Les Padhue, toujours pas régularisés, manifestent

Jacques Cofard

Auteurs et déclarations

16 novembre 2022

Paris, France  Pratiquement six mois après une première manifestation sous les fenêtres du ministre de la Santé, les praticiens étrangers diplômés hors Union européenne (Padhue) sont de nouveau dans la rue, cette fois-ci devant le centre national de gestion (CNG), pour réclamer, de nouveau, à cor et à cri, la régularisation de la situation de plusieurs milliers d’entre eux.

À l’appel de l’association SOS Padhue, ils réclameront entre autres un traitement plus équitable de leur situation, la fin de la précarité et des tracasseries administratives.

Pour rappel, les praticiens étrangers peuvent être autorisés à exercer en satisfaisant la réussite d’un concours dénommé épreuves de vérification des connaissances (EVC), ou bien bénéficier d’une dérogation pour les praticiens bénéficiant d’un statut particulier, comme les praticiens réfugiés ou apatrides.

Loi du 24 juillet 2019

Néanmoins, depuis de nombreuses années, des praticiens n’ayant pas obtenu leur régularisation via le concours EVC exercent dans les hôpitaux les qualités de praticiens associés, ou sous des statuts plus farfelus, comme attachés de recherche clinique (ARC) par exemple.

Ils sont environ 4 000 à 5 000 à exercer en France comme praticiens, sans pour autant bénéficier d’une autorisation d’exercice. L’article 70 de la loi du 24 juillet 2019 devait remédier à cette situation, en créant un processus de validation exceptionnel pour ces quelques 5 000 praticiens dénommés par la tutelle « le stock ».

Elle autorise la poursuite temporaire de leur exercice pour les praticiens ayant exercé dans un établissement de santé au moins deux ans, à compter du 1er janvier 2015, et présents dans les établissements de santé entre le 1er octobre 2018 et le 30 juin 2019. Ces praticiens devaient néanmoins déposer une demande d’autorisation d’exercice qui devait être validée par une commission régionale, puis par une commission nationale (CNAE).

Or, si quelque 5 000 demandes d’autorisation d’exercice ont été déposées par les Padhue, le nombre de ces dossiers traités par les commissions régionales et nationale est insuffisant.

31 décembre 2022

Problème : lesdites commissions devaient rendre leurs verdicts sur l’ensemble de ces dossiers avant le 31 décembre 2022. Les praticiens concernés, mais aussi des parlementaires, craignent qu’au rythme adopté par les commissions, la grande majorité des dossiers de demande d’autorisation d’exercice des Padhue ne soit pas traitée avant la date fatidique du 31 décembre prochain.

Aussi, dans le cadre de l’examen du PLFSS 2023, des sénateurs de la majorité ont proposé dans un premier temps de repousser cette date à avril 2023, avant que le groupe socialiste au Sénat ne propose un report de sept mois, à juillet 2023 : « En raison de la crise sanitaire et de ses conséquences sur le système de soins, de nombreuses commissions compétentes pour autoriser individuellement l’exercice des praticiens à diplôme hors Union européenne n’ont pu se réunir. Le texte prévoit un report de 4 mois pour organiser le passage en commission nationale d’autorisation d’exercice (CNAE) des praticiens diplômés hors Union européenne. Or, à la lumière des revendications des concernés, il nous semble que ces délais ne pourront être tenus. Cet amendement a pour objectif de le rallonger à 7 mois », ont ainsi justifié les sénateurs.

Le feu aux poudres

Inutile de dire que cet amendement a mis le feu aux poudres chez les principaux concernés, à savoir les Padhue, qui militent pour une accélération de la procédure.

Reçu par le ministère de la santé à la fin du mois d’octobre, le Syndicat national des Padhue (SNPADHUE) a exposé ces revendications. S’il ne s’oppose pas de manière frontale à un report de l’examen des dossiers en CNAE (commission nationale d’autorisation d’exercice), il réclame en revanche « l’augmentation du nombre de réunions des CNAE », mais aussi « la délivrance d’une prolongation de l’autorisation temporaire d’exercice au-delà de la date qui sera fixée (31 mars 2023 ou 30 avril 2023) pour toute l’année 2023 pour couvrir les temps d’attente des réponses des CNAE, les inscriptions au CNOM pour les avis favorables et les éventuels recours pour les avis défavorables (les PCC et les rejets) ».

Parcours de consolidation

Autre sujet de préoccupation, tant pour le SNPADHUE que pour SOS Padhue : le parcours de consolidation. Car après l’agrément accordé par la CNAE, les Padhue doivent effectuer un parcours de consolidation, avant la reconnaissance définitive de leur statut de praticien.

Or, là aussi, le process connaît des ratés : les terrains de stage pour effectuer ces parcours de consolidation sont trop peu nombreux, et il existe une discrimination entre les Padhue issus du concours EVC et ceux provenant du stock, quant à l’affectation sur un terrain de stage.

Pour pallier ces manques, SOS Padhue réclame l’ouverture de terrains de stage dans les cliniques privées, mais aussi une égalité de traitement entre Padhue « EVC » et Padhue « stock ».

Last but not least : SOS Padhue dénonce également des évaluations divergentes entre les diverses commissions au sujet des autorisations d’exercice des Padhue, dues à des grilles d’évaluation différentes.

L’association réclame donc une homogénéisation des grilles d’évaluation des différentes commissions. En attendant, le nombre de recours pour rejets d’autorisations d’exercice ne cesse d’augmenter.

Soutien de la FHF

Fait assez rare pour être souligné : les Padhue ont reçu le soutien de la FHF Île-de-France, de la conférence des présidents de CME, de la direction générale de l’AP-HP et de de la présidence de la CME de l’AP-HP. Dans un communiqué commun, ces institutions réclament pour les Padhue du « stock » leur maintien en activité jusqu’à la décision de la CNAE.

Pour les Padhue « EVC », les signataires de ce communiqué demandent le maintien de leur statut de praticien attaché associé (PAA), jusqu’au passage du concours 2022 et de ses résultats.

Ils attirent l’attention des pouvoirs publics sur des Padhue qui avaient été engagés sous contrat triennaux ou en CDI avant la réforme, et demandent qu’on leur attribue le statut de praticien attaché (PA).

Autres cas sensibles : ceux des chefs de clinique associés (CCA) pour qui les signataires de ce communiqué demandent le maintien d’une autorisation d’exercice temporaire à compter du 1er novembre 2022.

SOS Padhue a également reçu le soutien du Collectif santé en danger : « Pour ces praticiens à diplômes hors Union européenne, pour la plupart naturalisés français, recrutés de façon invisible et non reconnus ni valorisés par l’État français, la réforme de la loi Santé de 2019 était très attendue. Mais entre pandémie de Covid-19 et lenteurs administratives, la mise en application de ces nouveaux textes de loi tarde à être effective. La régularisation de la situation d’exercice de près de 5 000 médecins Padhue prévue pour fin 2021, puis repoussée à fin 2022 sera de nouveau repoussée jusqu’à la fin du premier semestre 2023. Il reste encore 2 100 dossiers à traiter par les commissions nationales du CNG », a notamment déclaré le collectif santé en danger.

 

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