Variole du singe : attention à la stigmatisation des populations bi et homosexuelles, prévient l’OMS

Peter Russell

3 juin 2022

Royaume-Uni – Alors que circulent des messages qui tendent à associer la variole du singe aux populations exclusivement homosexuelles et bi, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) met en garde contre une possible stigmatisation de ces communautés [1].

Informations erronées

Certaines informations sur l'épidémie de monkeypox se sont concentrées sur le fait qu’une proportion importante des cas récemment signalés qui ont été détectés chez des hommes homosexuels et bisexuels. Et effectivement, la variole du singe peut se transmettre d'une personne à une autre par contact sexuel. Mais ce n’est pas à proprement parlé une maladie sexuellement transmissible et elle peut aussi se transmettre par d'autres contacts physiques étroits, ou via les vêtements, la literie ou des ustensiles de cuisine utilisés par une personne contaminée.

Des messages circulant sur Internet et attribuant la maladie à la communauté gay ont attiré l'attention de l’OMS, qui a mis en garde contre leur effet "stigmatisant". Cette dernière a qualifié les affirmations d’erronées et a précisé que « toute personne ayant un contact physique étroit, de quelque nature que ce soit, avec une personne atteinte de la variole du singe court un risque, quels que soient son identité, ses activités, les personnes avec lesquelles elle choisit d'avoir des rapports sexuels ou tout autre facteur ».

Stigmatiser « ne fera qu'empirer les choses »

Elle a averti que « la stigmatisation ne fera qu'empirer les choses et empêchera de mettre fin à cette épidémie aussi vite que possible ».

L'organisme des Nations Unies, l'ONUSIDA, s'est dit, lui, préoccupé par le fait que certains commentaires et reportages des médias utilisaient un langage et des images, notamment des représentations des LGBTI et des Africains, qui renforçaient les stéréotypes homophobes et racistes.

 
La stigmatisation ne fera qu'empirer les choses et empêchera de mettre fin à cette épidémie aussi vite que possible.
 

Matthew Kavanagh, directeur exécutif adjoint de l'ONUSIDA, a expliqué au Monde : que l’expérience montre que ce type de stigma « affaiblit les politiques de santé » et qu’il revient aux « états et aux médias de contrer ces messages en y opposant une information scientifique sur les vrais risques de la maladie ». « Si nous permettons à ce type de messages de se diffuser et de s’implanter, cela aura des conséquences à long terme, a-t-il ajouté. Une approche scientifique donne de meilleures chances de contenir cette épidémie ».

Par ailleurs, il a souligné que « cette maladie peut toucher n'importe qui » et a exhorté les médias à fonder leurs reportages sur les mises à jour régulières publiées par l'OMS.

« Proportion notable »

Le 16 mai, l'Agence de sécurité sanitaire du Royaume-Uni (UKHSA) et l'Association britannique pour la santé sexuelle et le VIH ont alerté les cliniques de santé sexuelle de la possibilité d'une transmission communautaire du virus de la variole du singe parmi les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (HSH). Cette décision fait suite aux enquêtes menées sur quatre cas liés entre eux, tous identifiés comme homosexuels, bisexuels ou autres HSH.

Dans une mise à jour sur le monkeypox mardi, l'UKHSA a annoncé un total de 71 cas à ce jour et a déclaré qu'une « proportion notable » avait été observée chez des personnes homosexuelles, bisexuelles et HSH.

Selon le Dr Jake Dunning, consultant en maladies infectieuses et en maladies infectieuses à haut risque au Royal Free Hospital de Londres, la raison de ce phénomène est encore à l'étude.

Le Dr Dunning a déclaré qu'au lieu de spéculer sur les raisons pour lesquelles les cas se sont concentrés jusqu'à présent dans la communauté gay et bisexuelle, « il importe de se renseigner sur les antécédents sexuels ».

Il a ajouté qu’une surveillance a déjà été mise en place pour vérifier si des cas se produisent chez des personnes qui ne sont pas homosexuelles, bisexuelles ou d'autres hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes. « Il ne nous reste donc plus qu'à attendre que les données émergent », a-t-il ajouté.

En attendant, la position de l'OMS est la suivante : « Stigmatiser des groupes de personnes en raison d'une maladie n'est jamais acceptable. Elle peut faire obstacle à l'arrêt d'une épidémie car elle peut empêcher les gens de chercher à se faire soigner et entraîner une propagation sans détection. »

 

L’article a été publié initiallement sous le titre « Plea to Avoid Stigmatising Gay and Bisexual Men Over Monkeypox ». Traduit et adapté par Stéphanie Lavaud.

 

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