Lille, France – Les pédiatres francophones constatent, depuis quelques années, une augmentation des cas d’allergies alimentaires et d’anaphylaxies chez les enfants. Ces derniers sont de plus en plus jeunes à présenter des polyallergies et des polysensibilisations, portant sur des allergènes à haut potentiel anaphylactique comme l’arachide.

Dr Stéphanie Lejeune
Lors du congrès annuel des Sociétés Françaises de Pédiatrie , la Dr Stéphanie Lejeune, pneumo-allergologue pédiatrique (CHRU de Lille) et membre de CIIL Équipe OplnfIELD, INSERM 1019 (Institut Pasteur de Lille) est revenue les dernières données concernant l’allergie à l’arachide.
La prévalence de l’allergie à l’arachide en Europe est de 1,6 % chez les enfants (antécédents ou test de provocation orale positif). « En France, la prévalence de cette allergie a augmenté au cours des dernières années », commente la Dr Stéphanie Lejeune.
Les estimations se situaient entre 0,3 et 0,75 % selon une publication de 2005, de 0,7 % (enfants âgés de 2 à 5 ans) et de 0,6 % (6-17 ans) dans une seconde publication de 2005.
Les dernières données qui proviennent de la cohorte néonatale ELFE (enfants nés en 2011) évaluent à 0,93 le pourcentage des enfants allergiques à l’arachide à l’âge de 5,5 ans en moyenne. 59 % d’entre eux présentent des allergies multiples[1].
Sévère et imprévisible
L’allergie à l’arachide est une allergie sévère : c’est le premier pourvoyeur d’anaphylaxie (la forme d’allergie IgE-médiée la plus sévère) chez l’enfant, aux Etats-Unis comme en Europe, et dans une moindre mesure en Asie[2].
Cette sévérité de l’allergie à l’arachide est confirmée par les données du registre européen des anaphylaxies entre 2007-2018, où, sur les 1962 cas d’anaphylaxie alimentaire survenus chez les moins de 18 ans, 23 % étaient dus à l’arachide[3].
Globalement, 85 % des cas d’anaphylaxie à l’arachide survenaient avant l’âge de 18 ans. « Cette allergie est sévère également parce que la dose réactogène est faible : moins d’une cuillère à café de beurre de cacahuète dans 66 % des cas[3] », souligne la pneumopédiatre.
D’après l’étude française, belge et luxembourgeoise MIRABEL publiée en 2016 chez les moins de 16 ans (âge médian au diagnostic de 3 ans)[4], 28 % des enfants allergiques à l’arachide cumulaient un asthme, une dermatite atopique et une autre allergie alimentaire et 30 % avaient déjà dû faire face à une anaphylaxie. Le risque d’anaphylaxie était notamment associé à la période de l’adolescence et à un antécédent d’asthme. Là aussi, les doses déclenchantes étaient faibles, avec une médiane de 125 mg de protéine (une cacahuète équivaut à 150-200 mg de protéines).
Enfin, l’allergie à l’arachide est sévère car elle entraîne encore des décès, d’après le réseau d’allergo-vigilance entre 2002-2018, où 7 décès sur 18 répertoriés en France étaient dus à l’arachide[5].
Au Royaume Uni, 14 % des décès enregistrés sur les 152 recensés (période 1992-2018) avaient pour cause l’ingestion d’arachide[6]. Cette allergie sévère est par ailleurs imprévisible. Le recueil européen des anaphylaxies le confirme avec, dans plus d’un cas sur deux, la survenue de l’anaphylaxie hors du domicile. C’est également vrai pour les décès. Enfin, l’impact sur la qualité de vie est certain ; pour plus de la moitié des parents, l’allergie à l’arachide de leur enfant est source d’une « grande » et « énorme » inquiétude.
Des espoirs
De façon encourageante, deux avancées ont été rapportées lors du congrès des sociétés françaises de pédiatrie qui pourraient limiter la survenue de réactions sévères.
En termes de prévention d’abord, la Société française d’allergologie recommande désormais d’introduire l’arachide entre 4 et 6 mois (comme pour l’ensemble des allergènes alimentaires). Les données cliniques ont montré que cette introduction précoce permettait de limiter les événements ultérieurs.
Aussi, un nouveau médicament d’immunothérapie orale à base d’arachis hypogaea devrait bientôt être commercialisé en France pour faciliter et standardiser la désensibilisation.
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Crédit image de Une : Dreamstime
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Citer cet article: Allergie à l’arachide : une allergie grave, en augmentation - Medscape - 20 juin 2022.
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