexte de FEVG abaissée, si possible en réalisant l’opération au plus tôt.

 
L’amiodarone n’est probablement pas la meilleure stratégie pour maintenir le rythme sinusal chez les patients avec insuffisance cardiaque.
 

 

Suivez Medscape en français sur Twitter.

Suivez theheart.org | Medscape Cardiologie sur Twitter.

Inscrivez-vous aux newsletters de Medscape : sélectionnez vos choix

Commenter

3090D553-9492-4563-8681-AD288FA52ACE
Les commentaires peuvent être sujets à modération. Veuillez consulter les Conditions d'utilisation du forum.

Traitement....