Dans l’Actu : l’acide folique

Ryan Syrek

Auteurs et déclarations

14 octobre 2022

 

De nouvelles recherches sur les effets bénéfiques, mais aussi les méfaits, de la supplémentation en acide folique, ont été publiées récemment : atténuation du risque suicidaire, prévention de la stéatose hépatique, amélioration des états précancéreux de l’estomac, mais également des effets inquiétants concernant son utilisation chez les femmes enceintes épileptiques.

Réduction du risque suicidaire

Selon une nouvelle étude, dont les données ont été ajustées en fonction de multiples facteurs, la prise d’acide folique délivrée sous ordonnance (forme synthétique de la vitamine B9) pourrait contribuer à réduire les évènements suicidaires. [1   ]Les investigateurs ont utilisé une base de données de demandes de remboursement de soins de santé comprenant 164 millions de participants. La cohorte incluait 866 586 adultes (81,3 % de femmes ; 10,4 % de personnes de 60 ans ou +) ayant reçu une ordonnance d'acide folique entre 2012 et 2017. La plupart de ces ordonnances ont été prescrites dans le cadre de troubles de la douleur. Près de la moitié (48%) concernaient un agent unique à une dose de 1 mg/j, la limite supérieure tolérable pour les adultes.

Les participants ont été suivis pendant 24 mois. Durant l'étude, le taux global d'événements suicidaires était de 133 pour 100 000 habitants. Après ajustement en fonction de l'âge, du sexe, des diagnostics liés au comportement suicidaire et à la carence en acide folique, des antécédents de médicaments réducteurs de folates et des antécédents d'événements suicidaires, le rapport de risque (RR) estimé pour les événements suicidaires lors de la prise d'acide folique était de 0,56 (IC 95 %, 0,48-0,65), ce qui représente une réduction de 44 %. Les auteurs notent que ce chiffre peut être sous-estimé, étant donné que l'étude n'a pris en compte que l'acide folique délivré sur ordonnance, et que certaines personnes peuvent également avoir pris des suppléments en vente libre. Ils préviennent également que des analyses plus approfondies sont nécessaires avant de généraliser l'utilisation de l'acide folique chez les patients présentant des symptômes dépressifs.

Prévention de la NASH

L'acide folique pourrait également jouer un rôle dans la prévention ou le retardement de la progression de la stéatose hépatique. Les chercheurs ont constaté que des taux sanguins élevés d'homocystéine présentent une forte corrélation avec la sévérité de la stéatohépatite non alcoolique (NASH). [2  ]Ils suggèrent donc qu'une supplémentation en vitamine B12 et en acide folique pourrait être bénéfique. Les chercheurs ont découvert que lorsque l'homocystéine se fixe à la protéine syntaxine 17 (Stx17), elle l'empêche de transporter et de digérer les graisses, un processus connu sous le nom d'autophagie. Ceci, à son tour, induit le développement et la progression de la stéatose hépatique vers la NASH. Dans des modèles précliniques, la supplémentation en vitamine B12 et en acide folique a augmenté les niveaux de Stx17 hépatique, rétabli son rôle dans l'autophagie, ralenti la progression de la NASH et inversé l'inflammation et la fibrose du foie.

Inverser la progression des états précancéreux de l’estomac ?

La supplémentation en acide folique pourrait également améliorer les aspects histopathologiques des états précancéreux de l’estomac, notamment la métaplasie intestinale et l'atrophie de la muqueuse gastrique. Les auteurs d'une récente méta-analyse ont rassemblé des preuves en faveur de l'utilisation clinique de l'acide folique dans la prise en charge des états précancéreux gastriques. [3] L'analyse a porté sur 13 essais contrôlés randomisés impliquant 1252 adultes atteints d’états précancéreux gastriques vivant en Chine. Une méta-analyse de cinq études a montré un effet positif statistiquement significatif de la supplémentation en acide folique sur l'atrophie de la muqueuse gastrique (risque relatif [RR], 1,61 ; IC 95 %, 1,07-2,41). Une méta-analyse de deux essais a quant à elle montré un effet statistiquement significatif de l'acide folique sur l'inversion de la métaplasie intestinale (RR, 1,77 ; IC à 95 %, 1,32-2,37). Cependant, la supplémentation n'a pas semblé soulager les symptômes de l’état précancéreux de l’estomac.

Exposition prénatale à de forte doses d’acide folique et risque de cancer pédiatrique

Les nouvelles recherches sur l'acide folique ne sont cependant pas toutes aussi positives. Une étude récente portant sur les données d'un registre scandinave de plus de 3 millions de grossesses, a montré que l'exposition prénatale à de fortes doses d'acide folique est associée à un risque 2 fois plus important de cancer chez les enfants de mères épileptiques. [4]

Parmi les 27 784 enfants nés de mères épileptiques, 5 934 (21,4 %) ont été exposés à de fortes doses d'acide folique (dose moyenne de 4,3 mg). 18 cas de cancer « exposés » ont été comparés à 29 cas de cancer « non exposés », ce qui a donné un HR ajusté de 2,7 (IC 95 %, 1,2-6,3). Le risque absolu lié à l'exposition était de 1,5 % (IC 95 %, 0,5 %-3,5 %) chez les enfants de mères épileptiques et exposés à de fortes doses d'acide folique, comparativement à 0,6 % (IC 95 %, 0,3 %-1,1 %) chez ceux dont les mères épileptiques n’avaient pas pris de forte doses. L'exposition prénatale à de doses élvées d'acide folique n'a en reveanche pas été associée à un risque accru de cancer chez les enfants de mères non épileptiques.

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