Résistance aux antidépresseurs : bons résultats de l’eskétamine en vie réelle

Aude Lecrubier

Auteurs et déclarations

2 février 2023

Paris, France – L’analyse finale de l’étude française multicentrique ESKALE évaluant l’utilisation de l’esketamine par voie intranasale en vie réelle dans la dépression résistante a été présentée par le Dr Ludovic Samalin (Clermont Ferrand), auteur principal, lors du congrès de l’Encéphale 2023[1]. Elle confirme les bons résultats de la molécule dans la vraie vie.

157 patients atteints de dépression résistante

En tout, 157 patients dépressifs en échec thérapeutique ont été inclus dans l’étude entre le troisième trimestre 2019 et le troisième trimestre de 2021 et ont été suivis au moins 12 mois – qu’ils aient poursuivis ou non l’esketamine.

Concernant leur profil, 75 % avaient un diagnostic de dépression résistante sévère avec un nombre de lignes de traitements autour de 5 avant l’instauration de l’eskétamine. Par ailleurs, ils avaient déjà eu en moyenne 4 épisodes dépressifs, une durée de troubles dépressifs autour de 10 ans et pour 50 % d’entre eux, des passages à l’acte suicidaire.

« Il y avait peu de patients comorbides sur le plan des addictions et les dépressions étaient principalement de type anxieuses ou mélancoliques », précise l’intervenant.

Au total, près de 40 % des patients inclus avaient déjà bénéficié d’une stratégie de neurostimulation ECT ou rTMS. « Aussi, pour près de 60 % des patients n’ayant pas bénéficié de la neurostimulation, elle avait été proposée par le médecin. C’est souvent ce refus de l’ECT qui amenait le patient à recevoir de l’eskétamine », souligne le Dr Samalin.

Concernant l’administration, 78% des séances de traitement ont été réalisées dans le cadre d’une hospitalisation de jour. Aussi, la posologie recommandée à l’initiation chez l’adulte était « plutôt bien respectée », soit 56 mg avec une possibilité d’augmentation à 84 mg et 26 mg initialement chez le sujet de plus de 65 ans. Toutefois, « en vie réelle, on remarque un passage à 84 mg chez la plupart des patients qui bénéficient de l’eskétamine », souligne l’orateur.

Données d’efficacité

Dès le premier mois, 40 % des patients ont répondu au traitement et 20 % étaient rémission. « Les résultats sont rapidement encourageants, ce qui se confirme dans les mois qui suivent », note l’auteur de l’étude. A six mois, 58% des patients qui étaient restés dans l’étude étaient répondeurs et 36 % en rémission tandis qu’à un an 61% étaient répondeurs et 28 % étaient en rémission.

 
Parmi les 69 patients en arrêt maladie, 25% d’entre eux ont retrouvé une activité professionnelle au cours du traitement à l’eskétamine.
 

« En termes de facteurs prédictifs de réponse au traitement, nous en avons observé un déjà suspecté par le passé : la présence de troubles dissociatifs, notamment au début du traitement, entre J0 et J7. Cela peut être un marqueur intéressant pour la pratique clinique et aussi un moyen de rassurer les patients lorsqu’ils ont des troubles dissociatifs. C’est plutôt bon signe », souligne le psychiatre qui ajoute « on sait assez rapidement si on va poursuivre le traitement du fait des effets perçus par le patient ».

A noter que 65 % des patients en hospitalisation complète à l’initiation du traitement ont évolué vers une prise en charge en hospitalisation de jour au bout de 30 jours en médiane.

Aussi, parmi les 69 patients en arrêt maladie à l’initiation de l’eskétamine, 25% d’entre eux ont retrouvé une activité professionnelle au cours du traitement.

Arrêts de traitement

D’après l’analyse, 125 patients ont arrêté le traitement en cours d’étude. Sur les 92 patients avec une MADRS disponible au moment de l’arrêt définitif, 46 % étaient répondeurs (diminution d’au moins 50 % du score total MADRS) et 36 % étaient en rémission (MADRS ≤ 10 pendant au moins 2 administrations).

Aucun des patients en rémission après l’arrêt définitif de l’esketamine n’a eu de rechute avant la fin du suivi. « On est sur des traitements dont l’effet se prolonge dans le temps, même après arrêt du traitement », souligne le Dr Samalin.

Quelle tolérance ?

Concernant les effets indésirables, 84,7% des patients (n=133) en ont rapporté dont 74 % avaient une relation probable avec l’eskétamine.

13 % étaient d’intensité sévère, 43% d’intensité modérée et 74 % d’intensité faible.

A noter que 29 patients ont eu un effet indésirable grave.

Les principaux effets indésirables étaient pour 34,4 % des troubles dissociatifs, pour 15,9% de la somnolence, pour 15,9%  des vertiges, pour 14,4% de la sédation, dans 14% de l’anxiété et dans 14 % des cas une augmentation de la pression artérielle.

Dans 71% des cas, le premier effet indésirable est survenu dans les deux semaines suivant l’initiation du traitement mais le psychiatre précise que « la plupart des effets s’estompe dans les deux premières heures qui suivent l’administration d’eskétamine. Aussi, on pouvait s’attendre à ce qu’un effet revienne à chaque séance. Or, ce n’est pas le cas ».

En conclusion, des bénéfices cliniques ont été observés pour les patients sous traitement avec « des profils de réponse et de rémission intéressants à un mois et qui se confirment dans la durée », souligne le Dr Samalin avant d’ajouter qu’« il n’y a eu aucun nouveau signal de tolérance par rapport aux analyses intermédiaires précédentes ».

 

Le Dr Samalin a déclaré les liens d’intérêt suivants : Janssen, Otsuka/Lundbeck, Rovi, Sanofi.

 

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