Paris, France— Un test génétique doit être proposé en cas de pancréatite chronique idiopathique ou d’au moins deux pancréatites aiguës inexpliquées. Détaillée aux Journées francophones d’hépato-gastroentérologie et d’oncologie digestive
(JFHOD, 17-20 mars 2022), la découverte par une équipe française d’un nouveau variant génétique qui expliquerait ou faciliterait l’apparition de pancréatites chez presque un patient sur dix[1] est un argument pour demander une nouvelle analyse génétique si une première est négative, en particulier si elle est ancienne ou incomplète.
70 à 80 % des pancréatites chroniques (PC) ont pour cause l’alcoolisme chronique. Dans 15 à 20 % des cas, celle-ci est due à une cause rare de type métabolique, auto-immune, obstructive, infectieuse, iatrogène ou génétique. Enfin, 5 à 10 % sont idiopathiques.
« L’apparition d’une pancréatite chronique étant le plus souvent le résultat d’une combinaison de facteurs génétiques et environnementaux », a introduit le Dr Solène Dermine du service de pancréatologie à l’hôpital Beaujon, (Clichy-la- Garenne), la règle est de réaliser un test génétique en cas de pancréatite chronique idiopathique ou d’au moins deux épisodes de pancréatite aiguë sans cause évidente, ainsi qu’en cas d’antécédents familiaux de pancréatites chroniques idiopathiques. »
Au cours des quinze dernières années, plusieurs variants génétiques ont été décrits comme cause possible ou facteur de prédisposition de la PC. « Il existe les pancréatites héréditaires – minoritaire - liées à PRSS1 (gène autosomique dominant codant pour le trypsinogène cationique ; moins de 1 % des cas), détaillait la chercheuse, et les pancréatites associées à des gènes de prédisposition, de type SPINK1, CFTR (canaux chlore des cellules canalaires) et plus récemment CTRC (chymotrypsine C ; à transmission autosomique récessive) dont l’imputabilité est variable ».
Aujourd’hui, un panel de huit gènes est utilisé en routine lors du testing des pancréatites incluant PRSS1, SPINK1 (inhibiteur du trypsinogène), CFTR, CTRC et d’autres variants décrits dans la pancréatite idiopathique ou alcoolique de type CaSR (altération de l’homéostasie calcique, association avec une consommation chroniques d’alcool), CPA1 (carboxypeptidase de type 1), TRPV6 (altération de l’homéostasie calcique) et CEL-HYB (altération de l’homéostasie lipidique).
De l’utilité de tester les patients à la lumière des connaissances actuelles
Si les données génétiques ont progressé au fil du temps, les méthodes de détection des variants ont également évolué. Par le passé, deux types de méthodes étaient utilisés pour identifier les variantes génétiques avec, d’une part, le dépistage des variants connus par PCR et, d’autre part, la détection des variants inconnus à l’aide de méthodes de balayage (chromatographie à haute pression en condition dénaturante).
Actuellement, le séquençage de nouvelle génération (NGS) ciblé sur les gènes d’intérêt est utilisé comme outil de diagnostic, pour tester simultanément un grand nombre de gènes. « L’objectif était d’évaluer la rentabilité du testing par NGS à la lumière des connaissances actuelles concernant les pancréatites aigües idiopathiques et d’identifier de nouveaux variants génétiques. Nous avons ainsi testé de nouveau des patients atteints de pancréatite aiguë ou chronique récurrente non alcoolique et non biliaire idiopathique ou associée à un ou plusieurs variants (PRSS1, SPINK1 et CFTR) qui avaient été testés entre 2002 et 2016 », explique Solène Dermine.
Le panel de gènes NGS comprenait les gènes PRSS1, SPINK1, CFTR, CTRC, CASR, CPA1 et TRPV6. L’allèle CEL-HYB a été testé par PCR spécifique.
Un nouveau variant présent chez presque un patient sur dix
330 patients d’âge médian de 51 ans, ont été inclus. La pancréatite était définie comme idiopathique ou associée à un ou plusieurs variants CFTR dans respectivement 39 et 61% des cas. « 27 patients sur 330, soit 8,2 %, se sont avérés porteurs d’un variant non trouvé précédemment », décrit le Dr Dermine.
« Nous avons identifié un total de 28 nouveaux variants : PRSS1(n=1), SPINK1 (n=0), CFTR (n=0), CTRC (n=14), CASR (n=3), CPA1 (n=2), TRPV6 (n=7) et CEL-HYB (n=1). Parmi ces variants, 11 n’ont jamais été rapportés dans la littérature. «Se pose la question de la pertinence de ces nouveaux variants (imputabilité - pathogénicité) ».
Chez dix patients n’ayant pas présenté de variants PRSS1, SPINK1 et CFTR précédemment, un variant CTRC a été mis en évidence chez 7 patients, un variant TRPV6 chez deux patients, un variant CPA1 et un variant TRPV6 chez un patient.
« Dans ce travail, a conclu Solène Dermine, nous avons déterminé un nouveau variant qui pourrait expliquer ou faciliter l’apparition de pancréatite chez presque un patient sur dix.
Cela démontre la rentabilité du testing par NGS à la lumière des connaissances actuelles. L’évolution des connaissances et des progrès des analyses génétiques justifient donc de tester à nouveau des personnes dont une analyse génétique effectuée par le passé s’est révélée négative, surtout si celle-ci est ancienne ou incomplète ».
Le Dr Solène Dermine déclare n’avoir aucun lien d’intérêt avec le sujet de la présentation.
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Citer cet article: Pancréatite idiopathique : un nouveau variant découvert chez un patient sur dix - Medscape - 31 mars 2022.
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