Paris, France — Un essai clinique français montre qu’un entraînement à la méditation pleine conscience de 18 mois améliore les capacités attentionnelles et socio-émotionnelles de sujets de 65 ans et plus, par rapport à celles de deux groupes contrôle (l’un actif, l’autre passif). [1]
En revanche, aucune différence n’a été observée entre les trois groupes concernant le volume du cortex cingulaire antérieur et de l'insula, tandis qu’une tendance non significative a été observée concernant la perfusion de ces structures. Sur ce dernier point, les auteurs posent l’hypothèse que cette tendance pourrait devenir statistiquement significative après un suivi plus long et pourrait ainsi suggérer un bénéfice de la méditation sur la prévention de la démence. Le suivi à 4 ans est planifié.
Pourquoi est-ce important ?
La modification de l’impact des facteurs psychoaffectifs comme la dépression, le stress ou l'anxiété sur le risque de démence n’a pas été explorée dans la recherche clinique. Or, des études ont déjà décrit l’impact de la méditation de pleine conscience sur la cognition, l'attention, les fonctions exécutives ainsi que sur les facteurs psychoaffectifs. Des travaux conduits chez des sujets jeunes ont montré que cette pratique était associée à des changements structurels et fonctionnels du cerveau, principalement au niveau de l'insula et du cortex cingulaire antérieur, qui sont impliqués dans la conscience de soi, le traitement attentionnel, émotionnel et empathique. Puisqu’elles sont particulièrement sensibles au vieillissement, il était intéressant d’évaluer si elle pouvait aussi favoriser une modification chez les sujets plus âgés et, ainsi améliorer la prévention des démences.
Méthodologie
L'étude randomisée Age-Well, menée dans le cadre du projet européen Medit-Aging, a recruté des personnes de 65 ans et plus en bonne santé, sans pathologie connue pouvant interférer avec les fonctions cognitives. Elle les a randomisées entre trois groupes : l’apprentissage d’une intervention de méditation (pleine conscience et méditation d’amour et de compassion), l’apprentissage de l’anglais (contrôle actif) et l’absence d’intervention (contrôle passif) durant 18 mois. Elles ont bénéficié de bilans biologiques et de neuro-imagerie fonctionnelle réalisés à Caen à l’inclusion, puis à l’issue de la prise en charge. Elles étaient invitées à auto-évaluer leurs capacités cognitives et socio-affectives via un questionnaire estimant la régulation de l'attention, les capacités socio-émotionnelles et la connaissance de soi et permettant d’établir un score composite global les caractérisant. Ce protocole fait suite une étude pilote où les chercheurs de Caen avait étudié le cerveau de 6 personnes pratiquant la méditation à « haute dose » (Lire La méditation à « haute dose » protège le cerveau du vieillissement).
Principaux résultats
Au total, 136 sujets ont été recrutés et inclus dans cette analyse (âge moyen 69,4 ans, 60,6 % de femmes), sans différences démographiques ou cliniques majeures entre les groupes.
À 18 mois, aucune différence dans la mesure des volumes du cortex cingulaire antérieur ou de l’insula n’a été observée entre le groupe des sujets ayant pratiqué la méditation et ceux de chacun des deux autres bras de l’étude. Des différences ont été mesurées concernant le taux de perfusion de ces zones cérébrales en faveur de la méditation, mais elles étaient statistiquement à la limite de la significativité (0,02 [IC -0,01 à 0,05]) et (0,02 [IC -0,01 à 0,05] respectivement, P =0,06 et P =0,09).
Le score composite global ainsi que ses deux sous-scores attentionnels et socio-émotionnel étaient significativement supérieurs dans le groupe méditation que dans le groupe contrôle actif (0,52 [IC 0,19-0,85], 0,38 [IC 0,10-0,67] et 0,31 [IC 0,06-0,57], p significatifs).
« Le fait qu’aucune différence anatomique n’ait été observée entre ces deux groupes pourrait indiquer que, si la méditation peut modifier le volume de cerveaux plus jeunes et plus plastiques, 18 mois d’entraînement à la méditation ne sont pas suffisants pour modifier les effets du vieillissement, a analysé la chercheuse Gaël Chételat (directrice Inserm) dans un communiqué. Par ailleurs, si les résultats de mesure du volume sont strictement négatifs, ceux de la perfusion montrent une tendance en faveur de la méditation qu’il pourrait être intéressant d’explorer sur un temps d’intervention plus long et/ou avec un échantillon de population plus important », a-t-elle ajouté.
Cet article a initialement été publié sur Univadis.fr, membre du réseau Medscape. Complété par Stéphanie Lavaud.
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Crédit de Une : Dreamstime
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Citer cet article: La méditation, outil de prévention des démences ? - Medscape - 25 oct 2022.
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