France — Avoir un assistant médical, oui, mais pour quels bénéfices ? Deux médecins généralistes nous confient leur satisfaction d’avoir sauté le pas, avec l’aide financière de la CPAM. Cette nouvelle recrue – puisqu’il s’agissait dans les 2 cas d’une femme – leur a permis de réduire leur temps de travail administratif, d’accueillir davantage de patients et d’exercer dans des conditions plus sereines, en évitant le burnout.
Les médecins qui recrutent sont à 90% des médecins généralistes
Les assistants médicaux ne résoudront pas à eux seuls les problèmes de désertification médicale mais ils peuvent contribuer à faciliter la vie des médecins et améliorer l’accès aux soins des patients. Depuis la création de ce métier à l’été 2019, environ 2 700 assistants médicaux ont été recrutés par des médecins libéraux en France, à 80% des généralistes, selon les statistiques de la Caisse nationale d’Assurance maladie. « On observe une réelle dynamique mais deux obstacles subsistent : l’inadaptation des locaux dans certains cabinets qui ne permettent pas de recruter un assistant, et la contrepartie de devoir recevoir un plus grand nombre de patients qui peut freiner les médecins », observe le Dr Margot Bayart, vice-présidente de MG France.
Un soutien contre le burn-out
La généraliste de Réalmont (Tarn) défend activement ce nouveau métier. Elle-même a embauché une assistante médicale juste avant la crise Covid et elle ne le regrette pas. « Aujourd’hui, la situation démographique est très compliquée, on est dans le sauve-qui-peut. Avoir un assistant médical, c’est un peu la survie. Je n’avais pas le choix ou je passais en burnout ! », confie avec une grande sincérité la généraliste. Ces deux dernières années, un centre médical a fermé dans un bourg voisin, deux médecins sont partis à la retraite, et le Covid est passé par là. « Joëlle, notre assistante médicale, nous a rendu des services fabuleux, elle nous a épaulés dans la création d’un centre Covid, a organisé les rappels de vaccin, et elle m’a aidée à tenir le choc quand mon collègue a déplaqué en septembre 2021. »
Les tâches remplies par les assistants médicaux sont diverses. L’avenant 7 qui a donné naissance à ce nouveau métier stipule bien que le médecin est libre de choisir les missions qu’il veut confier à l’assistant médical en fonction de sa pratique, de son organisation et de ses besoins.
Sérieux coup de main sur l’administratif
Les partenaires conventionnels prévoyaient initialement que l’assistant médical aiderait au déshabillage des enfants ou des personnes âgées et en prenant les constantes (taille, poids, tension…). Mais l’assistant médical fait bien plus que ça. « Mon assistante assure pour un tiers de son temps environ des tâches de secrétariat en aidant les patients à obtenir des rendez-vous chez des confrères spécialistes. Quand elle obtient un scanner ou une IRM dans un délai raisonnable, les patients sont contents », explique le Dr Bayart
L’assistante permet aussi de décharger le médecin de tâches administratives : « elle fluidifie le parcours, débrouille les dossiers complexes en récupérant des papiers, les antécédents d’un dossier. » Elle vérifie si les vaccinations sont à jour, de quand date le dernier frottis ou l’Hémocult, de façon à ce que le médecin dispose du dossier le plus complet possible au début de la consultation. « Elle organise le cabinet pour fonctionner de façon optimale, nous fait gagner du temps, fluidifie le parcours du patient et parfois, elle donne un coup de main à l’infirmière Asalée, bref, elle est une véritable cheville ouvrière », poursuit le Dr Bayart.
Le soutien de l’assistant a aussi bien des vertus sur le bien-être psychique des praticiens. « L’assistante médicale allège notre charge mentale quand elle est là, ajoute le Dr Bayart. Si la médecine générale survit, elle sera de plus en plus accompagnée par des assistants pour accueillir plus de patients ». Grâce à Joëlle, la généraliste du Tarn a vu sa patientèle passer de 1300 à 1700 patients en deux ans.
