Vienne, Autriche – Selon une nouvelle étude, écouter régulièrement de la musique en temps de crise peut améliorer considérablement l'humeur et soulager le stress.
Dans une étude de cohorte portant sur plus de 700 adultes, l'écoute de musique pendant la pandémie de Covid-19 a été « prospectivement associée » à des niveaux de stress passagers plus faibles, à une meilleure humeur et au calme – la musique perçue comme "joyeuse" était particulièrement bénéfique.
L'étude corrobore des recherches antérieures qui soulignent la valeur de la musique pour faire face à la détresse psychologique pendant le confinement Covid et fournit des preuves uniques d'un point de vue en temps réel, notent les chercheurs.
« Nous avons maintenant des données provenant de la vie réelle qui montrent que l'écoute de la musique peut être considérée comme un moyen bénéfique de gestion de l'humeur et de réduction du stress pendant une période de crise », a déclaré à Medscape Medical News, l'autrice principale de l'étude, Anja C. Feneberg, PhD, Département de psychologie clinique et de santé, Faculté de psychologie, Université de Vienne, Autriche.
Les résultats ont été publiés en ligne le 10 janvier dans JAMA Network Open.
Évaluations dans la vie réelle
Écouter de la musique est une stratégie d'adaptation peu coûteuse et facilement accessible pour faire face au stress, comme cela s'est produit pendant la pandémie de Covid-19, lorsque la distanciation sociale stricte et les ordres de rester à la maison étaient en vigueur, notent les chercheurs.
Des données antérieures ont suggéré que les gens se tournent vers la musique en temps de crise pour améliorer leur humeur et se sentir plus connectés socialement. Des recherches menées pendant la pandémie ont montré que l'écoute de la musique était associée à une diminution des symptômes dépressifs et de la détresse psychologique, ainsi qu'à une plus grande satisfaction de la vie.
Cependant, la plupart des études antérieures étaient transversales ou rétrospectives et étaient donc sujettes à des biais de rappel.
L'étude actuelle, qui s'inscrit dans le cadre d'un projet multidisciplinaire plus vaste a examiné l'effet des restrictions de l'isolement dû au Covid. La méthode de recherche utilisée implique un échantillonnage répété des sentiments, des comportements et des expériences des participants dans leur vie quotidienne et dans leur environnement naturel.
« Nous n'avons pas fait venir des individus au laboratoire, et nous ne leur avons pas simplement demandé de parler de leurs sentiments en général. Il s'agissait d'évaluations en temps réel, dans la vie réelle », a déclaré la chercheuse.
Stress passager et humeur du moment
L'étude, qui a porté sur 711 adultes en Autriche et en Italie, a été menée au moment où des mesures strictes de confinement ont été mises en place dans les deux pays en raison de la pandémie. L'âge médian des participants était de 27 ans, environ 70 % étaient des femmes et 68 % résidaient en Autriche.
Les participants à l'étude ont utilisé une application pour smartphone afin de signaler leurs niveaux d'humeur et de stress ainsi que leurs habitudes d'écoute musicale cinq fois par jour pendant sept jours consécutifs.
À chaque fois, ils ont été interrogés sur leur « stress passager » (« En ce moment, je me sens stressé »). Ils ont également fait état de leur « humeur du moment », qui mesurait trois dimensions fondamentales de l'humeur : la valence (malaise/bien-être ; mécontentement/contentement), l'éveil énergétique (fatigué/éveillé ; sans énergie/plein d'énergie) et le calme (agité/calme ; tendu/relaxé).
Pour l'humeur et le stress, les participants ont utilisé une échelle visuelle analogique allant de 0 à 100 par item. Les chercheurs ont contrôlé le sexe, l'âge, le lieu (Autriche ou Italie) et les symptômes dépressifs.
Perceptions de la musique
Les résultats ont montré que l'écoute de musique était associée à des niveaux de stress passagers plus faibles (β, -0,92 ; IC 95 %, -1,80 à -0,04 ; P = 0,04), ainsi qu'à une amélioration de la valence de l'humeur (β, 1,90 ; IC 95 %, 1,17 - 2,63 ; P < 0,001) et du calme (β, 1,39 ; IC 95 %, 0,60 - 2,17 ; P = 0,001).
Les participants ont également indiqué s'ils écoutaient délibérément de la musique, les caractéristiques de cette musique (triste, heureuse, énergisante) et la principale raison pour laquelle ils se tournaient vers la musique (relaxation, activation, distraction, réduction de l'ennui et aucune raison).
