Hypertension résistante : le baxdrostat réduit drastiquement la pression artérielle dans BrigHTN

Patrice Wendling

Auteurs et déclarations

21 novembre 2022

Chicago, Etats-Unis Un inhibiteur expérimental de l’aldostérone synthétase pourrait être un nouveau traitement efficace pour diminuer la tension artérielle chez les patients ayant une hypertension résistante au traitement, selon les résultats d’une étude en phase 2.

L’étude BrigHTN (BrigHTN trial) a montré une diminution de la pression artérielle de 20,3 mmHg, 17,5 mmHg et 12,1mmHg en moyenne avec le baxdrostat 2 mg, 1mg et 0,5 mg, respectivement, après 12 semaines de traitement, et ce chez 248 patients pour lesquels il n’avait pas été possible d’atteindre les valeurs cibles de PA malgré la prise concomitante d’au moins trois anti-hypertenseurs dont un diurétique.

Après un ajustement prenant en compte la diminution des 9,4 mmHg observée dans le groupe placebo, il a été noté une réduction statistiquement différente de 11,0 mmHg dans le groupe baxdrostat 2mg (P= 0,0001) et 8,1mmHg avec la dose de 1mg (P=0,003).

La modification ajustée pour la tension artérielle diastolique a été significative seulement à la dose de 2mg (-5,2 mmHg ; P=0,004).

La dose orale quotidienne de baxdrostat a eu dans l’ensemble un bon profil d’effets secondaires et aucun patient n’est décédé.

L’étude qui a été arrêtée prématurément après avoir satisfait de façon évidente aux critères d’efficacité a été présentée au cours de la session finale des études scientifiques de dernière-minute au congrès de l’American Heart Association 2022 ( AHA 2022 ) et publiée simultanément dans le New England Journal of Medicine[1].

Passer le fil dans l’aiguille

Au cours de ces 20 dernières années, voire plus, les chercheurs ont tenté de trouver une molécule qui pourrait diminuer le taux d’aldostérone en inhibant directement la synthèse de l’hormone plutôt que de bloquer ses effets sur les récepteurs minéralocorticoïdes.

Cela s’est avéré extrêmement compliqué car l’enzyme de la synthèse de l’aldostérone synthétase et celle de la cortisol synthétase, la 11-bêta-hydroxylase, présentent 93% de similarité en termes de séquence. Le baxdrostat cependant est capable de bloquer sélectivement l’aldostérone synthétase et donc d’inhiber la production d’aldostérone sans affecter celle du cortisol, comme l’explique le Dr Mason W. Freeman, l’auteur principal, vice-président de la recherche clinique du laboratoire CinCor Pharma assurant la réalisation du produit.

« Nous avons ici une remarquable preuve de la part des biomarqueurs, non seulement concernant la réduction de la tension artérielle mais aussi du mécanisme par lequel cette baisse de la pression artérielle est obtenue » dit-il.

Dans cette nouvelle étude, après 12 semaines de traitement, le baxdrostat a permis une réduction du taux d’aldostérone qui va de 3,0 ng/dL avec la dose de 0,5mg, à 4,9 ng/dL avec la dose de 2mg. L’excrétion urinaire d’aldostérone diminue avec les 3 posologies évaluées.

Le baxdrostat a augmenté l’activité rénine plasmatique de 3,6, 5,0 et 13,8 mg/mL/h avec respectivement les doses de 0,5, 1,0 et 2,0 mg, montrant son efficacité dans la réduction de la rétention hydrosodée, ajoute le Dr Freeman. Les taux de cortisols sériques n’ont diminué dans aucun des groupes recevant le baxdrostat tout au long de l’étude.

« Un brillant avenir »

« Cela pourrait lui ouvrir un brillant avenir dans ce champ de l’hypertension artérielle résistante, particulièrement chez les patients qui ont un taux d’aldostérone trop élevé, » commenté la Dr Suzanne Oparil, directrice du programme Vascular Biology and Hypertension, à l’University d’Alabama à Birmingham, invitée lors de la discussion suivant la présentation.