Un binôme en consultation
Dans le village de Vayrac au Nord du Lot, le Dr Olivier Darreye, 60 ans, a lui aussi franchi le pas en septembre dernier. « Quand mon ancienne associée est partie, je me suis retrouvé seul, explique-t-il. Une ancienne interne non thèsée est restée avec moi et est devenue mon adjointe et j’ai sollicité la création d’un poste d’assistant médical que l’on se partage 35 heures par semaine. » Le médecin le reconnaît aujourd’hui, avant de se lancer, il n’était pas au début d’un enthousiasme extraordinaire. Les choses ont bien changé depuis l’arrivée au cabinet de Mélanie. « C’est un vrai bonheur, c’est spectaculaire ce qu’elle nous apporte. » Au-delà de la partie administrative ou de la gestion des stocks de matériel, l’ancienne auxiliaire de vie à domicile de 34 ans assure une partie de son travail de façon plus originale. Elle assiste le Dr Darreye pendant les consultations en se plaçant derrière l’ordinateur, et remplit le logiciel patient, et en préparant les ordonnances sous la supervision du médecin qui les vérifie et les signe. « On a créé cette manière de travailler en binôme, cela marche car mon assistante connaît très bien le logiciel, ayant été formée à son utilisation, explique le Dr Darreye. Au final, j’arrive à recevoir en consultation 4 personnes par heure au lieu de 3 en gardant une bonne qualité de travail pour moi et un temps médical de qualité pour le patient. »

Quatre patients à l’heure au lieu de trois
Le résultat ne s’est pas fait attendre. En six mois, le généraliste est devenu le médecin traitant de 300 patients en plus. « J’ai déjà rempli mes quotas attendus par l’Assurance maladie », avance-t-il. Le généraliste est particulièrement satisfait de cette organisation du travail qui permet à tout le monde dans la CPTS Nord Lot qu’il préside, d’avoir accès à un médecin traitant. Le médecin souhaite promouvoir les assistants médicaux et les infirmières de pratique avancée (IPA) auprès de ses confrères mais aussi changer l’image du médecin qui travaille tout seul dans son coin. « Sans être stakhanoviste, il est possible de gagner en productivité et d’avoir une patientèle plus fournie sans y laisser sa peau », explique le Dr Darreye, qui compte désormais 1300 patients. Son assistante, Mélanie Teyssère, est aussi ravie de son nouveau métier, qu’elle considère comme un « soutien » au médecin. « Je suis très satisfaite, il y a du travail et je ne vois pas le temps passer. Pendant les consultations, je me fais discrète, je reste dans mon coin et les patients ne sont pas gênés par ma présence. » La jeune femme est persuadée que son métier a vocation à se développer et qu’il aidera les médecins à consacrer plus de temps médical au patient.
Qui peut bénéficier d’un assistant et comment ?
La fonction d’assistant médical est accessible à des soignants (infirmières, aides-soignants) et des non soignants (secrétaires médicales). L’assistant doit suivre une formation spécifique de 384 heures s’articulant autour de 4 blocs de compétences (suivi du parcours du patient, accueil et prise en charge administrative, hygiène et qualité, assistance opérationnelle au praticien). Le salaire est encadré avec des échelons (de 1 642 à 1 943 euros brut par mois pour un temps plein de 35 heures par semaine, selon la grille des salaires des personnels de cabinets médicaux).
Les médecins disposent d’une aide financière dégressive de l’Assurance maladie au recrutement d’un assistant médical (voir tableau ci-dessous). Pour en bénéficier, ils doivent remplir quelques conditions : avoir une activité minimale (et au moins 640 patients les ayant choisi comme médecin traitant pour un généraliste), exercer en secteur 1 ou être adhérent à l’Optam ou à l’Optam-CO (dépassements encadrés), exercer en mode regroupé avec au moins un autre médecin dans le même cabinet (une dérogation est possible pour les médecins en zone sous-dense), s’inscrire dans une démarche d’exercice coordonné (MSP, équipe de soins primaire ou spécialisée, CPTS…). En contrepartie de l’aide conventionnelle, le médecin généraliste s’engage à augmenter sa patientèle adulte médecin traitant et sa file active (de 0 à 35% selon la taille de sa patientèle). S’il exerce une autre spécialité, le médecin doit seulement augmenter sa file active.
Les options de financement : 2 principales et 1 spécifique |
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Participation * de l’Assurance Maladie |
Option 1 : 1/3 d’assistant médical |
Option 2 : 1/2 assistant médical |
Option 3 (en zone sous-dense uniquement) : 1 assistant médical |
Année 1 |
12 000 € |
18 000 € |
36 000 € |
Année 2 |
9 000 € |
13 500 € |
27 000 € |
Année 3 |
7 000 € |
10 500 € |
21 000 € |
* Des financements majorés sont prévus pour les médecins dont la file active et/ou la patientèle adulte MT est très élevée. Source : Cnam
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Crédit image de Une : Dreamstime
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Citer cet article: Quand l’assistant médical redonne du temps et l’envie d’exercer au médecin - Medscape - 11 mai 2022.
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