Mélanome : les 2 études clés à retenir de l'ESMO, selon le Pr C. Robert

Pr Caroline Robert

Auteurs et déclarations

14 septembre 2022

Le Pr Caroline Robert commente 2 essais randomisés dans le traitement du mélanome, présentés en sessions présidentielles du congrès européen d’oncologie ESMO 2022 :

  • TIL vs ipilimumab dans le mélanome métastatique

  • Administration de pembrolizumab après la chirurgie vs administration avant et après chirurgie dans le mélanome à haut risque

TRANSCRIPTION

Bonjour, je suis Caroline Robert et je dirige le service de dermatologie à l’Institut Gustave-Roussy, où on traite essentiellement des patients atteints de cancer de la peau et beaucoup de mélanomes.

En direct de l’ESMO cette année, on a eu deux présentations en session présidentielle, qui traitent du mélanome. C’est donc un « bon » ESMO pour le mélanome.

TIL vs ipilimumab standard dans le mélanome métastatique

La première présentation est vraiment une grande première. Ce n’est pas un nouveau traitement, c’est transfert adoptif de lymphocytes qui infiltrent les tumeurs, donc transfert de TILs (tumor infiltrating lymphocytes), un essai randomisé [NCT02278887] de John Haanen du NKI aux Pays-Bas. [1] C’est la première fois qu’on a un essai randomisé qui évalue un traitement par TILs – donc vous savez qu’on extrait des lymphocytes à partir d’une tumeur, on fait une biopsie d’une métastase d’un patient, on fait pousser les lymphocytes ex vivo avec de l’interleukine-2 et on les réinjecte aux patients qui, quand même, doit être suffisamment bonne forme pour supporter une chimiothérapie lymphodéplétive au début et après un traitement par IL-2, et aussi qui supporte d’attendre le temps qu’on lui réinjecte ces TILs. Il y a donc quand même une grosse sélection de patients globalement en assez bonne forme. Mais ici, on avait pas mal de patients qui avaient résisté à une immunothérapie par anti PD-1, on a randomisé versus l’ipilimumab. Alors, on va se dire « ce n’est peut-être pas l’idéal, aujourd’hui on sait que l’ipilimumab fait mieux quand il est combiné à un anti-PD-1 », on aurait fait l’essai un peu plus tard, on aurait voulu comparer à la combinaison dite ipi/nivo. Mais, quand même, cela a l’avantage d’avoir été fait : un essai randomisé avec des TILs, c’est la première fois.

Résultats : on a un bénéfice qui est net en faveur des TILs, avec une augmentation de la survie sans progression de 50 % et des taux de réponse qui sont autour de 49 % avec les TILs versus 21 % avec l’ipilimumab – ce qui est, d’ailleurs, un peu mieux que ce qu’on connaît pour l’ipilimumab. Donc c’est très intéressant. Est-ce que cela va changer notre pratique ? Pas tout de suite, parce que, déjà, les TILs, on n’en fait pas partout et c’est quand même très lourd à mettre en place, mais c’est un grand pas en avant.

 
On voit un bénéfice qui est net en faveur des TILs vs piliimumab dans le mélanome métastatique.
 

Administration de pembrolizumab après la chirurgie vs une administration avant et après chirurgie dans le mélanome à haut risque

Le deuxième essai [NCT03698019] est extrêmement important et a été également présenté en session présidentielle par l’investigatrice américaine, Sapna Patel et son équipe, le dernier signataire étant Tony Ribas, bien connu dans le mélanome. [2]  C’est un essai qui a été conduit par le SWOG, le grand groupe académique américain.

Dans cette étude, on est en traitement adjuvant du mélanome. On va donner du pembrolizumab pendant un an après résection d’un mélanome de stade III – c’est le traitement standard – et on compare/randomise versus le même traitement, mais on décale avec les trois premières injections de pembrolizumab qui sont reçues avant la chirurgie. Donc on a un traitement néoadjuvant plus adjuvant versus un traitement adjuvant seulement, donc on décale dans le temps.

Résultats : on a des taux de réponse pathologiques qui sont quand même assez significatifs. C’est moins que ce qu’on a dans les essais non randomisés avec la combinaison d’ipilimumab plus nivolumab avec les deux injections, où on est plutôt autour de 50-60 % de réponses complètes ou presque complètes sur le plan pathologique. Ici, on est plutôt à des taux un peu moins importants, de type 20-30 %. Par contre, on diminue le risque de récidive de 50 % à peu près. Donc on est quand même assez ébahi par ces résultats et on a bien envie de pouvoir commencer notre traitement adjuvant avant d’opérer nos patients. Alors attention, on parle de patients qui ont un mélanome de stade III palpable ou visible, qui est cliniquement visible. Donc ce ne sont pas les ganglions sentinelles positifs, ce n’est pas les IIIA. Mais c’est quand même quelque chose qui est très important et qui, je pense, va faire son chemin et va changer nos pratiques.

 

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