La fraude à l’assurance maladie se concentre chez les médecins et les infirmiers

Jacques Cofard

Auteurs et déclarations

6 octobre 2022

Paris, France — Après une accalmie due à la mise sous cloche du pays causée par la pandémie de Covid-19 en 2020, la fraude à l’assurance maladie repart de plus belle en 2021, selon les données de l’assurance maladie. [1] L’an dernier ce sont 219,3 millions d’euros qui ont été « détectés et stoppés », selon les mots de la sécurité sociale, contre 127,7 millions d’euros en 2020 et 286,7 millions d’euros en 2019. Pour l’année 2022, sur le premier semestre, l’assurance maladie a détecté 111,7 millions d’euros de fraude, un chiffre en hausse de 20 % par rapport au premier semestre de l’année 2021.

Deux tiers des fraudes chez les professionnels de santé

En 2021, deux tiers de ces fraudes sont concentrés chez les professionnels de santé. Ce sont les infirmiers qui concentrent le plus haut montant de fraude détectée (39 millions d’euros), suivis par les pharmaciens (19 millions d’euros), puis les fournisseurs (16 millions d’euros). En chirurgie plastique, le montant de la fraude détectée s’élève à 14 millions d’euros, tout comme chez les médecins spécialistes. Pour les médecins généralistes, la fraude est estimée à 6 millions d’euros. Toutes spécialités confondues, les médecins occupent donc la deuxième position en termes de fraude détectée, avec un total de 34 millions d’euros. « En 2021, 7 857 actions contentieuses ont été engagées contre 4 771 en 2020 et 8 872 en 2019, détaille par ailleurs l’assurance maladie. Le total des sanctions (pénalités financières, amendes, dommages et intérêts...) s’élève à 34,6 millions d’euros pour 2021 contre 20 millions d’euros en 2020 et 31,1 millions d’euros en 2019. »

 
Toutes spécialités confondues, les médecins occupent donc la deuxième position en termes de fraude détectée, avec un total de 34 millions d’euros.
 

Près de 200 millions de fraude pour les médecins généralistes

Dans le détail, le taux de préjudice financier des infirmiers est estimé entre 5 et 6,9 %, soit un préjudice compris entre 286 et 393 millions d’euros sur un total de 7,5 milliards d’euros remboursés sur ce poste de dépenses. Pour les médecins généralistes le taux de préjudice financier est estimé entre 3,1 % et 3,5 %, soit entre 185 et 215 millions d’euros sur un total de 6 milliards d’euros remboursés. Par nature de grief, le préjudice financier concerne avant tout les fraudes à la prescription (43 %), suivies par les « prestations fictives, facturations multiples » (31 %), l’exercice illégal de la médecine (10 %), le non-respect de la nomenclature (8 %).

Pouvoirs de cyber enquête

Pour les prochaines années, l’assurance maladie s’est fixé un objectif chiffré de 500 millions d’euros détectés. Pour ce faire, elle a renforcé son arsenal répressif. Ainsi, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 (PLFSS) attribue aux agents de la sécurité sociale « des pouvoirs de cyber enquête » sur les réseaux sociaux. « Ces agents pourront procéder à des actes sous pseudonyme, sans être pénalement responsables : participer à des échanges électroniques, y compris avec les personnes susceptibles d’être les auteurs de ces infractions ; extraire ou conserver par ce moyen les données sur les personnes susceptibles d’être les auteurs de ces infractions et tout élément de preuve etc. ». Les contrôles seront également renforcés en matière de téléconsultations, pour les professionnels de santé au-dessus de 20 % de ces actes. Des contrôles viseront également les médicaments onéreux, ainsi que les opticiens et les audioprothésistes, dans le cadre du pack 100% santé.

Contrôles renforcés sur les arrêts maladie

Autre sujet de préoccupation pour l’assurance maladie : les arrêts de travail. Pour 2022, la sécurité sociale prévoit la « surveillance des arrêts itératifs de courte durée, les "contrôles précoces d’arrêts de travail pour deux motifs fréquents : les dorso-lombalgies et les arrêts pour syndrome dépressif et/ou anxiété ; le renforcement du suivi et de l’accompagnement des assurés avec des arrêts de longue durée ».

Au-delà des poursuites pénales ou des sanctions financières, le PLFSS prévoit également l’extension « de la procédure de déconventionneront en urgence aux pharmaciens, fournisseurs de matériels, et transporteurs ». La procédure a déjà été mise en place pour les autres professionnels de santé libéraux, notamment les médecins. Les pénalités financières seront également majorées, tel que le prévoit le PLFSS 2023 : « jusqu’à 300 % du préjudice subi voire 400 % en cas de fraude en bande organisée en cas de pratiques frauduleuses ».

« Sanctionner plus vite, de manière adaptée est un axe de travail prioritaire », a déclaré Thomas Fatome, directeur général de l’assurance maladie, à l’issue de la présentation du bilan chiffré de la fraude à l’assurance maladie. La prévention n’est pas non plus absente du plan d’action de l’assurance maladie : elle prévoit notamment d’accompagner les professionnels de santé pour sécuriser la facturation, limiter les usurpations d’identité, empêcher les falsifications d’ordonnance par la mise en place de l’ordonnance électronique.

 

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