Nice, France – Le diabète est l'exemple parfait d'une maladie chronique qui résulte de l'interaction entre les gènes et l'environnement. Mais jusqu'à aujourd'hui, les travaux de génétique ont pu décevoir : impossible par exemple de prédire le développement du diabète de type 2 alors qu'on a découvert plus de 200 variants génétiques associées à la forme la plus commune de diabète. A l'occasion du congrès annuel de la société francophone du diabète (SFD), son président, le Pr Jean-François Gautier (endocrinologue, hôpital Lariboisière, Paris) a cependant rappelé l'intérêt, toujours d'actualité, de la génétique. Que ce soit pour le diabète de type 2 ou les formes rares de diabète, mieux comprendre l'étiologie du diabète grâce à la génétique permettrait de proposer un traitement adéquat, a argumenté le spécialiste lors d'une conférence de presse.
Des arguments en faveur d'une recherche génétique
Jean-François Gautier a rappelé que plus de 250 variants génétiques étaient connus pour être associés au diabète de type 2 mais que pris tous ensemble, ils expliquent moins de 20 % de l'héritabilité du DT2. Si ces anomalies génétiques ne permettent donc pas de prédire efficacement le développement d'un DT2, en trouver d'autres permettrait de stratifier les patients – qui représentent plus de 5 % de la population française – selon leur profil génétique. Les sous-groupes regrouperaient les patients selon certains points communs (mise en œuvre précoce d’un traitement par insuline, risque élevé de complications, insulinorésistance importante).
L’augmentation de la prévalence des formes atypiques de diabète est un autre élément en faveur de la poursuite de travaux ayant pour objectif de mettre à disposition du clinicien des données génétiques qui guident le diagnostic. De fait, le diabétologue doit faire face de plus en plus souvent à des formes atypiques de diabète « qui surviennent jeunes avec des atypies sur la circonstance de découverte, sur l'apparition de complications ou même la nécessité d'un traitement insulinique très précoce».
Des formes étiologiques bien identifiées, d'autres non
Il existe des formes étiologiques de diabète bien définies telles que le DT1, les diabètes monogéniques identifiés (MODY), le diabète pancréatique ou encore les diabètes secondaires à une endocrinopathie (Cushing, acromégalie). Ils ont comme marqueur diagnostique respectif le dosage des anticorps, la présence d'un variant génétique connu, l'imagerie pancréatique et le dosage hormonal.
« Quand on demande une recherche de diabète monogénique pour un patient jeune avec un diabète sans anticorps, dans 50 à 80 % des cas on ne trouve pas de variant » indique le Pr Gautier qui poursuit « il s'agit alors de diabètes monogéniques non identifiés (MODYx) ». Ils font partie des formes de diabète encore mal identifiées par manque de marqueur diagnostique, comme le DT2, le DT1B (DT1 sans anticorps), le DT2 cétosique, c'est-à-dire qui décompense facilement sans facteur de précipitation ou encore les diabètes révélés par des médicaments (immunothérapie et diabète fulminant, neuroleptique et DT2 cétosique, cortisone et DT2).
Finalement, est-ce important de disposer du diagnostic étiologique ? « Oui, car le traitement en dépend » répond le président de la SFD. DT1A, DT1B et diabète fulminant se traitent par insuline. En revanche, des hypoglycémiants sont prescrits dans le DT2 cétosique, des sulfamides pour les formes HNF1A-MODY3 et MODY1et des fortes doses de sulfamides pour le diabète néonatal (ABCC8 et KCNJ11) par exemple.
GlucoGEN, l'avenir ?
Aujourd'hui, les recherches génétiques, non remboursées, sont peu accessibles car les plateformes génomiques sont peu nombreuses en France. Les délais d'obtention des résultats dépassent largement douze mois. Mais les choses pourraient changer...
« Le diabète est au cœur du Plan France Médecine Génomique 2025 » indique le Pr Gautier. Le protocole national GlucoGEN, présenté au congrès, devrait débuter en septembre prochain. « Ce protocole vise à montrer l'intérêt du séquençage génome entier et des réunions de concertation multidisciplinaire (généticien, diabétologue) pour le diagnostic et la prise en charge du diabète atypique » détaille-t-il.
Plus de 1000 patients concernés, répartis sur une quinzaine de centres, pourront bénéficier d'une analyse génomique. Le protocole est le suivant : soit la demande de recherche génétique suit le cours habituel, soit les médecins utilisent les nouvelles plateformes génomiques, dont les temps de rendu dépendent du nombre de gènes séquencés. Si le séquençage des 20 premiers gènes les plus fréquemment en cause ne donne pas de résultat, ce sont les 70 premiers gènes qui sont séquencés. En cas d'absence de résultat, il y a le séquençage du génome entier.
« C'est un projet important car, à l'issue de ce projet, nous verrons si la caisse primaire d'assurance maladie décide de prendre en charge la recherche génétique pour démêler l'étiologie des diabètes atypiques. » conclut, optimiste, le Pr Jean-François Gautier.
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Crédit image de Une : Dreamstime
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Citer cet article: Diabète : la SFD mise sur l’analyse génétique - Medscape - 28 mars 2022.
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