Appendicite aiguë non compliquée: l’antibiothérapie s’impose en première ligne

Pam Harrison

Auteurs et déclarations

27 décembre 2021

Durham, Etats-Unis -  Si la chirurgie reste l’option de référence dans le traitement de l’appendicite aiguë, l’antibiothérapie peut aussi être envisagée en première ligne dans la plupart des formes non compliquées, suggère une revue de la littérature, qui a repris les résultats de plusieurs dizaine d’études, dont neuf méta-analyses [1]. Entre 60 à 70% des patients pris en charge pour une appendicite pourraient être ainsi traités.

« Je pense que nous avons désormais une excellente alternative. Si un patient a, par exemple, une crise cardiaque et qu’il présente ensuite une appendicite, il est difficile d’envisager une opération. Dans ce contexte peu favorable à la chirurgie, l’antibiothérapie nous offre une très bonne option », a commenté auprès de Medscape édition internationale, le Pr Theodore Pappas (Duke University School of Medicine, Durham, Etats-Unis), principal auteur de l’étude.

« Il n’est pas pour autant question de mettre systématiquement sous antibiotiques tous les patients se présentant pour une appendicite. Il s’agit plutôt d’apporter davantage de flexibilité dans la prise en charge de ceux que nous ne souhaitons pas opérer immédiatement », a-t-il ajouté. « Nous pensons que 60% à 70% des patients sont de bons candidats pour une antibiothérapie ».

Des recommandations favorables à l’antibiothérapie

L’appendicite aiguë est l’urgence chirurgicale abdominale la plus fréquente. L’appendicectomie par laparoscopie reste l’option thérapeutique de référence, mais l’intérêt de l’antibiothérapie est mieux considéré depuis plusieurs résultats concluants chez des patients présentant des formes non compliquées. Des recommandations, dont celles de l’American Association for Surgery of Trauma (AAST), y sont désormais favorables.

Le bénéfice du traitement par antibiotique a notamment été démontré dans une étude randomisée finlandaise. Après un an de suivi, 73 % des patients traités par antibiotiques pour une appendicite aiguë non compliquée n’ont pas eu de récidive nécessitant une chirurgie [2]. A cinq ans, les résultats montrent une hausse des récidives assez légère, puisque le taux passe de 27% à 39% [3]. Autrement dit, pendant les cinq années de suivi, 61% des patients sous antibiotiques ont pu éviter l’opération.

Dans cette étude finlandaise, l’antibiothérapie a débuté par de l’ertapénem administré en intraveineux (1g/jour) pendant trois jours. Après la sortie de l’hôpital, les patients ont poursuivi le traitement en prenant par voie orale, pendant sept jours, de la lévofloxacine (500 mg/jour) et du métronidazole (3X500 mg/jour).

Pour faire le point sur cette approche, le Pr Pappas et son équipe ont repris les résultats de 71 études, ainsi que de 9 méta-analyses et analysé 11 recommandations portant sur le traitement de l’appendicite aiguë. Les auteurs ont distingué l’appendicite compliquée des formes non compliquées caractérisées par l’absence de signe clinique et radiographique de perforation de l’appendice.

Une appendicite aiguë est considérée comme compliquée lorsque survient une perforation avec phlegmon (infection touchant plusieurs tissus) ou formation d’abcès. Le diagnostic doit être confirmé par tomodensitométrie (CT-Scan). « En cas de diagnostic incertain, un examen par imagerie doit être pratiqué », en général par échographie ou CT-Scan, rappellent les auteurs.

Jusqu’à 40% de récidives à un an

En cas d’appendicite aiguë non compliquée, trois recommandations, dont celles de l’AAST, préconisent désormais une antibiothérapie en première intention. Le schéma proposé est en général un antibiotique à large spectre en ambulatoire (ertapénem ou bithérapie céphalosporine/métronidazole en intraveineuse), puis un traitement oral par fluoroquinolone et métronidazole à la sortie de l’hôpital.

Les auteurs précisent que les antibiotiques ayant un effet sur les streptocoques, les entérobactéries non résistantes et les bactéries anaérobies sont généralement les plus appropriés. « La durée recommandée du traitement par antibiotiques est de 10 jours », indiquent-ils.

 
le taux de récidive à un an varie de 15 à 41% après un traitement par antibio-tique
 

Dans la plupart des études comparant l’antibiothérapie à l’appendicectomie, le critère principal d’évaluation est l’échec du traitement à un an caractérisé par l’apparition d’une récidive nécessitant une intervention chirurgicale. En considérant l’ensemble des études analysées, le taux de récidive à un an varie de 15 à 41% après un traitement par antibiotique, révèle l’étude. A l’inverse, les récidives après chirurgie sont rares.