Elle précise que l’aldostérone est un élément majeur intervenant dans la pathogénie de l’hypertension artérielle résistante qui affecte environ 20% des patients hypertendus.  Les antagonistes de l’aldostérone sont reconnus par beaucoup comme étant le meilleur traitement à ajouter (add on) lorsqu’il existe une hypertension artérielle résistante.

La Dr Oparil ajoute néanmoins qu’«il existe des problèmes importants, la spironolactone par exemple, est responsable d’une hyperkaliémie chez de nombreux patients et également d’effets secondaires tels la gynécomastie, les troubles de la fonction érectile et une féminisation.»

Le baxdrostat a été bien toléré, sans effet secondaire notable en rapport avec le traitement, indique le Dr Freeman. 18 effets secondaires au total, sont survenus chez 10 patients, dont 6 chez un patient avec un sepsis urinaire.

Dix effets secondaires notables sont survenus chez huit patients, dont une hypotension, trois hyponatrémies et six cas d’hyperkaliémies.

Des dosages de potassium entre 6,0 à 6,3 mmol/L (6,0 mEq/L à 6,3 mEq/L) ont été trouvés chez trois patients et des taux entre 5,5 et 5,9 mmol/L (5,5 et 5,9 mEq/L) chez trois autres lors de deux prélèvements consécutifs. Quatre de ces patients ont pu reprendre le baxdrostat et finir l’étude, alors que deux patients ont cessé le traitement, dont celui ayant eu le sepsis urinaire.

Le Dr Freeman précise encore que la population étudiée était relativement diversifiée avec 33%-48% des patients d’origine hispanique ou latine et 23%-32% des patients afro-américains.

A l’inclusion, la tension de tous les patients, en position assise, était au minimum à 130/80 mmHg (moyenne 147,8 / 87,9 mmHg) avec un traitement de fond qui comportait un diurétique chez 100% d’entre eux, un inhibiteur du système rénine angiotensine aldostérone pour 91-96%, un bêta-bloquant chez 52%-68% et un inhibiteur des canaux calciques dans 64%-70% d’entre eux. 

L’étude n’était pas programmée pour évaluer les bénéfices ou les risques de l’inhibition de l’aldostérone synthétase au-delà de 12 semaines et le baxdrostat n’a pas été comparé à d’autres anti-hypertenseurs, a indiqué l’orateur. Parmi les autres limites de l’étude figure le fait que le taux d’adhésion était basé sur le décompte des comprimés et non pas sur une analyse biologique et que le recrutement a été limité aux patients ayant un taux de filtration glomérulaire estimé supérieur à 45mL/mn/1,73m² limitant ainsi le risque de survenue d’une hyperkaliémie voire l’apparition d’autres effets néfastes

Néanmoins, « nous pensons que ces résultats suggèrent que le baxdrostat a un intérêt potentiel pour traiter les pathologies associées à un taux excessif d’aldostérone incluant l’hypertension et l’hyperaldostéronisme primaire » a affirmé le Dr Freeman.

Leur intention est de conduire une autre étude phase 2, s’intéressant à l’insuffisance rénale chronique et de débuter une étude phase 3 dans l’hypertension en 2023, a-t-il conclu.

 

L'étude a été financée par CinCor Pharma. Freeman et trois co-auteurs sont des employés de CinCor et reçoivent une rémunération à base d'actions. Les autres auteurs ont une relation financière avec CinRx Pharma, qui détient une participation dans CinCor. Oparil rapporte un soutien à la recherche/subvention de Bayer, Higi et Novartis ; et siégeant au conseil consultatif scientifique/comité d'experts pour CinCor Pharma et Preventric Diagnostics.

 

L’article a été publié sur Medscape.com sous le titre Baxdrostat Slashes BP in Resistant Hypertension: BrigHTN. Traduit par le Dr Jean-Pierre Usdin.

 

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