Paris, France - En raison d’étiologies très variables, la prise en charge de la syncope reste complexe. Conformément aux dernières recommandations européennes, une évaluation initiale de qualité est fondamentale avant d’envisager une hospitalisation, a rappelé le Pr Jean-Claude Deharo (Hôpital de la Timone, AP-HM, Marseille), lors des Journées Européennes de la Société Française de Cardiologie  (JESFC 2022) [1].

La prise en charge d'une syncope implique de pouvoir distinguer un malaise réflexe ou orthostatique, bénin et assez fréquent, d’une syncope grave d’origine cardiaque. « L’évaluation initiale repose sur l’interrogatoire, l’examen clinique et l’électrocardiogramme (ECG) », avec l’objectif d'orienter le diagnostic, mais surtout de « déterminer le pronostic », afin de justifier ou non l’hospitalisation, a précisé le cardiologue.

L’intérêt d’une évaluation bien menée est de réduire les hospitalisations inutiles. Selon une analyse de plusieurs registres internationaux, près de la moitié des patients se présentant aux urgences pour une syncope sont hospitalisés et ce souvent sans justification[2]. Des données européennes montrent que le taux d’hospitalisation reste élevé lorsque les patients sont pris en charge en médecine spécialisée[3].

Drapeaux rouges et drapeaux verts

Caractérisée par une perte de connaissance de durée généralement brève, la syncope devient plus fréquente avec l’âge, en particulier après 70 ans. Dans la majorité des cas, elles sont vasovagales ou liées à une hypotension orthostatique sans gravité. Au final, avec une évaluation bien conduite, « moins de 5% des patients admis pour une syncope doivent être hospitalisés », selon le Pr Deharo.

L’évaluation initiale vise d’un côté à repérer les diagnostics évidents et de l’autre à stratifier le risque des cas les moins évidents. Il s’agit d’un « processus difficile et exigeant », qui peut expliquer le taux élevé d’hospitalisation, avance le cardiologue. « Il est beaucoup plus simple d’hospitaliser de manière systématique que de passer par ce processus. »

Pour faciliter la tâche, les dernières recommandations de la Société européenne de cardiologie (ESC) sur le diagnostic et la prise en charge de la syncope, publiées en 2018, décrivent des profils permettant de distinguer des syncopes réflexes à bas risque (drapeaux verts) de celles à haut risque (drapeaux rouges) suggérant la présence d’une cardiopathie.

L’examen clinique comprend un interrogatoire du patient et des témoins, pour identifier les cas de syncopes les plus évidents et déterminer les facteurs de risques, ainsi que les antécédents personnels et familiaux. Il est complété d’un examen physique avec mesure de la pression artérielle en position couchée et debout, ainsi que d’un ECG.

Les situations à risque détaillées

Dans certaines situations, il peut être ajouté une échocardiographie, en cas notamment de cardiopathie structurelle connue, un massage du sinus carotidien pour diagnostiquer certaines perturbations du rythme cardiaque (chez les plus de 40 ans), un test d’hypotension orthostatique (tilt testing) ou une analyse biologique (troponine, D-dimères…).

Les recommandations précisent les situations évidentes permettant un diagnostic rapide. Une syncope provoquée par une arythmie cardiaque est ainsi jugée « hautement probable » en présence d’anomalies spécifiques à l’ECG. De même, les syncopes réflexes doivent être envisagées en cas de prodrome neurovégétatif ou de facteur d’étiologie vagale, comme un stress émotionnel.

Si le diagnostic est difficile à poser, le document propose plusieurs éléments pour distinguer les profils à faible risque de ceux à haut risque. Ainsi, une syncope peut être considérée à faible risque lorsqu’elle survient pendant un repas ou lorsqu’elle est provoquée par un mouvement de la tête. A l’inverse, le risque est majeur en cas de syncope pendant un effort ou en position couchée.

Pour les cas indéterminés ou à risque intermédiaire, une évaluation complémentaire doit être menée rapidement, en faisant intervenir un spécialiste, a rappelé le cardiologue. Le patient peut également être mis en observation, idéalement dans une unité de syncope.

Les scores cliniques peu utilisés

 Intervenant en fin de session en tant que modérateur, le Pr Jacques Mansourati (CHU de Brest) a indiqué que les urgentistes du CHU de Brest sont « de plus en plus sensibles » à cette approche, les premiers résultats obtenus étant en faveur de l’évaluation initiale après syncope, telle qu’elle est proposée dans les recommandations européennes.

Pour les cas de syncope inexpliquée, des examens complémentaires sont également préconisés. Un monitoring ECG avec holter peut notamment être envisagé en présence de symptômes récurrents. En cas de suspicion de cardiopathie structurelle, une échocardiographie de repos est à prévoir. L’échocardiographie d’effort est aussi à envisager lors d’une suspicion d’obstacle.

L’épreuve d’effort est recommandée pour toute syncope lié à un effort. Des tests fonctionnels comme la manoeuvre de Valsalva ou la mesure ambulatoire de la pression artérielle (MAPA) ont aussi leur utilité dans certaines situations.

Plusieurs score cliniques ont été mis en point pour stratifier le risque. On peut citer le score EGSYS ou le score de San Francisco. Dans le cas du score EGSYS, la sensibilité et la spécificité à identifier une syncope cardiaque est respectivement de 92% et 69% pour un score ≥3, qui signale un risque élevé et conduit à une hospitalisation.

La stimulation cardiaque moins systématique

Si ces scores s’avèrent surtout utiles aux praticiens non-cardiologues dans le cadre d’une prise en charge aux urgences, « ils sont peu utilisés en France », à l’inverse des pays anglo-saxons, a précisé le Pr Deharo. L’une des raisons avancées: les paramètres sur lesquels reposent ces scores suffisent à eux seuls pour décider ou non d’hospitaliser.

Dans le cas du score EGSYS par exemple, le calcul dépend de la présence de palpitations (4 points), d’une anomalie sur l’ECG (3 points), d’une syncope à l’effort (3 points) ou allongé (2 points). Deux autres facteurs jugés rassurants sont pris en compte: présence de prodromes neurovégétatifs (-1 point) ou d’un facteur d’étiologie vagal, comme un stress émotionnel (-1 point).

Une fois l'hospitalisation décidée, se pose alors la question du recours ou non à la stimulation cardiaque. Les dernières recommandations européennes de 2021 concernant la stimulation cardiaque sont plus restrictives qu'auparavant en ce qui concerne l'implantation d'un stimulateur après syncope, comparativement aux précédentes de 2013.

Désormais, il est recommandé d'explorer de manière plus approfondie, en utilisant notamment un moniteur cardiaque implantable, pour sélectionner au mieux les patients pouvant bénéficier d'un stimulateur. Il s'agit également d'identifier les causes réversibles, lorsque le trouble cardiaque provoquant la syncope est, par exemple, d'origine iatrogène.

Les principales causes de syncope sont :

-la syncope vasovagale;

-la station debout prolongée;

-la fatigue, le stress, un épuisement physique ou moral;

-un choc (douleur, émotion);

-la température trop élevée;

-les troubles du rythme cardiaque ou autre cause cardiaque ;

-les médicaments (antihypertenseurs, diurétiques, vasodilatateurs ou antiarythmiques) ;

D’autres causes sont plus rares comme l’AVC ou l’accident ischémique transitoire, la migraine ou l’arthrose de la région cervicale.

Crédit image de Une : Dreamstime

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