France / Avec actualisation du 30/11/22 — Le Pr Emile Daraï, ancien chef de service gynécologique-obstétrique et médecine de la reproduction à l’hôpital Tenon, spécialiste de l’endométriose, a été mis en examen jeudi 24 novembre pour «violences volontaires» par personne chargée d’une mission de service public sur 32 femmes, selon l’AFP et Franceinfo .
Le gynécologue a été placé sous contrôle judiciaire avec interdiction de contact avec les victimes et de tenir des consultations privées de gynécologie. Il pourra néanmoins poursuivre ses consultations à l'hôpital public, a précisé l'AP-HP (voir encadré en fin d'article).
En septembre 2021, le Pr Daraï avait été mis en cause par au moins 14 plaintes au pénal pour viol, viol sur mineur, viol en réunion.
Le 3 janvier 2022, une information judiciaire avait été ouverte pour violences par personne chargée d’une mission de service public.
Le gynécologue avait été définitivement mis en retrait de ses responsabilités de chef de service et de responsable pédagogique par la direction de l'APHP fin 2021 suite à la remise d’un rapport de l'APHP le 9 décembre 2021 mais il pouvait encore exercer dans le privé.
Lors de son enquête, la commission d’enquête de l’AP-HP avait procédé à 41 auditions individuelles ou collectives entre le 1er octobre et le 19 novembre 2021 avec pour verdict : A la lumière des différents témoignages contre le Pr Daraï, la commission avait estimé que « l’obligation d’information de ces patientes, le soulagement de leur douleur, le respect de leurs volontés n’ont pas été respectées».
On peut lire dans ce rapport que « sous l'impulsion du Pr Daraï, qui a pris la suite du Pr Uzan, le service de gynécologie de Tenon est devenu un des plus reconnus en France pour la prise en charge de l'endométriose et des cancers gynécologiques ».
Mais, des témoignages de patientes décrivent un toucher rectal réalisé dans le cadre de la consultation de l’endométriose comme « très violent ». Trois témoins utilisent le mot « viol » pour qualifier les soins non consentis infligés par le Pr Daraï.
La commission d'enquête de l'APHP a également recueilli des témoignages de patientes à décharge, une cinquantaine, lesquelles « expliquent l'importance de leur rencontre avec lui (le Pr Daraï, NDLR), en ce qui concerne le diagnostic, la qualité de la prise en charge, et pour certaines leur grand soulagement d'avoir été opérée ou d'avoir pu avoir un ou plusieurs enfants. Dans leur très grande majorité, elles soulignent, au-delà de son professionnalisme, son écoute, sa bienveillance, son côté humain et la confiance qu'il leur a inspiré ».
Du côté des étudiants, il est ressorti de l'audition de 20 externes que les consultations avec le Pr Daraï étaient jugées dures voire « violentes » et que cela était « notoire ». Les internes quant à eux ont loué la formation dispensée par le Pr Daraï, même si certains ont reconnu que la réalisation des examens pouvait « parfois sembler brutale ».
Dans ce rapport, globalement, le Pr Daraï a été défendu par ses pairs.
Après la remise de ce rapport, l'APHP a décidé d'afficher une charte des bonnes pratiques dans l'ensemble des services de gynécologie-obstétrique, de renforcer le traitement des réclamations, d'apporter une formation managériale aux futurs chefs de service.
Les médecins spécialistes de la santé des femmes se sont aussi saisis à bras le corps de la question des violences gynécologiques. Le collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) associé à 5 autres sociétés savantes a publié une charte de la consultation en gynécologie ou en obstétrique dès octobre 2021.
Un an plus tard, la question continue d’occuper la profession. Lors d’une session du dernier congrès Infogyn, une session dédiée aux violences gynécologiques a fait le point sur les bonnes pratiques en gynécologie-obstétrique au cours de laquelle, le Pr Israël Nisand (hôpital américain de Paris), a donné quelques recommandations pour contribuer au bien-être des patientes et éviter les poursuites judiciaires.
Le Pr Daraï pourra poursuivre ses consultations à l'hôpital Tenon
Dans un communiqué en date du 28 novembre, l'AH-HP a réagi en précisant que si le Pr Daraï n'était plus en mesure d'exercer sa chefferie de service et d'assumer ses responsabilité pédégogique — par décision du 7 octobre 2021 — les « conditions d'organisation de ses consultations » (sous-entendu à l'hôpital Tenon) avaient été « revues ». Comprendre « un personnel soignant est présent lors des consultations et le consentement des patientes est recueilli et tracé avant la réalisation des actes réalisés au cours des consultations, comme préconisé dans le rapport d’enquête». Une décision « incompréhensible » a dénoncé Sonia Bisch, présidente du collectif Stop aux violences obstétricales et gynécologiques (Stop VOG) sur FranceInfo.
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Crédit image de une : BSIP
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Citer cet article: Le Pr Darai sous contrôle judiciaire - Medscape - 25 nov 2022.
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