AVC : la HAS publie des recommandations sur la rééducation durant la phase chronique

Anne-Gaëlle Moulun

Auteurs et déclarations

13 juillet 2022

France — La Haute Autorité de Santé (HAS) vient de publier ses premières recommandations concernant la rééducation d’un accident vasculaire cérébral (AVC) durant la phase chronique, c'est-à-dire à partir de 6 mois après la survenue de l'AVC [1]. La Dr Lucie Bihel, de l’unité de rééducation spécialisée post-AVC de l’hôpital Henri Gabrielle à Lyon, commente ces recommandations.

 En France, l'AVC touche chaque année 150 000 personnes, et est la première cause de handicap acquis chez l'adulte. Ses séquelles ont longtemps été considérées comme irréversibles. Pourtant, la rééducation des fonctions motrices et cognitives poursuivie sur le long terme peut améliorer la qualité de vie des patients.

Alors qu’il n’existait pas jusqu’à présent de recommandation concernant la rééducation à mettre en place au cours de la phase chronique de l’AVC, c’est-à-dire au-delà de 6 mois après la survenue de l’accident, la HAS vient d’élaborer des recommandations sur « la pertinence, les indications et les modalités de la rééducation lors de cette phase de la pathologie ». « Cette publication recense les interventions possibles dans le cadre de la rééducation des fonctions motrices et cognitives à la suite d'un AVC, mais n'aborde pas les traitements médicamenteux ou l'éducation thérapeutique », précise l’instance.

Harmonisation des pratiques

Pour la Dr Lucie Bihel, « ces recommandations permettent de donner de la visibilité sur la conduite à tenir en phase en chronique. C’est utile pour harmoniser les pratiques », estime-t-elle.

La HAS indique que « lors de la phase chronique, un grand nombre de patients victimes d'AVC présentent des troubles fonctionnels multiples, tels que des déficiences cognitives, motrices ou sensitives, de la fatigue, des troubles psycho-affectifs, etc. Il est donc essentiel de leur proposer un suivi rééducatif adapté, inscrit dans le temps et complété par un accompagnement psychologique si besoin ».

Concernant les fonctions motrices, l’HAS indique que « la rééducation motrice des membres supérieurs et inférieurs se fait par des méthodes thérapeutiques pratiquées manuellement ou avec des instruments ». Elle inclut aussi des programmes d'activité physique, notamment des exercices physiques et de la marche. « Certaines techniques telles que la réalité virtuelle sont également recommandées, mais doivent être associées à d'autres méthodes pour une efficacité optimale », ajoute la HAS.

Privilégier l’activité physique adaptée régulière

Pour la Dr Bihel, « A la phase aiguë, la nécessité d’une rééducation la plus précoce et intensive possible dans une filière de soins organisée via une coordination pluriprofessionnelle entre professionnels de santé est fondamentale pour favoriser la récupération de la fonction sensorimotrice et cognitive des patients. Arrivé à la phase de plateau, il ne faut pas et plus s’acharner à récupérer une motricité qui n’aura pas d’impact sur le pronostic fonctionnel. Il faut surtout entretenir les acquis, avec de l’activité physique adaptée », commente-t-elle. « L’entraînement et la rééducation, c’est tous les jours qu’il faut le faire, en marchant, en faisant du vélo si possible par exemple, en participant aux activités du quotidien. Cela permet de consolider et de faire perdurer les acquis », souligne-t-elle.

Concernant la réalité virtuelle, elle note que « certains services n’en sont pas encore dotés, même si cela se démocratise rapidement. Les intérêts sont multiples, dont celui d’être ludique et d’augmenter l’aspect motivationnel des patients », constate-t-elle.

En revanche, la HAS indique que « d'autres techniques comme la rééducation assistée par robotique ou la balnéothérapie ne peuvent actuellement pas faire l'objet de recommandations, faute de données disponibles pour en étayer scientifiquement les bénéfices ».

 
Arrivé à la phase de plateau, il ne faut pas et plus s’acharner à récupérer une motricité qui n’aura pas d’impact sur le pronostic fonctionnel. Il faut surtout entretenir les acquis, avec de l’activité physique adaptée  Dr Lucie Bihel
 

Activité physique dite « aérobie » pour les troubles cognitifs

Au sujet des troubles cognitifs (troubles de la mémoire, difficultés à la planification et à la réalisation de deux tâches conjointes ou troubles de l’attention), la HAS recommande l'apprentissage de mesures de compensation, grâce à des aides internes ou externes (listes, agendas, alarmes, aides humaines, etc.) et l'acquisition de compétences d'adaptation, mais aussi la pratique d'une activité physique dite « aérobie », c'est-à-dire peu intense mais maintenue, notamment dans le but d'améliorer la vitesse de traitement des informations.

« La glie, qui supporte les cellules nerveuses, est très sensible à l’oxydation. En amenant de l’oxygène grâce à des activités physiques aérobies (marche, vélo), on la favorise, ce qui permet d’améliorer les fonctions attentionnelles, la concentration et évite de majorer les troubles mnésiques ou les troubles des fonctions exécutives », explique la Dr Bihel. Pour elle, « il faut une activité physique régulière et adaptée. Il faut s’entretenir tous les jours, avec plus ou moins d’intensité, sans pour autant passer son temps à faire du sport ».

Elle juge aussi important d’avoir « un suivi régulier par le médecin de MPR afin de refaire le point, annuellement ou tous les deux ou trois ans, selon le rythme et la clinique du patient. Ainsi, si le patient chute par exemple, cela peut être très pertinent dans un objectif de rééducation précis et dans ce cas (celui du syndrome de post-chute) de refaire des séances en libéral ».

 
La glie, qui supporte les cellules nerveuses, est très sensible à l’oxydation  Dr Lucie Bihel
 

Littérature scientifique limitée voire inexistante

Concernant le traitement des troubles de la communication et notamment de l'aphasie, à savoir la perte totale ou partielle de la capacité à communiquer par le langage, « la méthode de stimulation magnétique transcrânienne répétitive (rTMS) et la rééducation informatisée du langage accompagnée d'un thérapeute sont recommandées. L'implication de l'aidant ou du partenaire par l'information et l'éducation thérapeutique est également indiquée. En revanche, l'état actuel des connaissances scientifiques ne permet pas de recommander les méthodes telles que l'acupuncture ou la musicothérapie », détaille la HAS.

Par ailleurs, elle précise que « les symptômes observés et leurs séquelles sont si différents d'un patient à l'autre qu'il est difficile d'obtenir des résultats similaires ».

Elle conclut en notant que « la littérature scientifique disponible sur les méthodes de rééducation à la suite d'un AVC est parfois limitée, voire inexistante. Les travaux de la HAS sur la rééducation lors de la phase chronique de l'AVC devront donc être complétés et adaptés, selon les nouvelles données disponibles ».

 
La méthode de stimulation magnétique transcrânienne répétitive (rTMS) et la rééducation informatisée du langage accompagnée d'un thérapeute sont recommandées  La HAS
 

 

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