Paris, France — A l'occasion des JNMG 2022, les Drs Laurence Slama (service des maladies infectieuses et tropicales, hôpital Hôtel-Dieu, Paris) et Johan Chanal (service de dermatologie et vénéréologie, hôpital Cochin, Paris) ont fait le point sur l'infection par la VIH en termes de dépistage et de prévention.
En 2020, en France, 4 856 personnes ont découvert leur infection par le VIH (virus de l’immunodéficience humaine), dont 69 % d’hommes, 30 % de femmes et 1 % de transsexuels. Ce nombre est en baisse de 22 % par rapport à 2019, mais beaucoup de gens ont renoncé à se faire dépister pendant l’épidémie de Covid. Le taux de découverte est plus important en Île-de-France que dans le reste de la métropole, avec 43 % d’HSH (hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes), 38 % d’hétérosexuels nés à l’étranger et 16 % d’hétérosexuels nés en France. [1]
Le dépistage
L’intérêt du dépistage est à la fois individuel et collectif. Le traitement précoce réduit la morbidité et la mortalité, avec une espérance de vie comparable à celle de la population générale. Au bout de six mois, la charge virale d’un patient sous le seuil détectable fait que ce patient ne transmet plus la maladie (TasP – Treatment as Prevention), autorisant donc des relations sexuelles sans préservatif. Le traitement précoce prévient les infections opportunistes. Le dépistage est aussi l’occasion de mettre à jour les vaccins, notamment contre les hépatites A et B, le papillomavirus et la monkeypox, et de dépister les autres maladies sexuellement transmissibles. Enfin, le dialogue avec les patients réduit leurs comportements à risque.
Cependant, on estime qu’environ 30 000 personnes ignorent leur statut par rapport au VIH (dont 10 000 ont été dépistées, mais ne sont pas suivies) et sont donc susceptibles de contaminer leur(s) partenaire(s). En 2020, environ 1 500 personnes l’ont découvert à un stade tardif de la maladie. Dans une étude publiée en 2013, mais qui reste d’actualité, 99 % des patients nouvellement diagnostiqués VIH+ avaient eu recours à une structure de soins dans les trois ans précédents, dont 93 % chez un généraliste (entre autres), 89 % le consultant au moins une fois par an : les marges de progrès sont donc considérables.
Pour la Haute Autorité de santé (HAS), tout le monde doit être dépisté au moins une fois dans sa vie. Certaines situations doivent proposer le dépistage : suspicion d’infection sexuellement transmissible (IST), d’hépatite B ou C, de tuberculose, femmes ayant un projet de grossesse, demandant une IVG (interruption volontaire de grossesse) ou une contraception, femmes victimes de viol, personnes incarcérées et en cas d’accident d’exposition sexuel ou professionnel.
Le dépistage doit être régulier pour certaines populations (annuel, parfois même trimestriel) : les HSH, les hétérosexuels ayant plus d’un partenaire par an, les utilisateurs d’injections intraveineuses (toxicomanes), les personnes originaires de zones à forte prévalence de VIH (Afrique sub-saharienne, Caraïbes), celles en situation de prostitution et celles dont le partenaire est VIH+.
Pour mémoire, le consentement préalable au dépistage est nécessaire. La sexualité doit être abordée (ça ne prend pas beaucoup de temps et c’est très efficace), ainsi que la gestion des situations à risque (prise d’alcool ou d’autres drogues).
Le test de dépistage disponible est le test Elisa de 4ème génération, qui détecte aussi l’antigène P24, et doit être confirmé par un Western Blot. Un Test Rapide d’Orientation Diagnotic (TROD) existe. Il s’agit d’un bon test, rapide, mais il n’élimine pas une contamination datant de moins de trois mois.
La prévention diversifiée
La prévention passe d’abord par l’usage du préservatif, qui reste incontournable et dont il faut absolument faire la promotion.
Le traitement est en soi un moyen de prévention très efficace pour les partenaires (TasP), si une charge virale indétectable est obtenue. Pour la personne elle-même, il existe trois méthodes de prévention par les antirétroviraux :
La prévention de la transmission de la mère à l’enfant (PTME) traitement de la mère pour obtenir une charge virale indétectable et traitement post-exposition à l’enfant.
Le traitement post-exposition (dans les 2 à 24 heures après l’exposition), avec une trithérapie. Il faut faire des soins locaux (nettoyage de la plaie, rinçage au sérum physiologique ou à l’eau de la muqueuse) et proposer le dépistage au patient « source ».
La PrEP (prophylaxie pré-exposition), pour toute personne potentiellement exposée, avec une approche individualisée (notamment, s’assurer que le patient n’est pas positif). Tout médecin peut faire la première prescription (voir formaprep.org pour une éventuelle formation), qui nécessite un bilan minimum. Le traitement consiste en deux comprimés le premier jour puis un par jour (emtricitabine-ténofovir), la durée dépendant de celle de la période d’activité sexuelle. La PreP à la demande est possible pour les hommes : deux comprimés 2 à 24 heures avant les rapports sexuels puis un comprimé 24 et 48 heures plus tard.
Cet article a initialement été publié sur Univadis.fr, membre du réseau Medscape
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Crédit de Une : Dreamstime
Citer cet article: VIH : dépistage et prévention en 2022 - Medscape - 1er déc 2022.
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