Présidentielle : le vaste cahier de doléance de l'association nationale des étudiants en médecine

Jean-Bernard Gervais

Auteurs et déclarations

21 février 2022

France— À quelques semaines du premier tour de l'élection présidentielle, l'association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf) a publié un livre blanc qu'elle adresse aux candidats à la présidentielle 2022.

Soit 43 pages, réparties en cinq chapitres, particulièrement exhaustifs. Au-delà des conditions de travail des étudiants en médecine, l'Anemf formule également des propositions pour réformer le système de santé, l'exercice médical, la place de la médecine dans la société. Mais ce sont bien les conditions d'études qui restent primordiales pour l'Anemf, et la résorption de la précarité étudiante. Contrairement à ce que l'on pourrait penser des étudiants en médecine, 23,6% d'entre eux ont songé arrêter leurs études pour des raisons financières, et 29,4% des étudiants en médecine sont boursiers.

 
23,6% d'entre eux ont songé arrêter leurs études pour des raisons financières.
 

375 euros net par mois

Aussi, la mesure phare de l'Anemf est la revalorisation des salaires des externes, qui devraient être portés à 375 euros net par mois. Autres propositions financières conséquentes de l'Anemf : la gratuité des référentiels des collèges des enseignants de spécialités médicales, le renforcement des tutorats, l'ouverture des bourses l'été, une prime d'activités pour les étudiants...

Prévention des risques psychosociaux

Si le financement des études reste un sujet clé, la prévention des risques psychosociaux semble tout aussi important pour l'Anemf : « les risques psychosociaux sont omniprésents dans notre cursus, et conduisent à des situations dramatiques : anxiété pathologique (75%), épisodes dépressifs caractérisés (25%), arrêts d'études, idées suicidaires (19%), jusqu'au suicide lui-même. » L'Anemf demande aux candidats à la présidentielle de rendre obligatoire une formation aux risques psychosociaux, aux personnels qui accueillent des étudiants, mais aussi de sanctionner financièrement les établissements où les risques psychosociaux sont légion.

Formation

Loin de se contenter de formuler des propositions sur les conditions de travail des externes, l'Anemf s'attaque également au vaste chantier de la formation, en pointant le doigt vers les universités, devenues des entreprises, redoublant de concurrence entre elles pour obtenir des crédits. L'Anemf, à ce titre, demande une répartition des moyens juste, équitable et transparente, pour les facultés.  Ces moyens permettraient de recruter plus d'enseignants, d'ouvrir plus de terrains de stages hors CHU, dans les établissements périphériques, mais aussi de former des conseillers d'orientation en santé...

Au niveau qualitatif, l'Anemf plaide également pour l'inclusion des patients dans la formation, le développement de l'enseignement en numérique de santé, ainsi que le développement des sciences humaines.

Cathédrales de l'enseignement médical, les CHU sont en crise : Les HU, par manque de temps, négligent souvent l'enseignement parmi leurs trois missions (enseignement, recherche et soins). Aussi l'Anemf réclame de revoir le système de points SIGAPS « pour rendre la recherche plus attractive », « valoriser les compétences de pédagogie et de recherche », et « sanctuariser le temps nécessaire à la réalisation des trois missions ».

Santé publique

La place du médecin dans la société fait aussi partie des préoccupations de l'Anemf ; la pandémie de covid 19 en a été la preuve la plus probante. Aussi, les médecins se doivent de faire œuvre de pédagogie auprès de la population, notamment sur des questions comme l'antibiorésistance, mais aussi la vaccination, la pratique sportive, ou encore l'éducation sexuelle. L'Anemf n'oublie pas non plus d'aborder la question des migrants et de leur santé, et propose aussi de renforcer la place des professionnels de santé référents pour les migrants, de leur apporter également des soins psychologiques et psychiatriques, et de réformer l'accueil administratif des migrants. La lutte contre les lobbyings pharmaceutiques, le développement de l'esprit critique et la diffusion plus large des connaissances médicales font aussi partie des revendications de l'Anemf.

Quid des partis politiques ?

Interrogé par Medscape, Nicolas Lunel, le président de l'association étudiante confirme que la revalorisation salariale fait partie des mesures urgentes à mettre en oeuvre. « Nous voulons proposer une base de travail pour les cinq prochaines années. Mais l'augmentation de notre rémunération reconnaitra le travail fait par les externes dans les hôpitaux. Toutes les mesures concernant la santé mentale, la lutte contre les violences sexistes et sexuelles sont très importantes, car de nombreux étudiants abandonnent leurs études pour ces raisons. »

 
Nous voulons proposer une base de travail pour les cinq prochaines années. Nicolas Lunel
 

Les candidats à la présidentielle ont-ils été sensibles aux propositions de l'Anemf ?

« Nous n'avons pas pour l'heur eu des retours directs sur le livre blanc, mais des équipes de campagne ont manifesté leur enthousiasme au sujet de nos propositions. Les partis politiques à gauche sont sensibles à nos propositions pour lutter contre la précarité, mais un peu moins sur la liberté d'exercice des médecins. En revanche, les partis de droite sont plus favorables à la liberté d'exercice mais un peu moins sensibles aux mesures que l'on propose d'un point de vue financier. »

 

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