Paris, France— Comment combler le trou de la sécu ? Un vrai serpent de mer, qui a été remis au goût du jour à la faveur de la pandémie de Covid. Sous le coup d'un effet ciseau redoutable (baisse des entrées due à l'effondrement de l'économie et augmentation simultanée des dépenses) en 2020, le déficit de la sécurité sociale a atteint un gouffre abyssal.
De 1,7 milliard en 2019, il est passé à 39,7 milliards fin 2020, pour remonter à 24,3 milliards en 2021. Pour 2022, il est prévu un déficit de 17,8 milliards et de 6,8 milliards en 2023.
En cumulé, la croissance continue de l'endettement social pourrait s'élever fin 2022 à 160 milliards d'euros. Il y a donc urgence à agir et à prendre des décisions pour résorber ce déficit. Pour ce faire la cour des comptes dans son dernier rapport sur l'application des lois de sécurité sociale, s'attaque entre autres aux conventions entre professionnels de santé de ville et assurance maladie.
Les conventions, outils inflationnistes ?
Ces conventions, en particulier avec les médecins, sont signées depuis 1971 pour une durée de cinq ans renouvelables. Elles ont pour objet de déterminer principalement les conditions de rémunération des professionnels concernés.
De 2010 à 2021, constate la Cour, les dépenses de soins de ville ont progressé en moyenne trois fois plus vite que l'inflation. « L'instrument conventionnel a été peu mis au service de la maitrise des dépenses d'assurance maladie », constate la Cour. Cela est dû à un manque de pilotage des accords conventionnels : aucune clause de revoyure ou de sauvegarde n'est mise en œuvre et le cadre pluri-annuel ministériel proposé par le ministère de la santé n'est pas non plus respecté.
Les sages de la rue Cambon regrettent également qu'entre 69 et 98% de la rémunération des professionnels de santé provient des actes. Or ce système de rémunération « n'est pas propice au déploiement de la prévention et les professionnels de santé peuvent piloter leurs revenus en redéfinissant le contenu de la prestation, à travers la durée de la consultation, leurs horaires, ou le nombre d'actes réalisés ».
Les rémunérations forfaitaires ne représentent que 2% de l'Ondam "ville".
La Cour des comptes propose de rectifier le tir en concluant désormais des accords conventionnels interprofessionnels entre deux ou trois professions, en systématisant l'élaboration des lettres ministérielles, en augmentant la part forfaitaire dans la rémunération des médecins généralistes...
Augmentation continue des dépenses d’imagerie médicale
L'imagerie médicale est aussi dans le viseur de la Cour des comptes. D'un montant de 4,5 milliards en 2020, les dépenses d'imagerie médicale ont augmenté de +5,6% entre 2019 et 2021.
« Sur la période 2017 à 2019, l’augmentation du volume du nombre d’actes d’imagerie (+ 3,4 %) a contribué de manière déterminante à la croissance des dépenses de radiologie, mais depuis la crise sanitaire, aucune action de gestion du risque n’a été engagée par l’assurance maladie avec la profession pour favoriser la pertinence des actes », regrette la Cour.
L'assurance maladie, concernant la rémunération des radiologues, ne possède pas les informations nécessaires « au contrôle de la facturation des actes et à une détermination précise des forfaits en fonction des coûts ».
Là aussi, la Cour propose des pistes, comme la participation des radiologues à la permanence des soins, l'objectivation des charges des radiologues, la définition de référentiels de pertinence des soins en imagerie, la mise en place d'un plan pluriannuel de dépenses liées à l'imagerie médicale...
Définition floue des actes en radiothérapie
La radiothérapie n'est pas non plus en reste. Le montant des dépenses liées à cette spécialité médicale était en 2020 de 1,5 milliard d'euros. Pour cette spécialité, la Cour des comptes constate que les « tarifs hospitaliers sont supérieurs de 75 % à ceux qui permettraient de couvrir les coûts de l’activité ».
Dans le secteur libéral, le flou qui entoure la définition des actes de radiothérapie dans la classification commune des actes médicaux (CCAM) donne lieu à des « méthodes de facturation discutables », « qui conduisent à une valorisation des actes au moins équivalentes à celle des actes réalisés en établissement de santé ».
La solution aux facturations erratiques en radiothérapie ? Pour la Cour, il faudrait mettre en œuvre une réforme de la tarification au plus tard au 1er janvier 2024, définir des indicateurs nationaux de qualité, « Expérimenter une procédure d’autorisation temporaire, limitée dans le temps, des techniques et pratiques innovantes en radiothérapie ».
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Crédit de Une : BSIP
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Citer cet article: La convention médicale, l'imagerie et la radiothérapie dans le viseur de la Cour des comptes - Medscape - 24 oct 2022.
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