Concernant l’antibiothérapie, un échec précoce de traitement, caractérisé par une altération ou une absence d’amélioration de l’état du patient dans les 24 à 72 heures après la mise sous antibiotiques, reste relativement peu fréquent, puisqu’il concerne 8 à 12% des patients traités pour une appendicite aiguë non compliquée.

Pas indiquée en première ligne chez tous les patients

Globalement, les essais cliniques analysés ne montrent pas de différence dans la durée du séjour hospitalier. Après une appendicectomie, les patients sont de retour chez eux dans les 24 heures. S’ils reçoivent une antibiothérapie, ils ont un traitement en intraveineuse puis, généralement le lendemain, des antibiotiques oraux à leur sortie d’hôpital, ce qui suggère aussi peu de différence entre les deux approches sur le temps passé à l’hôpital.

 
Globalement, les essais cliniques analysés ne montrent pas de différence dans la durée du séjour hospitalier
 

Chez certains patients, l’antibiothérapie administrée en première ligne a peu de chance d’être bénéfique, souligne le Pr Pappas. C’est le cas notamment de ceux qui présentent une forte fièvre, des tremblements, des frissons ou des douleurs abdominales sévères. L’échec de l’antibiothérapie est aussi à prévoir chez les patients qui ne semblent pas malades, mais qui présentent à l’imagerie des morceaux de selles coincés dans l’appendice (appendicolithe).

Il faut aussi s’attendre à un traitement par antibiotique peu efficace chez « les patients ayant un appendice dilaté avec accumulation de fluide dans les tissus avoisinants ». Enfin, autre catégorie de patients chez qui l’antibiothérapie seule n’est pas suffisante, alors qu’elle est indiquée en première ligne: les cas appendicite compliquée avec perforation purulente.

« Ces patients sont d’abord traités par antibiotiques car l’opération peut s’avérer chaotique, alors que si leur état est relativement stabilisé, il est possible d’effectuer un drainage de l’abcès et de les mettre sous antibiotique. Six à huit semaines plus tard, vous pouvez décider s’il faut retirer ou non l’appendice », explique le chirurgien.

Selon le Pr Passas, le choix thérapeutique devrait également, dans l’idéal, impliquer le patient, au risque de le voir opter en priorité pour la chirurgie. « L’option est convaincante: l’opération se fait par laparoscopie, le patient est de retour chez lui dans les 24 heures et le taux de complication [et de récidive] est très faible ».

Un traitement au cas par cas

Invité à commenter les résultats, le Dr Ram Nirula (Univerity of Utah, Salt Lake City, Etats-Unis) a rappelé que rien n’est prédéfini à 100% en médecine. « Dans la prise en charge de l’appendicite non compliquée, les antibiotiques sont plus appropriés dans certains cas, tandis que l’appendicectomie est préférable dans d’autres », a-t-elle souligné auprès de Medscape édition internationale.

L’essai randomisé CODA a récemment rapporté une qualité de vie similaire à 30 jours chez les patients recevant des antibiotiques pour traiter une appendicite non compliquée, en comparaison avec ceux qui ont été opérés. Le taux d’échec reste toutefois assez élevé, en particulier en cas d’appendicolithe [4].

Dans cette étude, le besoin en ressources médicales est apparu plus élevé avec l’antibiothérapie alors que le temps d’hospitalisation est similaire entre les deux approches, note le Dr Nirula. « Personnellement, je préférerai que mon appendice soit retiré. Néanmoins, chez les patients qui ne sont pas de bons candidats à la chirurgie, les antibiotiques restent l’option à privilégier. »

 
Personnellement, je préférerai que mon appendice soit retiré. Néanmoins, chez les patients qui ne sont pas de bons candidats à la chirurgie, les antibiotiques restent l’option à privilégier
 

Dans le cas plus précis de patients avec appendicoltihe, la chirurgie semble plus appropriée. Mais, là aussi, en cas de contre-indication à la chirurgie, le Dr Nirula estime qu’il est préférable d’opter en première intention pour les antibiotiques.

Le Dr Pappas a déclaré des liens d’intérêt avec Transenterix Corp

Le Dr Nirula n’a pas déclaré de conflits d’intérêt en lien avec le sujet.

Cet article a été publié sur Medscape.com sous le titre Renal Denervation Remains Only Promising in Meta-Analysis. Traduit et adapté par Vincent Richeux.
 

Crédit photo de une : Dreamstime

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