Psychiatrie et santé mentale : Olivier Véran estime qu’un « virage historique » est engagé

Anne-Gaëlle Moulun

Auteurs et déclarations

25 janvier 2022

Paris, France Lors de son intervention en ouverture du congrès de l’Encéphale le 19 janvier, le ministre de la Santé Olivier Véran a estimé que la santé mentale et la psychiatrie avaient fait « des pas de géant depuis cinq ans » et qu’un « virage historique » était engagé. Après une année 2021 marquée par les Assises de la santé mentale et de la psychiatrie, le congrès de l’Encéphale fête ses 20 ans et le ministre en a profité pour saluer les soignants en psychiatrie.

« La donne a changé pour les professionnels »

« Nous avons la volonté de faire de la santé mentale un vrai sujet de société », a déclaré Olivier Véran.

« Du chemin reste à parcourir mais le virage que nous avons pris est historique », a estimé le ministre, qui a souligné, s’adressant aux spectateurs dans la salle où était retransmise son intervention – il est toujours confiné. « Vos disciplines ont fait des pas de géant depuis cinq ans, parfois par la force des choses, c'est vrai, mais aussi, et peut-être même d'abord, parce que nous avons collectivement porté l'ambition de redonner à la santé mentale et à la psychiatrie la place qui leur revient dans notre système de santé. Je ne sais pas si le parent pauvre est devenu l'enfant chéri, restons modestes, mais je sais et vous le savez aussi, que la donne a changé pour les professionnels », s’est emballé Olivier Véran.

 
La démographie est préoccupante et il y a un déficit d’attractivité de la discipline
 

« La santé mentale de nos concitoyens est un élément déterminant dans la gestion de cette crise », a-t-il également déclaré. Ainsi, 68 % des Français déclarent des problèmes de sommeil, 18 % un état dépressif et 23 % un état anxieux. « La démographie est préoccupante et il y a un déficit d’attractivité de la discipline », a-t-il reconnu. Néanmoins, pour lui, « les Assises de la santé mentale et de la psychiatrie ont marqué un tournant majeur avec plusieurs messages essentiels », notamment « la santé mentale est un sujet qui nous concerne tous » et « elle requière une mobilisation collective ».

« Un cap est fixé, avec une feuille de route mise en place il y a trois ans, qui s’est enrichie des mesures du Ségur et des 30 mesures des Assises. Au total, il y a 50 actions-phares dans cette feuille de route », a comptabilisé le ministre.

« Faire sortir la santé mentale de la clandestinité »

Le premier axe, qui consiste à promouvoir le bien-être mental, prévenir et repérer précocement la souffrance psychique, inclut la production de tableaux de bord par Santé Publique France et une enquête, CoviPrev, lancée dès la première semaine du confinement du printemps 2020. Une enquête sur la santé mentale des moins de 11 ans est par ailleurs en cours de mise en place en milieu scolaire, a annoncé Olivier Véran. « Les campagnes de communication de Santé Publique France ont fait sortir la santé mentale de la clandestinité. Nous poursuivrons cette communication », a-t-il indiqué. Par ailleurs, le ministère de la Santé présentera sur ce premier trimestre avec l’Éducation nationale, « une stratégie multisectorielle pour un cadre de référence partagé envers les enfants et les jeunes ». Le développement du programme des premiers secours en santé mentale va par ailleurs se poursuivre, y compris dans les universités.

Concernant la prévention du suicide, le dispositif VigilanS de prévention de la récidive, déployé dans 16 régions a permis d’intégrer 22 000 patients et devrait bénéficier en 2022 d’une couverture plus large dans les départements. Quant à la ligne 3114 de prévention du suicide, mise en service en octobre 2021, elle compte actuellement 11 centres répondants dont 3 fonctionnant 24h sur 24. Elle a déjà reçu 27 000 appels dont 10 à 15 % concernaient une crise suicidaire en cours ayant nécessité l’intervention des secours. « En 2022 de nouveaux centres répondeurs seront ouverts et des actions de communication ciblées seront menées » a prévu le ministre.

Des moyens en hausse de 2,4 % en 2021

Concernant le deuxième axe, relatif aux soins, Olivier Véran a précisé que sur le sujet épineux de l’isolement et de la contention en psychiatrie, le projet de loi renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire adopté le 16 janvier a permis de « rétablir » les mesures censurées dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2022. « Elles proposent un juste équilibre entre un meilleur contrôle de ces pratiques et la prise en compte de la réalité de situations cliniques difficiles que rencontrent les psychiatres », a estimé le ministre. A cet effet, 15 millions d’euros supplémentaires viendront abonder en 2022 le plan d'accompagnement, déjà prévu à hauteur de 15 millions d’euros en 2021, pour permettre aux établissements de se réorganiser.

Le ministre de la Santé a rappelé par ailleurs que les moyens financiers consacrés à la psychiatrie avaient progressé de 2,4 % en 2021. Une enveloppe de 40 millions d’euros a été allouée à 129 projets lauréats des appels à projet de la discipline en 2021, dont 30 millions pour la psychiatrie de l’enfant, permettant de soutenir 87 projets et 10 millions d’euros pour financer 42 projets organisationnels innovants en psychiatrie. « En 2022, face au succès de ces appels à projets, ils seront à nouveau proposés », a précisé Olivier Véran, notant que le fonds d’innovation organisationnelle serait doté de 10 millions d’euros et celui visant à renforcer la psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent de 20 millions d’euros.

Par ailleurs, à l’avenir, les « maisons de l’enfant et de la famille assureront dans les territoires la coordination des acteurs de la santé mentale et physique des enfants de 3 à 11 ans, sur le modèle des maisons des adolescents », a annoncé le ministre. Ces dernières seront renforcées, de même que les équipes mobiles, le volet psychiatrique du Service d’accès aux soins (SAS) et la création de lits à la demande en psychiatrie. Des mesures sur ces sujets seront précisées d’ici la fin du premier trimestre.

Remboursement de séances de psychologues

Pour améliorer l’accès aux psychologues, le dispositif MonPsySanté permettra dès le printemps prochain aux personnes ayant des troubles psychiques d’intensité légère à modérée de bénéficier de 8 séances remboursées chez un psychologue conventionné avec l’Assurance maladie. Un décret d'application de la LFSS pour 2022 est en instance de publication.

Concernant le troisième axe, sur l’insertion sociale des personnes en situation de handicap psychique, le ministre a indiqué sa volonté de soutenir le développement de la pair-aidance, ainsi que l’aide aux aidants, les emplois accompagnés ou encore l’aide à l’accès au logement. « Les enjeux dans les prochains mois, sont de réussir l’appropriation de la culture de la santé mentale par tous nos concitoyens », a-t-il insisté. « Nous allons mener des actions de communication, d’outillage des personnes pour la promotion d’une bonne santé mentale et un repérage précoce des difficultés », a-t-il énuméré.

« Nous devons aussi affronter le défi immédiat de la crise d’attractivité de la spécialité », a-t-il reconnu, assurant cependant que les mesures prises récemment devaient améliorer la situation. Il a cité la revalorisation des salaires et des carrières au titre du Ségur, la réforme du diplôme d’études spécialisé (DES) de psychiatrie, mais aussi la poursuite de l’augmentation du nombre de postes d’hospitalo-universitaires.

« Nous devons réussir la mise en œuvre de la réforme du financement de la psychiatrie, qui doit permettre de réduire les écarts intra et inter-régionaux, mais aussi la réforme des autorisations pour l’activité de psychiatrie », a-t-il ajouté.

 

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