Quelle devrait être la prise en charge devant un prurit massif d’origine indéterminée? Selon des médecins allemands qui rapportent le cas typique d'un patient avec des démangeaisons extrêmes, le traitement par naloxone i.v. peut constituer une option rapide et efficace. [1]
Présentation
Un homme de 59 ans s'est présenté aux urgences en août 2021 pour de fortes démangeaisons sans altérations cutanées. Il dit souffrir de prurit extrême depuis moins de six semaines.
Il a comme antécédent une laparotomie effectuée 20 ans plus tôt. Une herniotomie et une hernioplastie avaient été réalisées une semaine auparavant dans un autre hôpital en raison d'une hernie cicatricielle douloureuse.
Il recevait de la quétiapine, de la venlafaxine et de l'olanzapine contre un trouble bipolaire de longue date. L'anamnèse tierce a relevé un abus de drogues dans le passé (pas actuellement), et une allergie connue à la pénicilline.
Avant la présentation à la clinique en raison du prurit, un traitement par prednisolone p.o. avait été tenté. Lors de la présentation, le patient avait pris 6 à 8 comprimés d'hydroxyzine (25 mg) par jour, mais cela n'avait que peu soulagé le prurit présent sur tout le corps.
Résultats cliniques et diagnostic
L’examen de la peau est sans particularité (à l'exception de la cicatrice de l'opération), seulement de petites traces de griffures.
Selon les auteurs, l'examen neurologique n'a révélé aucun indice d'une cause neurologique. L'examen psychiatrique a diagnostiqué une manie dans le cadre d'un trouble bipolaire. Un ajustement de la médication psychotrope a été recommandé. De plus, un traitement au lithium a été mis en place.
Les données de laboratoire sont normales (bilan hépatique, rénal, thyroïdien, NFS, protéines totales, HbA1c, bilirubine, acide urique, lipase, ferritine, transferrine, calcium, phosphate et LDH, test urinaire).
La sérologie de l'hépatite et du VIH est sans indication d'une infection aiguë ou chronique.
Le diagnostic clinique posé est un prurit aigu sur une peau primitivement inchangée d'origine indéterminée.
Traitement et évolution
Pour interrompre le prurit sévère, les dermatologues ont administré en une seule fois de la prednisolone 80 mg p.o. et de la clémastine (10 mg sur 24 h en pousse-seringue). Des agents externes rafraîchissants ont été appliqués en complément. En l'absence de réduction complète du prurit, les médecins ont mis fin au traitement par antihistaminiques (clémastine et hydroxyzine) et stéroïdes. Ils ont alors mis en place un traitement intraveineux par naloxone à 0,4 mg par jour pendant 4 heures sur 5 journées consécutives. Cela a permis une nette réduction du prurit dès la première administration. Une fois le traitement terminé, le patient a pu quitter l'hôpital sans aucune démangeaison.
Discussion
En cas de prurit sur une peau primitivement non modifiée, il faut, selon Katharina C. Jäger et ses collègues [1], examiner en premier lieu les maladies internes, neurologiques et psychiatriques, ainsi que les médicaments comme facteurs déclenchants. Dans le cas de l'homme de 59 ans, la cause n'est pas claire ; on pouvait suspecter un trouble métabolique passager, éventuellement dans le cadre de l'opération récente, dans un contexte d'automédication contre le trouble bipolaire ou de consommation de drogues. L'administration d'hydroxyéthylamidon pendant l'anesthésie comme déclencheur possible du prurit avait été exclue, de même qu'une infection par le VIH ; une cause néphrogénique ou hépatique n'a pas été démontrée. Le traitement continu par psychotropes est peu probable comme cause du prurit aigu, car ils sont plutôt considérés comme responsables du prurit chronique.
Le traitement systémique par naloxone a été immédiatement efficace. L'antagoniste non sélectif des récepteurs opioïdes μ a été utilisé hors AMM dans le traitement du prurit. La naltrexone administrée par voie orale réduit notamment la sensation de démangeaison chez les patients souffrant de prurit chronique. Selon les dermatologues, le lien entre les récepteurs opioïdes μ et le prurit n'a pas encore été définitivement établi. Il a toutefois été démontré qu'une activation du récepteur déclenche souvent des démangeaisons et qu'une inhibition atténue les symptômes. [1]
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Source : Dreamstime
Medscape © 2023
Citer cet article: Étude de cas : prurit extrême d'origine indéterminée - Medscape - 11 janv 2023.
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