Transcription
France __ Bonjour. Depuis que j’ai visité, adolescent et au siècle dernier, les États-Unis comme touriste, j’ai conçu une passion pour le football américain. Et il se trouve que cette semaine, j’ai besoin de vous parler de football américain et de cardiologie. Pourquoi ?
Parce qu’il y a quelques jours, lors d’un match qui opposait l’équipe de Cincinnati et l’équipe de Buffalo, un joueur de l’équipe de défense de Buffalo fait un plaquage, se relève, puis tombe, perd connaissance, devant l’ensemble du public et la télévision.
Il est rapidement entouré de ses coéquipiers et un massage cardiaque est immédiatement mis en œuvre, puis un choc électrique et des manœuvres de réanimation et il est transporté à l’hôpital d’où, fort heureusement, il sortira guéri quelques jours plus tard, sans séquelles.
Commotio cordis : qu’est-ce que c’est ?
Pourquoi est-ce que je vous parle de ça ? Parce que c’est un événement assez exemplaire de ce qu’on appelle la commotio cordis, donc commotion cardiaque.
Le terme latin existe depuis longtemps et a été bien décrit depuis des siècles, littéralement : la survenue brutale d’un choc violent et localisé sur la partie gauche du sternum, dans l’aire précordiale tel que peut le réaliser une balle de baseball, un palet de hockey, un coup de coude d’un sportif, notamment chez des sujets jeunes, enfants ou adolescents, dont l’épaisseur du thorax n’est pas suffisamment protectrice, est un élément qui déclenche des arrêts cardiaques dont le mécanisme est le plus souvent une fibrillation ventriculaire liée au choc brutal et à la dépression de la paroi thoracique qui survient en période vulnérable, c’est-à-dire pendant l’ascension de l’onde T à l’électrocardiogramme.
Ceci déclenche une fibrillation ventriculaire qu’il faut immédiatement réanimer par les manœuvres habituelles, c’est-à-dire massage cardiaque, choc électrique immédiat. Plus rarement, dans certains cas – et tout ceci a été étudié sur des modèles expérimentaux chez l’animal – il a été montré qu’un choc qui est contemporain du QRS peut déclencher un bloc auriculo-ventriculaire transitoire avec une bradycardie qui peut aussi être syncopale. Mais c’est moins fréquent et le mécanisme essentiel, c’est la fibrillation ventriculaire liée au choc en période vulnérable pendant l’ascension de l’onde T.
Alors, pourquoi est-ce que c’est important et intéressant ? D’abord, parce qu’il faut connaître cette circonstance qui peut survenir chez des enfants ou des adolescents sur un terrain de sport, mais qui peut aussi survenir dans la vie quotidienne, à l’école, lors d’une bagarre entre enfants ou collégiens qui se donnent un coup de coude et, manque de chance, ça tombe au mauvais moment.
C’est une affection qui est très grave, puisque la survie est de l’ordre de 25 %. C’est évidemment toujours quelque chose de dramatique, d’autant que ça peut survenir au foyer, et que peut-on faire ?
Reconnaître et traiter la commotion le plus rapidement possible
Évidemment, connaître cette affection, la reconnaître et mettre en œuvre immédiatement les mesures de la chaîne de survie, c’est-à-dire massage cardiaque immédiat et accès le plus rapide possible à un défibrillateur automatique externe, si possible, qui devrait être présent dans au moins tous les terrains de sport où les sports à risque sont pratiqués, et probablement dans les endroits scolaires où un risque de choc brutal existe.
Il est particulièrement intéressant d’évoquer l’impact que cet accident de football américain a eu, puisqu’on peut dire qu’aux États-Unis l’ensemble du grand public a vu la vidéo, assisté à cette perte de connaissance et suivi avec angoisse pendant un ou deux jours les progrès de la réanimation de ce joueur qui, fort heureusement, est sorti de l’hôpital et rentré chez lui.
Et, donc, l’ensemble du grand public a entendu parler de la commotio cordis, mais a surtout vu que la mise en œuvre prompte et efficace de la réanimation cardiopulmonaire de base avec le massage cardiaque externe et très rapidement la défibrillation avaient sauvé la vie de ce joueur.
Un progrès dans la chaîne de survie du patient
On peut penser que ce simple événement télévisuel aura fait plus progresser la cause de la chaîne de survie que beaucoup de campagnes et des années d’efforts des cardiologues, des urgentistes, des réanimateurs et de tous ceux qui s’intéressent à ces pathologies.
Je pense qu’il est essentiel que les professionnels de santé se saisissent de ces circonstances pour diffuser l’information, encourager à l’apprentissage de la réanimation cardiorespiratoire de base et œuvrer à la généralisation de l’implantation de défibrillateurs automatiques externes dans tous les lieux où les sujets, notamment des enfants et des adolescents, peuvent être exposés – évidemment les stades, les gymnases, les établissements scolaires – de façon à ce que le territoire, au moins dans les régions les plus peuplées, les plus urbaines, soit, dans la mesure du possible, quadrillé par un réseau de défibrillateurs.
Il est important qu’on puisse, en urgence, trouver ces défibrillateurs, et vous savez qu’il y a maintenant des applications qui permettent de le faire.
Donc voilà, un accident survenu pendant un match de football américain se traduit par, je pense, un progrès substantiel de la réanimation cardiorespiratoire et de la mise en place de la chaîne de survie aux États-Unis. Il faut s’en féliciter et espérer qu’il ne sera pas nécessaire que des événements aussi dramatiques se produisent également en France – et il s’en produit, en fait, assez régulièrement dans tous les pays. Il est important de se mobiliser pour prévenir et éventuellement traiter la survenue d’une commotio cordis.
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Citer cet article: Commotio cordis ou commotion cardiaque : savoir la reconnaître - Medscape - 31 janv 2023.
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