Étude de cas : enfant de 1 an avec hématomes d’origine inexpliquée

Dr Thomas Kron

Auteurs et déclarations

24 janvier 2023

Présentation

Une mère et son fils de 12 mois viennent en consultation pour une « vague d'infections ». Le garçon tousse depuis trois jours, a une température légèrement élevée et des symptômes de rhume. Il a en outre moins d'appétit et depuis quelques temps une éruption cutanée sur le ventre ; à part cela, l'enfant n'a rien de particulier, rapporte la mère au pédiatre. [1]

Examen

L’enfant est joyeux, tous les membres sont libres de bouger, il est assis droit. Il n’a pas de fièvre. Les poumons, abdomen et bruits intestinaux sont sans particularité ; pas de souffle cardiaque typique du vitium, neurologiquement sans particularité.

Il présente une eupnée et une rhinite sèche. Le statut vaccinal est à jour, y compris pour le méningocoque B. Les ganglions lymphatiques sous-mandibulaires sont palpables des deux côtés.

On note un hématome oblique d'environ 3 cm de long et relativement large sur le front. Il y a une bonne turgescence de la peau, la peau du visage est propre, à l'exception de quelques minuscules pétéchies rouge clair. Sur la peau du ventre, il y a un érythème et des pétéchies multiples et minuscules. Le pharynx est légèrement rougi, autrement sans particularité.

Le pédiatre retrouve des hématomes prétibiaux d'âges différents sur les membres inférieurs. La mère explique les bleus par le fait que son fils marche déjà librement, mais qu'il rampe encore très vite et qu'il se cogne souvent. Il était également tombé sur la tête deux jours plus tôt, « comme vous pouvez le voir, et il avait un peu de sang sur son mouchoir en se mouchant hier. » Le saignement de nez avait duré environ dix minutes.

Devant des hématomes pour lesquels il ne semble pas y avoir d'explication compréhensible, le soupçon de maltraitance pourrait s’imposer rapidement. Il ne devrait en aucun cas être exprimé à la hâte. Le pédiatre demande donc des analyses de laboratoires, dont les résultats sont le suivants : dosage CRP négatif, thrombocytopénie notable (2000/μl).

Diagnostic et prise en charge

Le diagnostic suspecté est celui de purpura thrombocytopénique idiopathique (PTI).

Sur la base de cette suspicion, le pédiatre fait hospitaliser l'enfant. Le garçon reçoit de la prednisone par voie orale comme traitement de première ligne (4 mg/kg/j une fois par jour pendant 4 jours, puis réduction de la dose à 1 mg/kg/j pendant 14 jours). Sous ce traitement, les plaquettes sont montées à 40 000/μl, l'enfant a pu quitter la clinique pour poursuivre les soins ambulatoires à domicile.

Discussion

L'immuno-thrombocytopénie est une maladie sanguine rare qui se caractérise par un manque de plaquettes dû à un dysfonctionnement du système immunitaire. L'incidence serait d'environ 1:100.000-4:100.000 chez les enfants et 6:100.000 chez les adultes. Elle est souvent – mais pas toujours – autolimitée chez les enfants.

Dans le cas d'un enfant atteint, il est très important de conseiller les parents. Les aspects suivants devraient être pris en compte : [1]

  • 90% des enfants présentent une rémission spontanée dans les 12 mois. Le passage à un PTI chronique se produit dans environ 10 % des cas, avec une majorité d'enfants qui ne saignent pas ou peu.

  • Les hémorragies graves sont généralement rares. Les facteurs de risque associés à la survenue d'hémorragies graves sont, entre autres, les saignements des muqueuses, les traumatismes, ainsi que les infections fébriles.

  • Si le taux de plaquettes est bas, il ne faut pas prendre ou administrer d'inhibiteurs de l'agrégation plaquettaire.

  • La fréquentation d’une crèche ou de l'école est généralement possible. Il convient en outre d'indiquer que l'enfant peut exercer une activité quotidienne normale. Les éducateurs ou les enseignants doivent être avertis du risque accru d'hémorragie et des mesures à prendre en cas de blessure par le biais d'un courrier d'information.

  • Il convient de renoncer aux sports de contact et aux sports présentant un risque accru de traumatisme crânien.

Un diagnostic différentiel important chez les enfants présentant plusieurs hématomes sur le corps est la maltraitance infantile. Souvent, il n'y a au départ qu'un « mauvais pressentiment ». Il faut rappeler que dans les pays à hauts revenus comme la France, 10 % des enfants seraient victimes de maltraitance. Les pédiatres sont généralement les seules personnes en contact avec les familles à risque. Il est donc important de savoir distinguer les troubles de la coagulation, de la maltraitance (voir les nouvelles recommandations de l’AAP).

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