Paris, France – Six mois après sa prise de fonction, le nouveau directeur de l’Assistance-publique Hôpitaux de Paris (AP-HP) a rendu public son plan d’actions afin d’améliorer l’attractivité du plus grand hôpital de France. Au total, ce sont 30 leviers que Nicolas Revel propose d’activer pour sortir l’AP-HP de la crise.
« Attirer et recruter, mais par-dessus tout, donner envie de rester à l’AP-HP». Voilà l’enjeu prioritaire que le nouveau directeur général du premier hôpital de France, Nicolas Revel, s’est fixé dans le plan d’actions qu’il vient de rendre public, six mois après avoir succédé à Martin Hirsch.
En préambule de ce cette feuille de route de 80 pages, l’ancien directeur de la Cnam affiche son intention de « retrouver un fonctionnement plus serein, pour améliorer la qualité de vie au travail et retrouver de meilleures capacités d’hospitalisation, dans des conditions compatibles avec nos équilibres internes » .
Vaste défi à l’heure où de nombreux soignants quittent le navire, où 16% des lits sont fermés (2000 au total, deux fois plus qu’en 2019) et alors que les comptes de l’hôpital sont dans le rouge avec un déficit excédant les 200 millions d’euros.
Nicolas Revel avait annoncé il y a trois semaines un « plan d’actions très précis avec des mesures à appliquer dans l’année ». Voici donc ces trente leviers qui reprennent en grande parties les pistes déjà exposées en septembre.
Recruter davantage et intégrer mieux
Pour enrayer la spirale de départs de soignants des derniers mois (2 800 départs d’infirmières en 2022 pour 2 200 recrutements), le DG de l’AP-HP ambitionne de lancer une vaste campagne d’embauche de 2 700 infirmières par an en 2023 et 2024. Et de tout faire pour qu’elles restent !
Une vaste campagne de communication sera menée pour appuyer le recrutement qui concernera aussi les manipulateurs radio, les sages-femmes, les kinés, les aides-soignants…
Pour que les prises de postes soient réussies, l’accent sera mis sur l’accompagnement des jeunes professionnels, avec des contrats d’allocations d’études (CAE) pouvant être majorés dès la 2e année d’école et un doublement du nombre de logements (de 600 à 1200) pour les métiers en tension.
Les nouvelles recrues seront mieux accueillies (session d’accueil, remise des identifiants informatiques et tenues le jour d’arrivée…). Un parcours sera mis en place pour faciliter la prise de poste et l’intégration.
A partir de mars 2023, les professionnels expérimentés qui s’engagent à encadrer un ou plusieurs stagiaires pourront bénéficier d’une prime de tutorat de 172 euros net par mois.
Ayant identifié que l’une des raisons au malaise des infirmières était l’absence de perspective d’évolution professionnelle, la direction de l’AP-HP veut « offrir des parcours plus riches ». Elle va ouvrir 600 nouvelles promotions professionnelles dans les deux prochaines années (pour un coût annuel de 60 millions d’euros).
Lors d’une récente intervention, Nicolas Revel avait évoqué l’hypothèse de créer des « postes d’infirmier de coordination » qui permettraient d’offrir des perspectives de carrière et de fidéliser les soignants de l’AP-HP.
L’AP-HP s’engage également à appliquer l’égalité salariale entre les femmes (qui représentent 80% des paramédicaux, 56% des médecins) et les hommes. L’objectif est d’augmenter le nombre de femmes en responsabilité au sein des 38 établissements de l’AP.
Adapter le planning horaire
L’amélioration des conditions de travail constitue aussi un enjeu important pour renforcer l’attractivité de l’AP-HP. A ce jour, les vacances de postes auxquelles s’ajoute un fort absentéisme compliquent l’organisation des équipes.
« Notre capacité à recruter et à fidéliser nos personnels dépendra pour beaucoup de notre capacité à leur permettre de mieux concilier leurs vies professionnelle et personnelle » ; affirme la direction de l’AP-HP.
Au-delà de l’offre de logements qui sera doublé, l’AP-HP entend offrir son soutien aux parents en leur donnant accès aux solutions de garde d’enfants avec une attention particulière aux parents isolés ou à ceux ayant des enfants en situation de handicap.
Une enquête sera menée sur le travail de nuit pour identifier les critères qui pourraient en renforcer l’attractivité (tickets restaurant supplémentaires, prise en charge des titres de transport à 100%, priorité à l’accès à un logement du parc de l’AP-HP).
L’AP-HP veut donner aux équipes le choix de leur organisation horaires. « Aujourd’hui, 80% de nos agents travaillent 7H30 par jour et donc toute la semaine, a précisé Nicolas Revel au micro de France Inter. Il y a une aspiration qui est très forte de faire un peu plus d’heures par jour et de ne pas venir tous les jours. Il faut entendre cela et adapter les organisations. »
L’AP-HP va permettre à ses 800 services de choisir leur ventilation horaires selon le schéma qui leur correspond le mieux. Un appel à projets sera lancé en février 2023 pour accompagner quarante services qui expérimenteront de nouveaux rythmes (avec un audit début 2023).
Du support pour regagner du temps de soin
L’objectif final est de stabiliser les plannings afin d’éviter les demandes de remplacement de dernière minutes responsables d’épuisement des soignants.
Les heures supplémentaires seront toujours nécessaires mais l’AP-HP souhaite établir des plannings plus visibles à l’avance et renforcer les équipes de suppléance avec des heures sup majorées de 50% pour les infirmiers, manipulateurs radio et kinés, métiers en grande tension.
L’attractivité du métier de cadre fera quant à lui l’objet d’un plan d’actions spécifique en février 2023 avec l’ambition de les libérer notamment des tâches les plus chronophages, et de mieux les accompagner dans leur binôme avec les chefs de service.
Toujours dans l’optique d’améliorer les conditions de travail et de redonner aux personnels du temps pour soigner, les équipes de fonctions support seront renforcées avec l’objectif de 600 postes créés en deux ans pour répondre aux besoins de soutien administratif, logistique et technique.
Le support informatique sera aussi l’objet d’un effort particulier (avec un numéro unique à l’AP-HP) pour réduire les délais d’intervention et les postes ordinateurs obsolètes seront remplacés.
Rouvrir les lits et les blocs
Avec ce plan, l’AP-HP ambitionne de renforcer ses effectifs, rouvrir des lits mais aussi de retrouver rapidement un meilleur fonctionnement de ses blocs opératoires dont 20% seraient actuellement fermés !
Un plan pour fidéliser les Ibode est en cours. Nicolas Revel souhaite que les services, DMU et les directions établissent une « trajectoire de réouverture progressive de l’offre de soins en 2023 et 2024 ». Il demande notamment que des solutions soient trouvées pour la prise en charge des patients les plus complexes.
La réussite de ce plan implique la mobilisation de tous […], conclut le DG de l’AP-HP. Elle suppose de sortir de la spirale du découragement qui nous empêche de repartir de l’avant. »
A France Inter, l’ancien conseiller de Jean Castex à Matignon a reconnu qu’un retour à la normale et à l’équilibre ne s’effectuerait pas en un jour : « Recruter du personnel, rouvrir des lits va demander un peu de temps, reconnaît Nicolas Revel. J’ai discuté avec le ministère une trajectoire qui nous amènera à retrouver notre équilibre économique à un horizon de cinq ans. »
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Crédit de Une : Dreamstime
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Citer cet article: Le plan de l’AP-HP pour recruter 5 400 infirmières en deux ans...et les garder - Medscape - 20 déc 2022.
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