POINT DE VUE

Diabète et COVID : un argument pour vacciner les enfants ? 

Pr Boris Hansel

Auteurs et déclarations

19 janvier 2022

Le blog du Pr Boris Hansel - Diabétologue et nutritionniste

Les jeunes infectés par le SARS-CoV-2 sont plus à risque de développer un diabète, selon une nouvelle étude américaine. Ces données justifient-elles de pousser à la vaccination des enfants?

TRANSCRIPTION

Les jeunes qui ont été touchés par le Covid-19 sont plus à risque de développer un diabète. C'est la conclusion d'une large étude qui a été menée aux Etats-Unis. [1] Mais attention, ces observations dans leurs interprétations posent des questions importantes que je vais brièvement aborder, avec à la clé une implication pratique. Est-ce que ces données justifient de pousser à la vaccination des enfants?

Les chercheurs ont analysé les données de deux grandes bases de données à partir des codages diagnostiques qui ont permis d'identifier, en particulier chez des jeunes de moins de 18 ans, d'une part l'apparition d'un Covid, et d'autre part l'apparition d'un diabète. Ici, seuls les diabètes qui sont apparus au moins 30 jours après l'infection Covid ont été pris en compte parce qu'il fallait exclure les hyperglycémies transitoires qui sont toujours possibles lors d'une infection, d'autant plus si un traitement par corticoïdes est utilisé. Or, on sait qu'on traite un certain nombre de patients Covid avec des corticoïdes.

L'incidence du diabète après Covid a été comparée à celle de deux populations appariées. D'abord une population qui n'avait pas contracté le Covid, puis une population qui avait contracté une infection respiratoire, mais non Covid.

Résultats de l’étude : dans une des bases de données, on a comparé et vu que le risque de diabète était de 8 pour mille en cas de Covid, contre 3 pour 1000 chez les sujets qui n'avaient pas fait de Covid. Ce qui veut dire une augmentation de 166%. À partir de la seconde base de données, on a observé une augmentation beaucoup plus modeste, mais significative, de 31% du risque de diabète après Covid. En revanche, le risque de diabète n'était pas augmenté dans la population témoin qui avait eu une autre infection respiratoire. En clair, il semble bien que ce soit le Covid qui favoriserait l'apparition d'un diabète à distance. Chose importante : le risque a été retrouvé aussi bien chez les enfants que chez les adolescents ; mais c'était vrai uniquement dans l'une des deux bases de données. Dans la seconde, les enfants n'avaient pas de surrisque de diabète avec le Covid, contrairement aux adolescents qui, eux, avaient bien un risque plus élevé de développer un diabète quand ils avaient fait un Covid.

Quel était le type de diabète ? A priori, il ne s'agit pas de diabète cortico-induit parce qu'on a exclu les diabètes dans les 30 jours autour de l'infection Covid et parce que les codages excluaient le diabète cortico-induit. Il s'agissait d'authentiques diabète de type 1 et de type 2, sans que l'on puisse distinguer dans cette étude la proportion de type 1 du type 2.

Pourquoi un risque de diabète augmenté après un Covid?

Plusieurs hypothèses sont proposées :

- d'abord, l'effet direct du virus sur les cellules pancréatiques qui présentent le récepteur à ACE2.

- une autre hypothèse est ce que j'appellerais un « rôle catalyseur » chez des jeunes pré-diabétiques. Aux États-Unis, cela représente un adolescent sur cinq. Donc l'infection accélérerait l'évolution vers le diabète, mais c'est un diabète qui, sinon, apparaîtrait probablement plus tard.

- le poids chez les malades pourrait être le mécanisme par lequel l'infection favoriserait le diabète.

Ce sont des hypothèses, mais rien de complètement convaincant. Le mécanisme, bien sûr, reste à éclaircir.

Vaccination des jeunes

Les auteurs de l'étude utilisent leurs données comme un argument en faveur de la vaccination des ados, et aussi des enfants. On sait à quel point ce sujet est sensible. C'est certainement un élément à prendre en compte, ce risque potentiel de diabète, même chez les enfants. Mais je ne crois pas qu'il faille utiliser ce genre de résultats épidémiologiques pour faire peur. Parce qu'à chaque fois qu'on donne un avis qui est basé sur des connaissances avec un niveau de preuve relativement faible, cela risque encore de décrédibiliser les paroles des experts le jour où on remet en question ces résultats. Dans le contexte actuel, on ne le veut pas.

Je vous remercie de votre attention et je vous dis à très bientôt sur Medscape.

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