Les chercheurs étaient moins intéressés par les caractéristiques objectives de la musique, a noté la chercheuse. « Tout dépendait de la façon dont les participants percevaient la musique qu'ils écoutaient », a-t-elle précisé.
La musique « joyeuse », par exemple, peut avoir des tonalités et des paroles qui rendent les auditeurs plus « gais ou euphoriques », a-t-elle ajouté.
La musique jugée joyeuse semble avoir un impact particulièrement fort sur l'humeur, ce qui, selon Anja Feneberg, pourrait avoir une explication neurobiologique. « Les sentiments véhiculés par certaines musiques, comme la tristesse ou le bonheur, activent les zones du cerveau associées à la régulation de l'humeur », notamment l'amygdale et l'hippocampe.
La musique joyeuse pourrait également susciter des souvenirs positifs et agréables, a-t-elle ajouté.
À la fin de la période d'étude, les participants ont rempli un questionnaire en ligne concernant le stress chronique au cours des quatre semaines précédentes. Ceux qui présentaient des niveaux plus élevés de stress chronique ont signalé une amélioration de la valence de l'humeur après l'écoute de la musique (β, 0,12 ; IC à 95 %, 0,02 - 0,22 ; P = 0,02).
La chercheuse viennoise a déclaré que cela était quelque peu surprenant, car des études antérieures ont suggéré que les avantages associés à la musique pourraient être limités aux périodes de stress accru.
« Nous avons supposé que c'était également le cas ici et que les personnes moins stressées pouvaient en bénéficier davantage. Mais nous savons maintenant, grâce à notre étude et aux recherches générales qui ont été menées, que les personnes les plus stressées utilisaient davantage la musique et en tiraient plus de bénéfices », a-t-elle déclaré.
Ces nouveaux résultats pourraient encourager les cliniciens à interroger leurs patients sur leurs habitudes d'écoute de musique, a noté la chercheuse. Toutefois, elle a ajouté que l'écoute de la musique ne devrait jamais remplacer une thérapie pour les patients souffrant de dépression. « Elle peut être un élément d'un programme de thérapie multimodèle », a-t-elle ajouté.
Plusieurs limites
S'exprimant pour Medscape Medical News, la Dr Michelle B. Riba, professeure au département de psychiatrie de l'Université du Michigan, Ann Arbor, et ancienne présidente de l'American Psychiatric Association, a déclaré que l'étude s'ajoutait à la littérature existante mais présentait un certain nombre de limites.
D'une part, les participants ont travaillé avec les gestionnaires externes de l'étude, ce qui peut avoir affecté leur niveau d'isolement et leur humeur, a déclaré Michelle Riba, qui n'a pas été impliqué dans l'étude.
En outre, la population étudiée était principalement jeune, féminine, instruite et vraisemblablement blanche – « rien n’est indiqué sur la présence de représentants des minorités, ce qui est très problématique », a noté Michelle Riba.
L'étude n'a pas non plus fourni d'informations sur l'état de santé des participants ou sur leur niveau de stress avant la pandémie, a-t-elle ajouté. « Et nous ne savons rien de l'historique de leur humeur, de leur anxiété ».
En outre, elle a noté que, comme il s'agissait d'une étude de corrélation, elle ne peut pas déterminer la cause et l'effet. « J'ai donc été surprise qu'ils parlent de l'activation de l'hippocampe et de l'amygdale » en relation avec les sentiments véhiculés par la musique, a-t-elle dit.
Il sera peut-être possible à l'avenir de montrer que l'écoute de musique pendant des périodes de stress est bénéfique – « s'ils affinent certaines de leurs questions », a conclu la Dr Riba.
L'étude a été financée par l'Université de Vienne, le Fonds scientifique autrichien et la plate-forme de recherche universitaire "The Stress of Life (SOLE)-Processes and Mechanisms Underlying Everyday Life Stress". Feneberg et Riba n'ont signalé aucun lien d’intérêt financier pertinent.
L’article a été publié initialement sur Medscape.com sous l’intitulé Music Tied to Improved Mood, Less Stress During Times of Crisis. Traduit par Stéphanie Lavaud.
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Crédit image de Une : Dreamstime
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Citer cet article: Ecouter de la musique serait associé à une meilleure humeur et à moins de stress en période de crise - Medscape - 8 févr 2023.
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