Face à la crise d’attractivité, des établissements prennent soin de leurs soignants

Christophe Gattuso

Auteurs et déclarations

1er juin 2022

France — Pour faciliter le maintien dans l’emploi et prévenir les risques psychosociaux de ses professionnels de santé, les centres hospitaliers de Créteil (94) et de Villeneuve-Saint-Georges (94) ont mis en place des actions visant à améliorer leur qualité de vie au travail. Depuis 4 ans, le groupement hospitalier de territoires (GHT) du Val-de-Marne allie l’accès à des services personnalisés (massage, coiffeur, salle de sport), l’aide au logement et un suivi psychologique pour améliorer le bien-être de ses soignants.

Le cocooning pour une qualité de vie CHIC

Confronté depuis plusieurs années à une crise d’attractivité sans précédent, l’hôpital public peine à recruter infirmières, aides-soignantes et médecins. La crise du Covid n’a rien arrangé. Des établissements essaient pourtant de trouver la martingale pour améliorer le quotidien de leurs équipes. C’est le cas des centres hospitaliers de Créteil (CHIC) et de Villeneuve-Saint-Georges (CHIV), dans le Val-de-Marne. Les deux établissements du GHT Confluence ont pris le taureau par les cornes en créant en 2018 un département Qualité de vie au travail (QVT). Initialement constitué par les deux assistants sociaux des deux établissements, une psychologue et un référent handicap, l’équipe a été complétée en 2020 par un conseiller prévention. « A l’origine, nous étions confrontés à des arrêts maladie de longue durée avec des retours difficiles et un fort absentéisme des soignants », explique Daniel Wahl, assistant social du personnel et responsable du département QVT.

La crise sanitaire a bouleversé le programme mais aussi donné lieu à de nouvelles initiatives. « Nous avons créé « la Bulle » à Villeneuve-Saint-Georges et « le Cocon », à Créteil, deux espaces d’accueil des équipes hospitalières », décrit Daniel Wahl. Pendant cette période très éprouvante, les 5 000 salariés des deux établissements ont ainsi pu bénéficier de moment de détente, de séances de massage ou de réflexologie. Des « cocons à micro-siestes » Nap&Up et même un coiffeur ont été mis à leur disposition à l’hôpital. « Pendant le Covid, les personnels ont apprécié fortement que l’on s’intéresse à eux de façon individuelle et non collective, comme c’est généralement le cas. En 2022, nous en avons fait un axe de travail prioritaire », explique Aurélien Stival, directeur des ressources humaines du CHIC et coordonnateur RH au niveau du groupe hospitalier des Hôpitaux Confluence.

Au-delà du bien-être, la formation

S’il continue de proposer une attention personnalisée, le département QVT entend inscrire son action au plus près des soignants dans le cadre d’équipes mobiles. « Nous essayons de repérer ce dont ces équipes ont le plus besoin en tenant compte de plusieurs indicateurs comme l’absentéisme, les troubles musculo-squelettiques, les retours de formation… » ; analyse Daniel Wahl. Lors de ses interventions, le département veut dépasser la simple action de bien-être. « Nous essayons de mettre du sens et de faire un peu de formation utile pour apprendre par exemple à mieux gérer son temps ou à mieux dormir », détaille le responsable QVT. Le département a aussi ouvert une salle de sport accessible gratuitement 7 jours/7 au sein même de l’établissement à Créteil à destination des équipes. Dans le cadre de la mobilité douce, le département est en train de mettre en place un service de maintenance de vélo pour les personnels, associé à une formation au code de la route.

L’idée est donc d’aider les soignants et les personnels à se sentir mieux sur le long terme. « Nous voulons être davantage sur des actions préventives en adaptant le lieu de travail pour que les gens aient envie de travailler », poursuit Daniel Wahl.

 
Nous voulons être davantage sur des actions préventives en adaptant le lieu de travail pour que les gens aient envie de travailler. Daniel Wahl
 

Pour l’heure, le département QVT ne dispose pas d’un budget dédié mais a bénéficié de financement par les établissements mais aussi, selon les actions, du soutien financier de la MGEN, de la MNH ou de GMF, par exemple…

Une aide au logement et à la garde d’enfants

L’aide concerne également le suivi psychologique. « Beaucoup de monde est allé voir un psychologue au plus fort de l’épidémie de Covid, explique Daniel Wahl. La crise a entraîné un grand nombre de séparations, de signalements de violences conjugales et de recherches d’appartements. »

Même si les possibilités sont restreintes, le département QVT propose aussi une aide pour faciliter l’accès au logement social à des tarifs environ 25% moins chers que les prix du marché.

Pour faciliter la garde des enfants de soignants, deux nouvelles crèches doivent ouvrir le 1er juin au CHIC pouvant accueillir 90 berceaux (dont 30 personnes extérieures).

Selon le responsable du département QVT, l’ensemble des actions menées portent leurs fruits. « Les gens restent », assure Daniel Wahl. Illustration qu’au-delà de la rémunération, la qualité des conditions de travail est primordiale pour restaurer l’attractivité des métiers du soin à l’hôpital.

La pénurie malgré tout

Sollicité, un représentant syndical du CHIC salue l’action de la direction pour améliorer la qualité de vie, notamment pendant la crise : « On voit qu’il y a une réelle attention pour le personnel, des efforts pour améliorer le quotidien, c’est indéniable. Cela peut être les food trucks pendant la crise ou l’installation de bancs pour permettre au personnel de pique-niquer le midi. » Malgré ces actions pour être plus attractifs et pour se démarquer de l’AP-HP ; les deux établissements du Val-de-Marne connaissent toujours des difficultés pour recruter. « Il y a une pénurie de personnels et toujours un fort absentéisme, explique ce syndicaliste. Les cadences restent importantes avec des heures sup et des difficultés à prendre les récupérations comme prévu. » L’un des sujets les plus importants concernant les conditions de travail porte sur le rythme de travail. « Les jeunes veulent être embauchés sur des plages de journées de 12h et non de 7h30 pour avoir plus de jours de récupération. Les établissements le mettent de plus en plus en place pour recruter mais cela n’est pas accepté par tout le monde, notamment les parents qui souhaiteraient pouvoir voir davantage leurs enfants. » Ce thème des cadences sera assurément l’un des chantiers à mener au niveau national pour rendre l’hôpital plus attractif dans les prochaines années.

 

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