Femmes homosexuelles, hommes transgenres, femmes sans sexualité : dépistez le cancer col de l'utérus !

Marine Cygler

Auteurs et déclarations

18 janvier 2023

Montrouge, France – Qu'on soit une femme cisgenre ou un homme transgenre ayant conservé son utérus, et quel que soit le sexe du partenaire, et même si on est une femme qui n'a plus de relation sexuelle, il faut participer au dépistage du cancer du col de l'utérus. C'est ce qu'a rappelé la Dr Julia Maruani (gynécologue médicale, Marseille) lors d’une conférence de presse en amont du 46ème congrès  de la Société Française de Colposcopie et de Pathologie Cervico-Vaginale (SFCPCV) qui s'est tenu les 13 et 14 janvier à Montrouge.

Aujourd'hui, ce dépistage concerne les femmes de 25 à 65 ans asymptomatiques, immunocompétentes et ayant déjà eu des relations sexuelles. Dans sa présentation, la spécialiste a insisté sur le fait qu'il ne fallait pas faire de différences dans le dépistage en fonction de la sexualité. Explications.

Cas des femmes ayant des relations sexuelles avec des femmes

Une idée reçue largement répandue pointe les seuls hommes comme transmetteurs de l'HPV. « Si vous avez des rapports sexuels avec des hommes, c'est le cas : l'homme transmet le HPV. Mais c'est aussi possible lors de relations sexuelles entre femmes par une transmission manuportée, de contact ou via les sextoys », commence Julia Maruani qui indique que 20 % des femmes homosexuelles sont porteuses d'HPV et que cette proportion est de 30% en cas de bisexualité.

Parce que les femmes ayant des relations sexuelles avec les femmes ont l'idée, fausse, qu'elles sont moins concernées, elles participent moins au dépistage du cancer du col de l'utérus. Aussi, elles présentent davantage de lésions avancées et de cancer à cause de l'insuffisance de dépistage.

Cas des hommes transgenres

Julia Maruani définit les hommes transgenres comme « des femmes qui ont changé de sexe et qui sont devenues des hommes ». Pourquoi sont-ils concernés par le dépistage du col de l'utérus ? Tous ne le sont pas : ceux dont l'utérus a été ôté n'ont plus de col de l'utérus donc ne sont pas concernés par le dépistage. Mais l'hystérectomie est dans les faits peu réalisée car elle n'est pas requise dans la majorité des pays européens pour le changement d'identité civile.

Les chiffres sont inquiétants : 27 % des hommes transgenres sont dépistés, contre 60 % des femmes cis.

« Pour cette population, c'est difficile de se rendre dans un cabinet de consultation gynécologique : ce n'est pas facile d'être dans une salle d'attente féminine » constate-t-elle rappelant que souvent la phase de transition occupe toute la discussion médicale. Aussi tout problème de santé et de prévention sans lien avec la transition n'est généralement pas abordé.

En outre, les hommes transgenres ayant conservé leur col de l'utérus ont une identité civile masculine et les plateformes de prise de rdv en ligne n'autorisent pas les hommes à prendre rdv. « Il faut que le gynécologue désactive cette option installée par défaut », conseille Julia Maruani.

De même, les hommes transgenres ne reçoivent pas d'invitation au dépistage du cancer du col ni à celui du sein puisqu'identifiés comme des hommes par la sécurité sociale et les centres de dépistage. En outre, « casse-tête administratif qui devrait évoluer», certains actes ne sont pas remboursés chez les hommes.

 
Pour cette population, c'est difficile de se rendre dans un cabinet de consultation gynécologique : ce n'est pas facile d'être dans une salle d'attente féminine.
 

Or, le risque de contracter l'HPV est plus élevé que dans le reste de la population avec une sexualité qui peut être marquée par des partenaires multiples et des pratiques différentes. Le risque d'anomalies par le dépistage cytologique est plus important.

Même si les données manquent sur le cancer, « si le dépistage est insuffisant et l'infection par HPV importante, la logique serait qu'il y ait plus de lésions, plus de cancers », considère-t-elle.

Cas des femmes qui n'ont pas de sexualité

Aujourd'hui, le dépistage chute avec l'âge des femmes, surtout à partir de la ménopause et d'autant plus quand il n'y a plus de sexualité. Encore une idée reçue à battre en brèche : celle qui voudrait qu'à l'arrêt des rapports sexuels, le dépistage ne serait plus nécessaire. Mais c'est ignorer l'histoire naturelle de l'infection à l'HPV : « il faut des années, au moins cinq ans, entre l'infection et le développement de lésions précancéreuses. Entre une lésion précancéreuse et un cancer, il faut encore cinq ans », rappelle la Dr Maruani.

C'est pourquoi même vingt ans après avoir attrapé l'HPV, une femme reste à risque. Pour mémoire, 80 % des femmes sont exposées à l'HPV et 5 à 10 % ont une infection persistante qui peut mener au développement de lésions précancéreuses.

« Donc une femme qui n'a plus de rapport sexuel ne peut pas s'arrêter de participer dépistage du cancer du col d'autant qu'il n'y a aucun symptôme jusqu'à un stade de cancer assez avancé ». L'arrêt de la sexualité ne signifie donc pas l'arrêt du dépistage.

 
Donc une femme qui n'a plus de rapport sexuel ne peut pas s'arrêter de participer dépistage du cancer du col.
 

 

Quelle prise en charge pour le ou la partenaire ?

Aucune. A l'occasion de la conférence de presse, les différents spécialistes ont convenu que la question du partenaire était importante pour les patientes dont le test HPV est positif. Pour autant, ils ont rappelé que la contamination était généralement ancienne et que le/la partenaire avait donc probablement déjà été exposé/e. En outre, il faut rappeler aux patientes qu'auparavant, l'analyse cytologique ne recherchait pas le virus, lequel était peut-être déjà là. Pour les orateurs, il ne faut rien changer à ses habitudes sexuelles mais continuer la surveillance.

 

Suivez Medscape en français sur Twitter.

Suivez theheart.org | Medscape Cardiologie sur Twitter.

Inscrivez-vous aux newsletters de Medscape : sélectionnez vos choix

 

Commenter

3090D553-9492-4563-8681-AD288FA52ACE
Les commentaires peuvent être sujets à modération. Veuillez consulter les Conditions d'utilisation du forum.

Traitement....