Dans l’Actu : le cancer de la prostate

Ryan Syrek

Auteurs et déclarations

29 avril 2022

 

Afin de réduire l'anxiété des patients et limiter les traitements inutiles, certains experts appellent à un changement majeur dans la façon dont certaines tumeurs de la prostate sont étiquetées (voir infographie). Aux États-Unis, alors qu’on observe depuis quelques années une légère augmentation des diagnostics de cancer de la prostate métastatique, des scientifiques suggèrent de revoir la classification de certaines tumeurs. Des découvertes récentes sur le dépistage et les facteurs de risque viennent également d’être publiées, et plusieurs études sur de nouvelles stratégies thérapeutiques sont actuellement en cours.

Tumeurs GS6 : ne m’appelez plus « cancer »

Il est conseillé aux hommes atteints de tumeurs de la prostate à faible risque de suivre une "surveillance active" car les tumeurs de bas grade entraînent rarement des dommages alors que les traitements peuvent provoquer des effets secondaires non négligeables, notamment des troubles sexuels et incontinence urinaire. Mais parce que ces lésions sont encore appelées "cancer", de nombreux hommes optent pour une intervention qui ne serait pas nécessaire, selon un article récemment publié dans le Journal of Clinical Oncology . [1] Abandonner le mot "cancer" pour les tumeurs GS6, qui représentent par exemple la moitié des 270 000 diagnostics de cancer de la prostate par an aux États-Unis, n'est pas une idée nouvelle. En 2011, un panel indépendant convoqué par les National Institutes of Health l'avait déjà proposée. Avec l'augmentation spectaculaire de la surveillance active chez environ 60 % des patients atteints de GS6, le moment est peut-être venu pour un changement d'appellation.

Dépistage : impact des stratégies

Distinguer les tumeurs de bas grade des tumeurs à haut risque est plus important que jamais compte tenu de l'augmentation de l'incidence du cancer de la prostate métastatique aux États-Unis. En 2008, le US Preventive Services Task Force avait recommandé de ne pas effectuer de dépistage systématique de l'antigène spécifique de la prostate (PSA) chez les hommes de plus de 75 ans. En 2012, ils avaient étendu cette recommandation à tous les hommes. Or entre cette période et 2018, chez les hommes de 45 à 75 ans, l'incidence du cancer de la prostate métastatique a augmenté de 41 %, ce qui s'est traduit par une variation annuelle de 5,3 %, selon un rapport publié dans le JAMA . [2] Chez les hommes âgés de 75 ans ou plus, les taux ont bondi de 43 % jusqu'en 2018, pour une variation de 6,5 %. Les chercheurs n'ont pas trouvé d'augmentation des décès dus au cancer de la prostate, mais il est peut-être trop tôt pour l'affirmer compte tenu de la survie médiane de 5 à 7 ans,

Concernant le dépistage du PSA, de nouvelles données indiquent que prendre en compte les facteurs non génétiques influençant les niveaux de PSA permettrait d'améliorer la précision du test. Dans une vaste étude[3] d'association à l'échelle du génome sur les niveaux de PSA chez les hommes sans cancer de la prostate, les chercheurs ont identifié un total de 129 variants génétiques associés au PSA et les ont utilisés pour construire un score polygénique afin de mesurer la prédisposition individuelle à des niveaux élevés de PSA. Les chercheurs ont ensuite validé le score polygénique en l'appliquant à deux cohortes d'essais de prévention du cancer : 5 737 hommes inclus dans l'essai Prostate Cancer Prevention Trial (PCPT) et 22 247 participants à l'essai de prévention du cancer SELECT. Ils ont constaté que le score polygénique PSA représentait 7,3 % de la variation des niveaux de PSA de base dans la cohorte PCPT et 8,7 % de la variation dans la cohorte SELECT. Les variations n'étaient pas associées au cancer de la prostate dans l'une ou l'autre des cohortes, ce qui indique qu'elles seraient dues à des facteurs bénins. L'utilisation du PSA génétiquement ajusté aurait évité environ 20% de biopsies finalement négatives.

Facteurs de risques : nitrites et nitrates pointés du doigt

En termes de facteurs de risque de développement du cancer de la prostate, une nouvelle étude analysant les données de plus de 100 000 individus, a montré une augmentation de près de 60 % du risque de cancer de la prostate chez ceux qui consommaient fréquemment des produits alimentaires contenant des nitrites. [4] Le risque de cancer de la prostate a augmenté de 58 % (risque relatif, 1,58 ; IC à 95 %, 1,14-2,18 ; P = 0,008), en particulier pour l'exposition au nitrite de sodium. Les aliments riches en nitrates comprennent le jambon, le bacon, la charcuterie et les hot-dogs. Cette étude [de la cohorte NutriNet] n'a trouvé aucune association concernant l'exposition à des sources naturelles de nitrites et de nitrates.

Traitements à l'étude

De nombreuses études sont en cours pour évaluer plusieurs nouveaux traitements contre le cancer de la prostate. L'approche standard est la thérapie de privation androgénique (ADT) plus la radiothérapie. Un essai américain de phase 2 évaluant une stratégie permettant d'éviter l'ADT chez les patients atteints d'un cancer de la prostate à risque intermédiaire défavorable recrute actuellement des participants. Une étude de phase 3 menée en partenariat avec le National Cancer Institute adopte une approche randomisée pour déterminer si l'ADT peut être évitée chez les hommes ayant des scores Decipher à faible risque. Des patients atteints d'un cancer de la prostate métastasé au niveau osseux et qui ont déjà subi une prostatectomie ou une "radiothérapie définitive" ont été inclus dans un essai de phase 2 testant l'ajout de dichlorure de radium-223 à la radiothérapie stéréotaxique corps entier (SBRT).

 

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