IC et télésurveillance à domicile : nouvelles données du terrain

Aude Lecrubier

Auteurs et déclarations

8 juillet 2022

France — La télésurveillance à domicile des patients insuffisants cardiaques (IC) en post-hospitalisation diminue le risque de réhospitalisations et de décès à long terme, indique une nouvelle étude française conduite en « vie réelle » et publiée dans la revue ESC Heart Failure [1].

L’étude observationnelle rétrospective (2009 - 2016) apporte de nouvelles données sur l’intérêt de la télésurveillance à domicile de l’insuffisance cardiaque par le SCAD (Suivi Clinique à Domicile), programme de télésurveillance interactive déployé depuis 2007 en Normandie auprès de patients souffrant d’insuffisance cardiaque. Elle montre notamment que le niveau d’adhésion au programme influe sur les bénéfices cliniques obtenus.

« La spécificité du SCAD est d’associer autosurveillance, télésurveillance médicale et accompagnement thérapeutique du patient. Cette innovation digitale permet un suivi optimisé du patient en toute sécurité afin de maintenir la stabilité de la maladie et d’éviter les décompensations aigües », a expliqué dans un communiqué[2] le Pr Rémi Sabatier, cardiologue au CHU de Caen et professeur associé en télémédecine à l’Université Caen-Normandie, qui a mené l’étude en collaboration avec l’APRIC (Association pour l’Amélioration de la PRise en charge de l’Insuffisance Cardiaque en Normandie), Amgen France, Normand’e-santé et des centres hospitaliers.

659 patients en autosurveillance

Lors de cette expérimentation, une tablette connectée a été fournie à 659 patients souffrant d'insuffisance cardiaque après une hospitalisation dans plusieurs centres de la région. Elle leur a permis de renseigner des informations sur leur santé (autosurveillance) et leur mode de vie au centre de coordination à l'aide d'un questionnaire interactif quotidien et de recevoir un retour d'information pour adapter leur prise en charge.

Les données saisies par le patient étaient également analysées en temps réel par un algorithme intelligent validé afin d'identifier tout risque de décompensation aiguë, et de générer automatiquement une alerte.

En cas d’alerte, une infirmière spécialisée en insuffisance cardiaque pouvait contacter le patient pour un accompagnement thérapeutique adapté, ou le médecin généraliste et le cardiologue afin d'organiser une consultation rapide, ou une visite à l'hôpital si nécessaire.

Diminution des réhospitalisations et des décès

Les patients ont été télésurveillés pendant au moins 3 mois, et la réhospitalisation et la mortalité ont été documentées à 12 mois et 5 ans. Les données de télésurveillance ont été reliées, patient par patient, entre la base de données SCAD et la base de données de l'assurance maladie française (Système National des Données de Santé).

Les patients ont été suivis pendant une durée médiane de 32,9 mois.

Les taux de réhospitalisation pour maladie cardiovasculaire ont diminué de 79,4% l'année précédant l’inclusion dans l’étude à 41,1% l'année suivante et de 52,8% à 18,8% pour les hospitalisations pour insuffisance cardiaque. Le taux de mortalité à 12 mois était de 11,2%.

Des bénéfices cliniques liée au niveau d’utilisation du programme

Les résultats ont été comparés en fonction de l'utilisation du programme : faible, intermédiaire et élevée.

Il en ressort que la télésurveillance à domicile par le SCAD a permis une diminution des ré-hospitalisations et des décès plus importante chez les patients qui utilisaient le plus le système de télésurveillance SCAD (tercile supérieur) versus les patients qui utilisaient le moins le SCAD (tercile inférieur).

Plus précisément, des associations significatives ont été observées entre le niveau d'utilisation du programme SCAD et la réhospitalisation toutes causes confondues (P = 0,0085), la réhospitalisation pour maladie cardiovasculaire (P = 0,0010), la réhospitalisation pour insuffisance cardiaque (27,8 % chez les faibles utilisateurs, 12,9 % chez les utilisateurs intermédiaires et 13,5 % chez les forts utilisateurs ; P < 0,0001) et la mortalité (26,8 %, 15,2 % et 15,9 % respectivement ; P = 0,0157) dans les 12 mois suivant l’entrée dans l’étude.

Le nombre moyen de jours de vie en dehors de l'hôpital était de 279 ± 111 chez les faibles utilisateurs, 312 ± 90 chez les utilisateurs intermédiaires et 304 ± 100 chez les grands utilisateurs (P = 0,0022).

Tout en soulignant l’importance des avantages cliniques obtenus grâce à ce programme de télémédecine à domicile, les chercheurs notent que « le faible engagement dans la télésurveillance pourrait servir de signal de mauvais pronostic et être pris en compte dans la stratégie de suivi ».

Outre ces données cliniques, « un autre article, centré sur l’analyse des résultats médico-économiques de la télésurveillance en France, est actuellement en cours de relecture et devrait être prochainement publié », a indiqué Thibault de Chalus, Responsable du département Innovation et Digital chez Amgen France dans un communiqué[2].

La loi de financement de la Sécurité Sociale 2022 (LFSS) a fixé au 1er juillet la prise en charge des activités de télésurveillance par l’Assurance Maladie. Cette étape réglementaire devrait conclure l’expérimentation ETAPES (Expérimentations de Télémédecine pour l’Amélioration des Parcours En Santé).

 

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